Une consultation référendaire déterminante pour l'avenir politique du général al-Sissi La nouvelle loi fondamentale a été rédigée par une commission nommée par le gouvernement intérimaire que le général Sissi avait mis en place dès le 3 juillet. Les Egyptiens votaient hier pour le second jour sur une nouvelle Constitution, la participation étant déterminante pour le chef de l'armée qui ne cache plus ses intentions pour la présidentielle, au lendemain de heurts ayant fait neuf morts. Le «oui» devrait l'emporter facilement à l'issue de ce référendum qui s'apparente à un plébiscite pour le général Abdel Fattah al-Sissi, nouvel homme fort du plus peuplé des pays arabes, depuis qu'il a annoncé la destitution du président islamiste Mohamed Morsi le 3 juillet. Trois jours avant le scrutin, celui qui est également vice-Premier ministre et ministre de la Défense avait appelé les 53 millions d'électeurs à voter «oui», avant d'ajouter qu'il se présenterait à la présidentielle prévue en 2014 si le «peuple le réclame» et l'armée soutient sa candidature. Mardi, neuf personnes ont péri en marge des manifestations des partisans de M.Morsi, qui ont appelé à boycotter le référendum, et quelque 250 autres ont été arrêtées. Une bombe de faible puissance a par ailleurs endommagé la façade d'un tribunal au Caire avant l'ouverture des bureaux de vote. Hier, des dizaines de pro-Morsi ont bloqué une station de métro en périphérie du Caire, provoquant des heurts limités, selon des responsables des services de sécurité. La presse a salué le scrutin. Le quotidien gouvernemental Al-Goumhouriya titrait: «Les Egyptiens font le choix de l'avenir», tandis que le journal indépendant Al-Masry Al-Youm assurait que «le peuple renouvelle la révolution dans les urnes». La nouvelle Loi fondamentale a été rédigée par une commission nommée par le gouvernement intérimaire que le général Sissi avait mis en place dès le 3 juillet, après avoir annoncé lui-même la destitution et l'arrestation de M.Morsi, premier président civil et le seul à avoir été élu démocratiquement en Egypte. Depuis, fort du soutien de l'opinion publique, le pouvoir réprime implacablement les partisans de M.Morsi, en particulier les Frères musulmans. Plus d'un millier de manifestants ont été tués ces six derniers mois et les pro-Morsi emprisonnés par milliers. Parallèlement, les attentats se sont multipliés. Ils sont revendiqués par des mouvements jihadistes disant s'inspirer d'Al Qaîda, mais le gouvernement, pointant du doigt les Frères musulmans, a décrété la confrérie «organisation terroriste». Pour assurer la sécurité du scrutin qui s'achevait hier soir, le gouvernement a annoncé le déploiement de 160.000 soldats et 200.000 policiers, certaines organisations de défense des droits de l'Homme dénonçant un climat de peur et de répression alors que les portraits du général Sissi ornent les rues et presque chaque boutique au Caire. «On a fait confiance aux Frères musulmans et accepté leur Constitution, leur gouvernement et leur Parlement (...) mais ils nous ont trompés. Maintenant, nous votons pour cette Constitution pour sortir de la crise», a déclaré une électrice du Caire. En annonçant la destitution de M. Morsi, le chef de l'armée avait donné mandat au gouvernement d'organiser en 2014 des élections législatives et présidentielle. Cette dernière devrait intervenir dans les six mois. Pour les experts, le pouvoir voit dans ce référendum un premier moyen d'obtenir une caution par les urnes pour ce que ses détracteurs présentent comme un «coup d'Etat». «Ils ont besoin d'un vote populaire de confiance clair, qui permettrait au général Sissi de se présenter à la présidentielle s'il le décidait», estime Andrew Hammond, du European Council on Foreign Relations. «Travaillez dur! Nous avons besoin de ce référendum pour sécuriser le pays!», a lancé mardi à ses soldats le général Sissi en visitant un bureau de vote au Caire. Le projet de Constitution a été débarrassé de clauses ouvrant la voie à une islamisation de la loi, qui avaient provoqué une levée de boucliers sous la présidence Morsi, mais ne modifie que très marginalement les pouvoirs institutionnels et renforce le poids de l'armée dans la vie politique.