En soutenant le plan Sharon, le président américain vient de donner une prime à la violence dans les territoires palestiniens occupés. Le président américain George W.Bush en soutenant, mercredi, sans nuance et sans réserve, le plan de «séparation» de Sharon vient sans doute de donner le coup de grâce au plan de paix international dit de la «feuille de route». Que reste-t-il en effet à négocier entre Palestiniens et Israéliens, quand le chef du gouvernement israélien, Ariel Sharon, juge et partie, a tout ficelé à sa convenance?. Ainsi, M.Bush a tout simplement ignoré le partenaire palestinien, sans lequel rien ne peut se faire, donnant en réalité une prime à la violence en entérinant la brutalité du fait accompli israélien. Et la proximité de l'élection présidentielle américaine n'explique pas tout au niveau d'un conflit qui perdure depuis plusieurs décennies, car un tel plan, qui ne prend en compte que les intérêts d'une partie, -Israël-, est totalement contre-productif, et il est tout aussi illusoire de croire pouvoir commander aux Palestiniens ce qu'Israël, malgré sa puissance militaire, malgré les soutiens militaire et diplomatique américains sans faille, n'est pas parvenu à leur imposer depuis 1948. George W. Bush en refusant de prendre la responsabilité de jouer le rôle impartial de parrain qui aurait dû être le sien, vient en vérité de remettre en cause le fragile processus de la feuille de route, lequel, comme chacun sait, n'a toujours pas connu de début d'application, essentiellement du fait d'Israël. D'ailleurs, il convient de relever le fait que le président américain, lors de sa déclaration mercredi - après son tête-à-tête avec Sharon - n'a fait aucune allusion à la feuille de route, ce qui est un aveu implicite, sinon de son abandon, à tout le moins sa mise entre parenthèses. La feuille de route est dès lors, un plan de paix, selon toute apparence, passé par perte et profit, tendant ainsi à conforter, outre Sharon et son diktat sur le dossier palestinien, le lobby sioniste américain dans la perspective de sa réélection en novembre prochain. Ainsi, M Bush, joue la Palestine à la roulette russe, faisant peu cas d'un peuple qui subit depuis 56 ans le joug de la colonisation israélienne, un peuple qui ne demande pourtant que son droit de vivre libre et indépendant, comme le lui reconnaissent les nombreuses résolutions du Conseil de sécurité de l'ONU, dont notamment les résolutions 242 et 338 de 1967 et de 1973. Le président américain vient en réalité de disqualifier les Etats-Unis dans tout processus de règlement du contentieux israélo-palestinien. En effet, son parti pris flagrant pour Israël met en défaut toutes les affirmations des responsables de l'administration américaine sur la question des territoires palestiniens occupés. Tentant de rattraper ce qui pouvait l'être encore, Colin Powell, le secrétaire d'Etat américain, a tenté maladroitement de justifier les positions prises par le chef de l'Etat américain, en accordant son soutien à un plan unilatéral qui condamne et annule tout ce que la communauté internationale essaye de réaliser au Proche-Orient pour trouver une solution équitable. Ainsi, M. Powell affirme : «Je ne crois pas du tout que nous ayons abandonné notre rôle de médiateur honnête», indiquant «Plutôt que de nier la réalité, parlons-en, et laissons les deux parties, dans le processus de négociation, en essayant d'établir leur statut définitif, décider elles-mêmes ce qu'il faut.» Or, soit Colin Powell n'a pas lui-même compris le plan de Sharon, ou toutes les étapes de la ‘'bantoustanisation'' des territoires palestiniens occupés, sont prévues, soit il est de mauvaise foi. Sans doute les deux, quand il parle d'honnêteté, alors que Sharon a bien spécifié que son plan est rendu nécessaire par «l'absence d'interlocuteurs» palestiniens. Ce qui fait que le statut futur de la Palestine figure bel et bien dans le plan soutenu par Bush, sans négociation et sans accord des Palestiniens. De fait, cela est-il surprenant si l'on constate que depuis sa prise de pouvoir, Bush à rencontré Sharon à neuf reprises, pour une seule rencontre avec l'ancien Premier ministre palestinien Mahmoud Abbas. En réalité, les Etats-Unis n'ont pas de politique précise pour les territoires palestiniens occupés et ce sont les Israéliens qui organisent cette politique que Washington entérine sans autre forme de procès. D'ailleurs, les Palestiniens ont très mal pris le soutien de Bush au plan Sharon, ce qui fit dire à Nasser El-Kidwa, représentant de l'Autorité palestinienne à l'ONU, que les Etats-Unis «ne semblent plus en mesure de poursuivre leur rôle de médiateur au processus de paix». Pour sa part, très remonté, le président palestinien, Yasser Arafat, a condamné le soutien de Bush à Sharon réitérant : «Notre destin est de défendre notre terre, nos lieux saints, Jérusalem, notre droit à l'indépendance et la liberté et le droit des réfugiés de retourner dans leur patrie», affirmant que les Palestiniens allaient poursuivre «la lutte pour l'indépendance» soulignant que la paix ne pourrait être instaurée entre les deux communautés, israélienne et palestinienne, «sans la fin totale de l'occupation et de la colonisation israélienne». Le plan Sharon signe en fait un arrêt brutal dans le processus de paix au Proche-Orient et si demain il y a une reprise de la violence dans les territoires occupés, le président Bush et Sharon en porteront l'entière responsabilité. D'où la question de savoir quel jeu joue en ce moment George W.Bush?