Un des terroristes les plus redoutés par la population de Jijel, et le plus recherché par les services de sécurité, a déposé les armes, a-t-on appris, hier, par des sources sécuritaires. Selon nos sources, Fanit a décidé de se rendre pour la simple raison qu'il ne fait pas l'objet d'une condamnation par contumace à une lourde peine de prison. Le repenti a déclaré aux éléments des services de sécurité auxquels il s'est rendu, qu'il a tenté de convaincre son jeune cousin âgé de 20 ans de l'accompagner. Mais ce dernier ne l'a pas suivi, sans toutefois le dénoncer. Profitant d'un déplacement de son groupe, Katibet El-Mouahidoune, Fanit s'est rendu aux autorités militaires avec son arme. N'ayant pas porté atteinte aux gens de son douar Boukhdech, il a pu regagner le domicile familial. Le terroriste repenti a fourni de précieux renseignements concernant sept individus de la région qui n'ont pas encore déposé les armes. Parmi ces éléments, il a cité le nom de Lemhoum, un autre dangeureux terroriste activement recherché par les services de sécurité. Au plan de l'organisation des maquis, Fanit a révélé qu' «il n'y avait aucun lien organique entre Katibet El-Mouahidoune et les émirs du GIA, Zitouni et Zouabri» de triste mémoire, mais qu'ils ont appliqué leurs «fataui» après la reddition de l'AIS. Il a, en outre, révélé l'emplacement de toutes les caches existant entre Texenna au sud-ouest de Jijel et Boukhdech au sud-est. Quant à Salah Zelbah alias El Balafri, Famit confirme qu' «il n'est plus entouré que de quatre individus dont son égorgeur». Autre révélation, le terroriste repenti déclare qu'El-Balafri est organiquement lié à la direction du GIA et a connu les émirs nationaux les plus sanguinaires dont Gousmi, qui s'était proclamé Khalifa Al-Mouaminin. Les précieux renseignements donnés par Fanit aux services de sécurité concernent également le sinistre Benyoucef alias Cheikh Ahmed abattu en 1994 à Settara wilaya de Jijel. Fanit a même donné les noms des assassins du garde forestier, B. Abdel Hamid, massacré à la «tronçonneuse» par les éléments d'El-Balafri qui se trouvaient à Ouled Boufaha. Famit affirme que Tayeb Soufi, âgé de 63 ans, vivant en famille au maquis, «a l'intention de déposer les armes, mais craindrait la réaction de Zelbah et Lamhoum», déterminés «à ne pas se rendre quoi qu'il advienne», révèle le repenti. La mort lente des maquis terroristes Il a également longuement évoqué la situation des groupes armés, révélant : «Tout a changé dans nos relations avec les populations civiles. Elles ne manifestent plus aucune sympathie pour nous et nous refusent même l'eau». Dans ses «confidences», Fanit reconnaît le rôle majeur joué par les différents corps de sécurité. «La plupart des douars sont dotés de GLD, de gardes communaux et en certains lieux, il y a des cantonnements de militaires. La vie est devenue, pour nous, infernale», raconte le repenti qui avoue que «plus de 30 éléments armés ont péri suite à des maladies entre 1999 et 2003», affirme-t-il. Et d'ajouter : «Il nous arrivait de ne pas manger pendant plusieurs jours. On se contentait souvent d'herbes ou de fruits sauvages durant trois jours ou plus d'une semaine». Il reconnaît que leur seul salut pendant les périodes de grand froid tient dans «des attaques contre des l'huileries, dans le seul but de tenir le coup contre le gel et la faim». Son témoignage de la vie dans les maquis l'amène à dire qu' «aucun lieu n'est plus considéré comme sûr. Le moral de nos hommes est très bas, au point où nous ne savons plus pourquoi on se bat. Beaucoup de terroristes sont au bord du suicide». A ce propos, il affirme que lui-même a été témoin de deux suicides en 2002. Il s'agissait de «deux jeunes recrues venues de Bougara et d'Oum El-Bouaghi. Ils se sont donnés la mort à quelques semaines d'intervalle», témoigne-t-il. Cette situation, affirme Fanit «touche même les émirs et leurs proches qui souffrent d'une misère morale et physique intolérable. Le temps où ils étaient accueillis en «héros» par les populations des douars, soit par peur soit par conviction est bel et bien terminé». D'ailleurs, «le jusqu'au-boutisme de certains éléments n'est plus convaincant au sein même des troupes», soutient Fanit, qui reconnaît que les mouvements des groupes terroristes «sont systématiquement signalés aux services de sécurité». Un état de fait qui a pris «une ampleur très importante après la reddition des éléments de l'AIS» relève-t-il tout en soutenant que le geste de l'AIS «a été un coup fatal pour nous» avoue l'émir du GIA. «C'était l'enfer» Pour cet émir, dont l'engagement dans le GIA a été total, la guerre que cette organisation a menée contre les Algériens est quasi finie. Et c'est en homme résigné qu'il lance à l'adresse des officiers qui l'ont interrogé : «Nous avons perdu la guerre». Nos sources relèvent que l'interrogatoire, en question, s'est transformé pendant un long moment en un monologue où le repenti décrivait, le regard perdu, les conditions extrêmement difficiles dans lesquelles lui et ses sept hommes survivaient dans les maquis jijeliens. L'homme parlait comme s'il sortait d'un enfer. Il reconnaît que lui, son groupe et les autres Katibates disséminées dans l'est du pays n'avaient rien d'une armée. Tout juste des individus affamés et sans aucun espoir dans l'avenir. Fanit avoue qu'il a cherché au plus profond de lui-même pour trouver un brin d'espoir et décider de quitter l'enfer du maquis. Il déclare que beaucoup de terroristes ne se rendent pas, non pas par engagement idéologique, mais par lassitude de la vie. «Toutes ces années de maquis ont ôté toute humanité qu'il y avait en nous», affirme-t-il. En fait, les Fanit-Zelbah-Soufi et autres ne sont que les soldats de «plomb», tout juste bons à jouer le rôle d'égorgeurs, servant les intérêts d'officines établies en Algérie et à l'étranger. Fanit, comme d'autres repentis, semble avoir compris cela. C'est en tout cas, ce qui transparaît de ses déclarations aux services de sécurité. La reddition de ce chef du GIA et le témoignage qu'il a fait renseigne sur l'efficacité du dispositif anti-terroriste mis en place par l'Algérie, mais donne également un aperçu assez clair de l'engagement des citoyens du pays profond dans cette lutte de tous les jours. Nous sommes loin des actes indescriptibles qui ont eu lieu dans les maquis, entre 1994-95. Enfin, Fanit dit avoir tellement de remords qu'il compte partir s'installer ailleurs où il pourra refaire sa vie, affirment nos sources.