«La mort d'une bonne action, c'est d'en parler.» Proverbe saoudien Après l'Iran, l'Arabie Saoudite s'apprête à se lancer dans la course aux Oscars avec Wadjda signé Haïfaa al-Mansour. Ce film mettant en scène une petite fille qui se bat pour avoir le droit d'enfourcher une bicyclette, a déjà étonné les plus grands festivals du 7e art. C'est le premier long métrage tourné en Arabie Saoudite dans les rues de Riyadh, par une femme. L'oeuvre a déjà remporté le Prix du meilleur long métrage arabe au Festival du film de Dubaï, le prix France Culture Cinéma (catégorie révélation) au Festival de Cannes, et a été ovationné à Venise l'année dernière - il est reparti avec le Prix du meilleur film Art & Essai, le Prix Cinem Avvenire et le prix Interfilm. Le Royaume wahhabite qui n'autorise pas la représentation cinématographique et qui interdit les salles de cinéma sur son territoire va, pour la première fois, postuler aux Oscars avec ce film. Le fait que Riyadh aille jusqu'à faire de cette petite fille l'emblème de son pays à Hollywood, est totalement inédit. Le film doit cependant être soumis à une rude compétition: près de 80 pays dans le monde se positionnent actuellement dans la course aux Oscars. La France présente Renoir, de Gilles Bourdos. Seuls cinq longs métrages seront finalement sélectionnés pour concourir à l'Oscar du meilleur film étranger, le 2 mars 2014. Mais ce n'est pas acquis pour autant. Après des études de littérature au Caire et des études de cinéma à Sydney, la réalisatrice Haifaa al-Mansour a pris sa caméra en tournant des courts-métrages et un documentaire. Elle a soumis le scénario de Wadjda aux autorités saoudiennes, obtenu de l'argent de producteurs français, allemand et saoudien, et enfin autoriser à filmer dans son pays. Aucun autre film n'avait encore été tourné dans les rues de Riyadh. La réalisatrice y est parvenue en restant dans une camionnette, à l'abri des regards, et en dirigeant son équipe à l'aide d'un talkie-walkie. Elle s'est également aidée du casting: seule une petite fille peut se permettre de tourner une scène de film dans la rue. Si la réalisatrice Haïfaa al-Mansour s'aventure autant, c'est parce qu'elle est soutenue par le prince Al-Walid ben Talal, un membre progressiste de la famille royale et surtout propriétaire des télévisions comme Rotana qui finance plusieurs films arabes. Même si film n'a pas été encore projeté à Riyadh, les attentes surtout politiques sont fortes. Contrairement aux Iraniens, les Saoudiens ne sont pas contre une sélection aux Oscars. Si les Iraniens ont une industrie cinématographique à faire valoir, à travers ce film, l'Arabie Saoudite veut améliorer son image de pays rigoriste et anti-progressiste. Pour preuve, la police religieuse saoudienne a autorisé aux femmes de monter à bicyclette dans les lieux de loisir comme les parcs publics, «à condition de demeurer revêtues de la abaya (longue robe noire traditionnelle)» et d'être accompagnées par un membre masculin de leur famille. [email protected]