«le régime n'est ni dictatorial, ni démocratique. Ni présidentiel, ni parlementaire.» Dans un entretien accordé à la revue Afak/Ideas, une publication trimestrielle s'intéressant au dialogue entre le Maghreb, l'Espagne et l'Europe, éditée par l'Institut européen de la Méditerranée basé à Barcelone (Espagne), et repris par l'Agence algérienne d'information (AAI), le général-major Mohamed Touati a donné son sentiment profond sur la nature du système qui gouverne aux destinées de l'Algérie depuis son indépendance. Sur ce chapitre précisément et du débat qui le concerne depuis l'ouverture du pays au pluralisme politique, le général Touati dira: «Je suis tenté de dire davantage que nous sommes dans un «non-système» plutôt que dans un système bien défini et bien typé». Et d'ajouter: «Malgré ce qui se dit, le régime n'est ni dictatorial ni démocratique. Ni présidentiel ni parlementaire. Nous ne sommes certes pas une monarchie mais sommes-nous tout à fait une République pour autant?» Une interrogation lourde de sens dans la bouche du conseiller en sécurité auprès de la présidence de la République. Lequel préconise comme issue de l'élection d'avril «des changements et ils le sont d'une manière urgente ils devront porter à la fois sur la promotion des valeurs citoyennes et sur une véritable ré-architecturation des pouvoirs publics», dans l'optique de «réduire la forte déperdition d'efforts, de compétence et d'énergie dont souffre le pays en raison du mode d`organisation et de fonctionnement des choses qui demeure encore anachronique». En d'autres termes, le général-major estime que les choses n'ont pas trop évolué, contredisant de fait le discours officiel qui évoque une bien meilleure maîtrise des affaires de l'Etat durant la mandature de Bouteflika. Pour le conseiller du président, «tout autre projet qui ne garantisse pas effectivement les libertés et droits fondamentaux au sein d'un Etat de droit où chaque Algérien s'estimera à dimension et chance égales vis-à-vis de tout autre, est, à mes yeux, voué à la précarité et à une remise en cause.» Une invitation au prochain locataire du palais d'El-Mouradia de s'atteler à concrétiser le principe de l'Etat de droit. Cela dit, le général Touati est catégorique quant au rôle de l'ANP dans la prochaine élection présidentielle. «L'armée n'a pas a s'ériger en censeur ni de!a classe politique ni des dirigeants de l'Etat. Elle ne doit pas sortir de son impartialité (...) L'armée n'a donc pas à s'impliquer dans la compétition électorale encore moins dans les luttes de clientélisme politique», affirme-t-il, estimant que «l'élection présidentielle d'avril 2004 est incontestablement une étape d'une extrême importance pour le pays. C'est un test de vérité aussi bien pour les dirigeants politiques de l'Etat que pour les candidats en compétition et leurs formations politiques.» Il estime par ailleurs que le prochain rendez-vous électoral constitue pour l'Algérie, toutes institutions confondues, une étape majeure. «La société civile, bien qu'à un degré moindre, est aussi concernée par ce test de vérité. L'armée n'y échappe pas non plus. II ne faudrait pas qu'elle sorte de son impartialité malgré les graves appréhensions qu'on peut nourrir en la circonstance. Pour tout le monde, c'est un test de loyauté et de probité, de crédibilité et de compétence tout à la fois», relève-t-il. A propos de sa lecture du processus électoral, il a souhaité que «les scrutins à venir y compris celui d'avril 2004 soient en net progrès par rapport aux précédents notamment au plan de la transparence et de la fiabilité. C'est à ce prix aussi que l'Algérie pourra accéder à une stabilité durable afin qu'elle puisse renouer avec un essor continu.» Concernant les scénarios qu'il prévoit pour l'Algérie après l'élection, Touati a préféré s'inscrire «dans l'optimisme et espérer que ce soit ceux découlant du programme électoral du candidat qui sera issu légitimement du scrutin.» Enfin, pour le général Touati, il s'agit de réaliser ce que «les Constitutions précédentes ont prévu sans jamais y parvenir réellement», c'est-à-dire «les droits et libertés fondamentaux inaliénables et la participation populaire à la gestion des affaires publiques». Tout un programme.