Désormais, lorsqu'on parle de l'Irak on parle aussi d'Al Qaîda et ses sous-traitants maghrébins. La découverte jeudi à Londres d'un engin explosif au moment même où Tony Blair, l'ex-Premier ministre britannique, menait sa mission de «bons offices» au Proche-Orient, vient rappeler aux responsables du 17, Dowing street les attentats meurtriers de l'été 2006. Simultanément, après que l'engin fut désamorcé, les services de sécurité britanniques ont élevé le niveau d'alerte et renforcé le bouclage de certains quartiers réputés «chauds» et abritant une grande communauté musulmane. A Paris, Madrid, ou Rome, les mesures de sécurité sont également renforcées, et tout indique que les autorités ont pris au sérieux les menaces du groupe Al mouhadjiroune en Europe, d'Al Qaîda, dirigé par Abou Hafs Abdelwadoud, diffusées récemment sur Internet. Dans le même contexte, l'arrestation à Barcelone de quatre marocains soupçonnés de faire partie d'un réseau de recrutement au profit d'Al Qaîda au Maghreb islamique a fait rejaillir le spectre de la menace terroriste en terre ibérique. En Italie, c'est la même «ambiance». La peur des attentats s'installe et tout le monde semble prendre conscience finalement que l'Irak n'est pas si loin que cela! Ce pays qui vit au rythme des hécatombes s'est transformé, grâce à l'occupation américaine en arrière-base d'Al Qaîda. Les armes et les explosifs sont stockés en grande quantité et les réseaux de recrutement pour «le djihad» en Mésopotamie ont élargi leurs activités en Algérie, en Tunisie, au Maroc et en Europe. Désormais, lorsqu'on parle de l'Irak, on parle aussi d'Al Qaîda et ses sous-traitants maghrébins. Ces derniers menacent de mettre le Maroc à feu et à sang. En plus du dossier lourd du Sahara occidental, le Palais royal semble affronter d'énormes difficultés pour au moins atténuer la menace terroriste. Ces «ceintures» de la pauvreté qui entourent les principales villes marocaines sont devenues le territoire exclusif des islamistes. L'exclusion de milliers de jeunes a fait d'eux une proie facile entre les mains des rabatteurs d'Al Qaîda au Maghreb islamique. Certains ont réussi à traverser la frontière et à rejoindre les maquis de la zone II à Boumerdès en Algérie, renforçant les rangs des étrangers qui se trouvent déjà sous l'autorité de Droukdel, émir national du Gspc Aqmi. Selon le ministre de l'Intérieur, leur nombre ne dépasse pas la quarantaine. Même s'ils ne constituent pas une grande menace, il ne faut pas oublier qu'ils regroupent six nationalités au moins. Le discours de Zerhouni se veut rassurant, mais le phénomène risque, cependant, de prendre de l'ampleur, s'il n'y a pas une volonté maghrébine commune pour y faire face. A Tunis comme à Alger ou Rabat, on est conscient de la menace. Néanmoins, les interférences politiques freinent considérablement une coordination sécuritaire exemplaire. L'Europe est à deux pas. D'ailleurs, à Berlin, à Paris, à Madrid et à Rome, l'extrême droite s'est saisie de cette question sécuritaire pour développer un discours haineux à l'encontre des Maghrébins. Pour cette extrême droite, tous les malheurs de l'Europe viennent du Maghreb. Droukdel et ses maîtres à penser d'Al Qaîda, qui profiteront de ces discours extrémistes, vont-ils réussir à transformer l'ensemble de la région en un immense laboratoire pour les services de renseignements étrangers?