Abdelmalek Droukdel, émir d'Al Qaîda au Maghreb Dans un message audiovisuel, l'émir de la branche maghrébine d'Al Qaîda, Abdelmalek Droudkel, appelle les Marocains à «émigrer vers Allah au lieu d'émigrer dans des pateras». Panique au Palais royal. Le Royaume est sens dessus-dessous. La contre-attaque d'Aqmi au démantèlement récent d'une de ses cellules terroristes au Maroc ressemble à de la dynamite. Première victime collatérale: Ali Anouza. Le directeur du média indépendant Lakome qui a diffusé la vidéo d'Aqmi appelant le peuple marocain à se soulever est en état d'arrestation. «Suite à la diffusion par le journal électronique Lakome d'une vidéo attribuée à Al Qaîda au Maghreb islamique (Aqmi), comprenant un appel clair et une incitation directe à commettre des actes terroristes dans le Royaume du Maroc, le parquet général a donné ses instructions à la police judiciaire pour procéder à l'arrestation du responsable dudit journal électronique pour investigation», a indiqué hier, un communiqué du procureur général du roi. La nébuleuse islamiste change de fusil d'épaule. Dans son collimateur: Mohammed VI. Elle peaufine sa stratégie de communication pour convaincre le peuple marocain à se soulever contre son roi. L'appel et la référence au djihad ne suffisent plus. Le communiqué prend des allures de lutte des classes, de dictature du prolétariat et fait plutôt référence à l'orthodoxie marxiste enrobée dans une bonne dose d'idéologie religieuse. Une marque de fabrique qui a toutes les chances de bien se vendre. Cela risque de faire mouche. Les arguments tiennent la route. Ce n'est plus musulmans radicaux contre musulmans tolérants. La fracture se traduit désormais en termes d'appartenance de classe: riches contre pauvres. Le slogan prend des allures de «Prolétaires de tous les pays unissez vous». On se croirait revenu à cette fin de XIXe siècle. Aux conditions de travail forcené des ouvriers des manufactures des bas fonds-de Londres... Là où se sont forgées les révoltes ouvrières les plus dures qui ont abouti à des acquis sociaux arrachés de haute lutte. Le Maroc compte plus de 5 millions d'habitants qui vivent avec moins d'un euro par jour. C'est sur cette frange de la population que compte s'appuyer la nébuleuse islamiste pour faire trembler le trône alaouite. Abdelmalek Droukdel appelle les Marocains à «émigrer vers Allah au lieu d'émigrer dans des pateras». En termes plus clairs, il leur demande d'opter pour le djihad plutôt que de choisir l'émigration clandestine sur des embarcations de fortune. Le responsable de leur misère est tout désigné: Mohammed VI. Aqmi fait référence à la corruption et l'affairisme du Palais royal et cite les câbles diplomatiques révélés par WikiLeaks tout en mettant en exergue sa colossale fortune qui le classe parmi les monarques les plus riches de la planète tout en faisant un parallèle avec la pauvreté dans laquelle pataugent ses sujets. Le magazine financier américain Forbes le classe parmi les personnalités les plus riches du monde. «Il est à la tête d'un joli pactole s'élevant à 2,5 milliards de dollars... et il caracole à la septième place des rois les plus aisés du monde sur une liste comprenant 15 souverains» rapportait le Courrier international, le 9 juillet 2009. Nous démontons non seulement les mécanismes d'un système, mais aussi les ressorts psychologiques internes qui ont transformé le prétendu «roi des pauvres» en un véritable «roi prédateur» écrivent Catherine Graciet et Eric Laurent dans un ouvrage qui lui est consacré paru aux éditions du Seuil. Dans sa vidéo, Al Qaîda au Maghreb islamique n'épargne pas non plus le monarque chérifien en dénonçant ses accointances avec de puissants lobbys américains prosionistes. Le Comité Al Qods, présidé par Mohammed VI, est qualifié par elle de «comité de judaïsation de Jérusalem». C'est au lobby pro-sioniste «American Israel Public Affairs Committee» (Aipac), basé à Washington qui soutient Israël et sa politique de colonisation des territoires palestiniens que le pouvoir marocain s'est adressé pour qu'il fasse basculer en sa faveur le Congrès américain en ce qui concerne la question sahraouie (lire L'Expression du 28 juillet 2013). Un nouveau déballage qui a mis le Palais royal sens dessus-dessous.