L'envolée des prix des fruits et légumes l'a fait sortir de ses gongs. Le ministre de l'Agriculture, Abdelwahab Nouri, n'en pouvait plus. Il n'en pouvait plus de voir le citoyen saigné au marché alors que son département s'évertue à pousser la production toujours vers la hausse. A Mostaganem où il accompagnait le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, dans sa visite de travail, il n'a pas mâché ses mots. Il a parlé comme on voudrait voir tous nos ministres le faire. Franchement et avec colère. «Les services chargés de la répression de la fraude et du contrôle des produits doivent faire leur travail» s'est-il révolté suite à une question sur l'instabilité des prix des fruits et légumes. Plus clair, il a ajouté: «Il y a un travail qui se fait au niveau du secteur de l'agriculture pour augmenter la production, mais il y a aussi les missions de contrôle qui sont du ressort du ministère du Commerce.» Au diable la solidarité gouvernementale quand l'intérêt général est en jeu. C'est le mérite dont a fait preuve Nouri. Plus question de «cacher la poussière sous le tapis» dès qu'il s'agit d'un sujet hautement sensible comme celui de la valse des prix des produits alimentaires. Chacun sait que cette valse n'est pas organisée par nos agriculteurs. Au contraire, ils en font eux-mêmes les frais. Le légume qu'ils vendent à x dinars est revendu exagérément plus cher au consommateur. Tout le monde sait que c'est l'oeuvre des intermédiaires qui spéculent sans vergogne, mais le ministre a tout de même insisté pour le rappeler. Le problème se situe dans le trajet entre le champ de culture et le marché de détail. Un trajet d'ombre sans lumière. Un trajet placé sous le contrôle du ministère du Commerce. Avec quel dispositif? On ne dit pas stratégie, ce serait trop dire. La réponse est venue du directeur général de la régulation et de l'organisation des activités au ministère. Il s'exprimait sur les perturbations, injustifiées, de la disponibilité du sachet de lait à 25 DA constatées ces derniers jours. «Le ministère (du Commerce, Ndlr) va enquêter à partir d'aujourd'hui (mercredi dernier) sur les vraies raisons à l'origine des perturbations dans la distribution de ce produit suite à une polémique entre l'Office national interprofessionnel du lait (Onil) et les différentes laiteries» a-t-il confié. Voilà comment le département de Benbada travaille. Il attend le problème pour réagir. De plus, c'est l'étonnement qui nous est servi en guise de réaction. Alors que le problème est simple. Il y a d'un côté les laiteries qui accusent l'Onil d'avoir diminué leurs quotas et de l'autre, le directeur général de l'Onil, Fethi Messar, qui soutient mordicus que «toutes les laiteries, publiques ou privées reçoivent leurs quotas normalement sans aucune restriction et cela depuis trois ans. Il n'y a aucun dysfonctionnement». Il suffit de prendre le carnet des livraisons de l'Onil pour savoir qui, des deux parties, dit la vérité. Vite fait bien fait. Sans pousser à l'enquête par ADN. Plus grave encore est cette position du ministère du Commerce toujours à la traîne d'une distribution qui rythme la danse à sa guise. Rien en amont. C'est toujours le même discours creux qui est servi pour les prix, pour la contrefaçon, pour la qualité, pour les marchés de gros sans parler de l'informel. C'est pourquoi le cri de colère du ministre de l'Agriculture traduit celui de tous les Algériens. La situation est telle dans le commerce que l'idée d'en confier des pans, sous forme de concessions, dans ses différentes étapes, au partenariat étranger, s'impose. On l'a fait pour la distribution de l'eau. Pour le métro. Les tramways. On se prépare à le faire pour la circulation dans la capitale. Alors, pourquoi pas, dans un premier temps et au moins, pour les marchés de gros?