Les insurgés taliban ont manifesté hier un rare signe de soutien au président afghan Hamid Karzaï en approuvant sa décision de différer la signature d'un traité de sécurité avec les Etats-Unis que Washington voudrait boucler au plus vite. Kaboul et son allié américain négocient depuis des mois un traité bilatéral de sécurité (BSA) qui doit définir les modalités d'une présence militaire américaine en Afghanistan après le retrait des 75.000 soldats de l'Otan, fin 2014. M.Karzaï a indiqué qu'il ne promulguerait cet accord qu'après l'élection présidentielle afghane du 5 avril 2014, exaspérant les Américains qui souhaiteraient le voir signé avant la fin 2013. «Il semblerait que (M. Karzaï) ait découvert la vérité», déclarent les taliban dans un communiqué au ton inhabituellement sobre vis-à-vis du président afghan, qu'ils ont coutume de présenter comme une «marionnette» des Etats-Unis. «Nous espérons que cette opposition puise ses racines dans la fierté du peuple afghan et qu'elle vise à mettre fin aux problèmes du pays», ajoutent les rebelles islamistes, farouchement hostiles au BSA et à tout maintien de troupes étrangères dans le pays. Renversés du pouvoir en 2001 par une coalition militaire internationale dirigée par les Etats-Unis, les talibans mènent une violente insurrection contre le pouvoir afghan et les forces de l'Otan. Toujours à propos de ce traité, un haut responsable de l'Otan a averti hier le président afghan Hamid Karzaï que le lancement d'une mission internationale après 2014 allait dépendre de la signature du traité de sécurité entre Kaboul et Washington, actuellement en suspens. S'il n'y a pas d'accord Afghanistan/Etats-Unis, il n'y aura «probablement pas de mission post-2014» pour l'Otan et des soutiens financiers qui vont avec, a précisé le haut responsable de l'Alliance atlantique, s'exprimant sous le couvert de l'anonymat. Ce dossier sera au menu des discussions des ministres des Affaires étrangères des 28 pays de l'Otan qui se réunissent aujourd'hui et demain à Bruxelles. M. Karzaï a refusé jusqu'à présent de signer le traité bilatéral de sécurité (BSA), estimant que cela ne devait être fait qu'après la présidentielle d'avril 2014. Le BSA doit définir les modalités d'une présence militaire américaine après le départ des 75.000 soldats de l'Otan, fin 2014, qui fait craindre une flambée de violences, voire une future guerre civile dans un pays en partie contrôlé par la rébellion menée par les taliban. L'Otan a prévu de lancer une mission «d'assistance, de soutien et de formation» des forces de sécurité afghanes à partir de 2015. Elle espère prendre une décision début 2014 sur les contours de cette mission, dont les effectifs sont actuellement évalués entre 8.000 et 12.000 hommes. Avec des pays partenaires comme le Japon, l'Otan prévoit également de financer partiellement les forces afghanes, dont les besoins évalués à 4,1 milliards de dollars par an. La «confiance des donateurs pourrait être affectée» en cas de non-accord Afghanistan/Etats-Unis, a précisé le haut responsable de l'Otan. La Maison Blanche avait averti la semaine dernière que, «sans signature rapide, les Etats-Unis n'auraient d'autre choix que de commencer à prévoir un après 2014 où les troupes américaines ou de l'Otan ne seraient plus présentes en Afghanistan»