Le Sahel connaît de nouvelles convulsions. Venant de Bangui où il a effectué une visite surprise des troupes françaises en Centrafrique, Jean-Yves Le Drian est à Alger depuis hier. Il a été accueilli par Ahmed Gaïd Salah, notre vice-ministre de la Défense. S'il sera question du Mali, d'autres nouveaux départs de feu ne seront certainement pas occultés. Comme l'aggravation de la situation en Libye et le Sud-Soudan où un groupe armé a attaqué, vendredi dernier, un champ pétrolier enlevant trois employés dont un algérien. Il sera aussi question de la Centrafrique toujours en proie à la violence depuis une année. Comme il sera également question du Nigéria qui fait face à des terroristes qui portent le logo «Boko Haram» et cache mal sa filiation avec la nébuleuse Al Qaîda. Vu sur la carte, tous ces points chauds semblent être entretenus à partir d'un même «centre de commandement». Une même stratégie qui relève d'une volonté de propager l'incendie sur toute l'étendue de la bande sahélo-sahélienne tout en essayant d'affaiblir les forces d'intervention militaires françaises, européennes, africaines et de l'ONU qui luttent contre le terrorisme dans la région. Du Sud-Soudan au Nigéria en «sautant» le Cameroun, c'est une autre bande, traversant l'Afrique d'Est en Ouest, qui subit des troubles. Un peu comme pour prendre à revers les forces de paix au Sahel. Ceci pour montrer l'étendue du champ de bataille sur lequel ont à se pencher les spécialistes militaires algériens et français. Plus près de nous, à nos frontières, la situation au Mali se serait bien passée des derniers événements survenus samedi dernier à Kidal. Alors que le processus du dialogue inclusif inter-malien était bien engagé, le gouvernement malien a cru bon de programmer une visite du Premier ministre accompagné de plusieurs de ses ministres dans cette ville du nord du pays qui a été le point de départ de la déstabilisation de tout le Mali. Il faut se souvenir que les militaires maliens avec à leur tête le capitaine Amadou Haya Sanogo avaient évacué la ville pour se diriger vers la capitale et opérer le coup d'Etat qui a renversé le président Amadou Toumani Touré. Ce qui avait laissé la voie libre aux terroristes, notamment ceux d'Aqmi pour s'y installer et se préparer à prendre la capitale Bamako. Ce qui a failli réussir n'était la décision du président français, François Hollande, d'intervenir militairement pour sauver le Mali. L'opération «Serval» qui a pleinement réussi, avait permis, en novembre de l'année dernière, l'élection du président Ibrahim Boubakar Keïta et l'arrestation du capitaine Sanogo devenu général entre-temps. Une fois l'Etat remis sur pied, celui-ci se devait de réunifier le pays par le dialogue avec les populations du Nord qui avaient été laissées seules face à plusieurs bandes terroristes dont celle de Belmokhtar. Au lieu de jouer l'apaisement en attendant que les conditions du dialogue soient réunies avec la participation très active de notre diplomatie, la visite du Premier ministre malien, samedi dernier, a été ressentie comme une provocation par les Touareg du Nord. Les observateurs ont relevé l'inopportunité d'une telle visite. Comme cet éditorialiste du journal Le Républicain Malien qui va jusqu'à titrer son papier «IBK voulait sa guerre, il l'a eue». Pour lui également «la guerre (à Kidal) a été occasionnée par une visite (du Premier ministre) qui ne s'imposait pas». Déjà qu'il avait fallu de fortes pressions des Occidentaux sur IBK pour accélérer le processus de réconciliation, voilà surgir un nouveau frein qui n'est pas pour rapprocher le retour à la paix au Mali. Ce n'est là que la partie visible du lourd dossier qu'aura à discuter Le Drian avec les autorités algériennes. En y ajoutant tous les autres dossiers évoqués plus haut, on a une idée de l'ampleur de «l'incendie»!