La présidentielle de 2014 a produit des effets inattendus sur certaines sphères et notre presse nationale n'y a pas échappé. La presse écrite est un des moyens d'expression dont disposent les gens dans un pays donné. Elle est aussi un des champs de bataille pour la liberté et la démocratie. Néanmoins, selon les périodes et les événements il est des questions qui se posent dans le domaine de cette presse écrite. Pourquoi écrit-on? C'est là une de ces questions qui méritent qu'on les pose autour de soi. Cette question mérite sans doute qu'on la pose d'abord et surtout à soi. La présidentielle de 2014 a produit des effets inattendus sur certaines sphères et notre presse nationale n'y a pas échappé. Elle a affecté la manière d'écrire de certains et la manière de caresser des autres, elle a amplifié l'art de louer chez les uns et la hargne de dénigrer chez les autres et elle a même offert de nouveaux points de vue par-ci et de nouvelles convictions par-là. Elle a aussi attiré quelques plumes d'occasion et, pour l'occasion, certaines belles plumes se sont mises visiblement à la sous-traitance en se donnant à l'exercice détestable de mettre la belle écriture au service de l'insulte, de l'injure et de l'invective. Quel dommage! Quelle perte! Quel gâchis! Parfois, on a l'impression que ces individus chargent carrément ceux qui osent des idées différentes des leurs, qu'ils dégoupillent des adjectifs nauséabonds et les jettent sur la place publique dès qu'ils entendent des commentaires qui leur déplaisent ou des idées qu'ils refusent d'entendre. Tout ceci sans jamais oublier d'accrocher par-dessus leur belle poésie guerrière, le drapeau de la liberté d'expression et l'étendard de la démocratie. Ce genre de soldats de quelques jours n'hésitent pas à être vulgaires et peu importe qui est visé. Un ami d'hier? Ils le descendent par leur style impitoyable. Leur chef d'il y a deux ou trois années? Ils l'agressent sans sourciller. Un chanteur qu'ils applaudissaient en même temps que les mains qui les nourrissent? Ils dégainent et font feu sans état d'âme. Une personnalité politique? Un sportif? Unefemme? Un homme? Dans la moulinette des mots, tout passe sous le regard aveugle de ceux qui en tournent le bras et dans le mixer de l'invective, tout est broyé pour le plaisir de l'exercice et, bien sûr, pour celui des clients d'une saison. On ne sert pas ainsi le pays. Et encore moins la République. Nous sommes à une intersection décisive du temps et de l'espace, une intersection qui ne manque d'importance ni pour notre présent, ni pour notre avenir, ni même pour notre devenir. Et ce n'est pas en fustigeant les autres, c'est-à-dire tous ceux qui osent parler différemment que l'on rend service à l'Algérie car, entendons-nous bien, l'Algérie est au-dessus de tous et ceci on ne peut le comprendre qu'à partir du moment où l'on se détache de son nombril et surtout du nombril de ceux qui font croire à d'autres qu'ils leur donnent à manger. Depuis quelque temps, certains sont obsédés par le désir de faire de leur obstination une vérité universelle. Il ne peut y avoir de démocratie si l'obstination est la voie ou si l'obsession est la méthode. Les Algériens qui ont cru pourtant en avoir terminé avec la pensée unique se réveillent ces jours-ci sur une tentation non cachée et un désir non tu de retour en arrière. Et tout cela avec la bénédiction de quelques belles plumes et tout cela avec le beau style en prime. L'obstination est humaine, certes, mais l'obsession de l'obstination, par contre, ne l'est pas. Faut-il lever le doigt pour demander la permission de parler? Ou bien faut-il lever le bras haut pour obtenir l'acquiescement en vue de dessiner un tableau? En vue de pondre un poème ou bien de chanter quelque chose? Faut-il une permission spéciale pour voter? Faut-il une autorisation exceptionnelle pour écrire quelque chose? C'est apparemment ce que souhaitent certains qui, parce qu'ils ont aujourd'hui quelques appuis, désirent nous tirer vers les longues nuits de la dictature des idées. Sont-ils sérieux au moins lorsqu'ils débitent ce qu'ils débitent? Il est difficile de savoir si certaines personnes parlent avec conviction ou si seulement elles choisissent leurs mots en fonction du cachet qu'elles perçoivent. On ne peut savoir si la récompense est fixe ou si elle se fait au prorata des cibles et de leur rang. Parfois, on a aussi l'impression que cela se fait au poids des laudatifs utilisés et au gré des applaudissements et des couches de vernis. On n'écrit pas pour la même cause. Ni de la même manière. Ni à partir du même bord de notre pays. Certains écrivent pour dire ce qu'ils pensent. D'autres pour rapporter la pensée d'autrui. Certains pour interpeller l'avenir, d'autres pour figer éternellement le passé et l'imposer comme moyen de mesure. Et c'est tant mieux si nous avons cette diversité sauf que, pour être bénéfique, il est nécessaire que certains cessent d'en vouloir à ceux qui ne partagent pas leurs avis. Que les poètes récitent les vers qui leur plaisent. Que les caricaturistes tirent les traits qu'ils veulent. Que les chanteurs balancent à leurs fans les paroles qu'ils veulent. Avril n'en sera que meilleur! Nul n'est le gardien privilégié de la démocratie. Encore moins ceux qui se font embaucher juste le temps de la saison électorale.