En dépit d'une croissance économique de 6,8% et la consolidation des équilibres macroéconomiques, le Cnes tire la sonnette d'alarme. La 24e session plénière du Conseil national économique et social (Cnes) débutera aujourd'hui au Club des Pins à Alger. Cette session de deux jours sera consacrée, notamment à l'examen et à l'adoption de divers projets de rapports. Les documents qui seront présentés et débattus au cours de cette session porteront sur la conjoncture économique et sociale de l'année 2003, l'économie informel le (fiction et réalité), les données pour la réforme du système d'information économique et sociale, la participation dans le débat national, et la question du foncier, obstacle au développement économique et social en Algérie. Pour l'institution présidée par Mohamed-Salah Mentouri, «ces performances économiques masquent, cependant, la persistance des problèmes sociaux à l'origine des revendications qui interpellent les pouvoirs politiques en matière de répartition des revenus, d'amélioration des conditions de travail, d'équilibre régional et de gouvernance». D'ailleurs, «la situation sociale reste empreinte de tensions et particulièrement dans le monde du travail caractérisé par les grèves dans le secteur de l'éducation et la santé». Cet état de fait est dû selon le rapport du Cnes sur la conjoncture économique et sociale du 2e semestre 2003 à l'écart entre les niveaux de rémunération pratiqués par le secteur privé et étatique. «Le développement du secteur privé dans le domaine de la santé et de l'éducation a donné naissance à d'importants écarts (...) contribuant de ce fait à durcir les revendications des travailleurs de la santé publique et de l'éducation nationale», affirme le Cnes. Pour les experts du Cnes, à la question des salaires, en débat depuis plus d'une année, il faut aussi greffer les questions relatives au pluralisme syndical, qui ont grandement contribué au dépérissement de la situation. Pourtant diverses actions en faveur d'importantes revalorisations des salaires ont été engagées en 2003 «mais leur mise en oeuvre n'a pas encore trouvé toute sa traduction dans l'amélioration des prestations fournies» ce qui fait que les «tensions persistent». Sur un autre plan le Cnes souligne que «bon nombre d'entreprises du secteur productif n'arrivent pas à mettre en application les mesures de revalorisation du Snmg décidées à la fin du semestre et applicables à partir du 1e janvier». En ce qui concerne le secteur industriel producteur, le Cnes note que «la situation reste préoccupante au sens où ce dernier, élément essentiel à une croissance durable, continue d'évoluer d'une part dans un contexte marqué par le paradoxe entre disponibilités de ressources financières couplées à l'existence d'un marché porteur et solvable et d'autre part l'absence de plus en plus préjudiciable d'une politique cohérente et coordonnée». Pour le Cnes «l'amélioration des indicateurs économiques et sociaux n'est toutefois pas parvenue à lever les incertitudes sur les perspectives à long terme, déterminées par les performances des entreprises et les stratégies qui peuvent permettre une insertion active dans la mondialisation». Une situation qui tarabuste l'esprit des membres du Cnes. «Les ressources réelles des résultats obtenus résultent-elles d'une extension des capacités et du potentiel de production ou d'un rattrapage par rapport aux capacités existantes?» s'interrogent-ils. En outre, «les contraintes afférentes à une reprise soutenue de la croissance restent complexes en référence aux données conjoncturelles et structurelles. La nature extensive de cette croissance a, en effet, peu bénéficié à l'évolution des structures économiques». Comment prolonger et perpétuer cette croissance et enclencher le processus de croissance autoentretenue et endogène est toute la problématique posée par le Cnes, «les questions auxquelles devra répondre l'évolution à imprimer aux structures économiques, à la modernisation des systèmes de gestion et au système de gouvernance». De ce fait, la situation sociale de l'année 2003 reste caractérisée « par des paradoxes liés à une amélioration globale des indicateurs sociaux et la persistance des tensions sous diverses formes» affirme l'institution consultative. Des paradoxes qui «montrent l'écart entre les efforts soutenus de l'Etat sur le plan financier, dans le domaine de l'emploi, du logement, des revenus de la santé et leurs retombées qui ne répondent toujours pas aux questions relatives à leur destination sur le plan catégoriel et régional».