Le professeur Mentouri, dans son allocution d'ouverture, appelle à la mise en œuvre d'un autre plan de relance. La 22e session plénière du Conseil national économique et social, qui s'est ouverte hier au Palais des nations (Club-des-Pins) à Alger a fait le plein. Tout le staff du “nouveau” gouvernement était présent ainsi que le président de l'Assemblée populaire nationale (APN), M. Karim Younès. Le professeur Mentouri, premier responsable du CNES, dans son allocution d'ouverture, appelle à la mise en œuvre d'un autre plan de relance “de plus grande envergure, fondé sur la sauvegarde et la redynamisation de l'appareil de production et surtout une mobilisation générale pour l'emploi et l'intensification de la lutte contre le chômage”. C'est que, pour lui, la croissance enregistrée aurait pu être plus forte si l'impulsion budgétaire massive n'était venue s'échouer sur les faibles capacités de régénérescence des structures économiques, en raison de la déliquescence prolongée de l'appareil productif. En effet, la conjoncture économique fait apparaître, pour l'année 2002, une évolution positive : amélioration de la croissance, consolidation des agrégats financiers et accroissement du niveau de l'épargne sur fond de stabilisation des prix. En termes de résultats, le produit intérieur brut enregistre un taux de croissance de 4,1% en 2002. Hors hydrocarbures et hors agriculture, le taux passe à 5,2%. Cette croissance peut apparaître appréciable au regard des cycles de croissance lente, molle et instable des années précédentes. Mais elle reste, néanmoins, insuffisante au regard des besoins économiques et sociaux pendant longtemps comprimés et des possibilités offertes par les excédents monétaires et financiers disponibles. Le CNES fait remarquer, à juste titre, que la croissance de la sphère réelle est, principalement, tirée par le BTPH et les services (commerce et transport). Les secteurs traditionnellement porteurs de croissance, l'industrie et l'agriculture, ne sont pas concernés. Le Conseil national économique et social souligne dans son rapport “le déclin persistant du secteur public de l'industrie avec des séquences de reprise de plus en plus rares”. Les contre-performances du secteur industriel public, note le CNES, relèvent d'une “symptomatique générale caractérisée par l'inefficience d'une grande partie des entreprises, l'obsolescence des équipements, la masse importante des frais de personnel et les lourdeurs des systèmes de gestion”. Les petites et moyennes entreprises butent toujours sur des problèmes récurrents liés au foncier industriel, à l'aménagement et l'équipement des zones industrielles, à l'absence d'appui des banques aux entreprises et à l'insuffisance des instruments de soutien. Le CNES parle de déshérence des entreprises publiques. Lesquelles poursuivent leur lente dérive sans susciter “aucune réaction concrète de la part des pouvoirs publics”. Beaucoup de conseillers du CNES regrettent le retard préjudiciable de la mise en œuvre des “grandes réformes” annoncées, notamment celles concernant le système financier et bancaire. Le secrétaire général de l'Association des banques et des établissements financiers (ABEF) estime pour sa part qu'il faudrait un véritable “plan Marshall pour l'entreprise algérienne”. “Pour les cinq années à venir, l'entreprise doit être au cœur des politiques économiques”, nous dira-t-il en marge de la session du CNES. Pour lui, il faut agir sur l'environnement de l'entreprise, améliorer l'outil fiscal et rénover les relations entre les banques et les entreprises. Par ailleurs, les autorités de régulation (Conseil de la concurrence, Autorité monétaire…) doivent, de ce point de vue, jouer pleinement leur rôle. L'ABEF milite ainsi pour la mise en place de mécanismes de politique sociale transparents pour éviter “les poches de rente”. Il rejoint l'avis du CNES sur la nécessité d'impliquer tous les acteurs (gouvernement, SGP, entreprises, institutions) dans la définition et la mise en œuvre d'un plan d'action aux fins de statuer “définitivement” sur le sort des entreprises soumises à des contraintes dont la persistance risque à terme de déstabiliser des pans entiers de l'industrie avec des conséquences inévitables sur les équilibres sociaux et sur l'environnement économique et financier. Le CNES évoque la corruption qui “s'exerce au grand jour” et qui atteint aussi bien les services publics que les opérateurs privés et qui est encouragée par la prolifération des circuits informels. Certains des conseillers du CNES ne sont pas convaincus de l'explication avancée concernant l'évolution de l'encours de la dette. Ce dernier est plus élevé que prévu, d'environ 500 millions de dollars US, atteignant 23,1 milliards de dollars US à fin décembre 2002 contre 22,5 milliards de dollars US à fin décembre 2001. Ce montant s'explique, d'une part, par l'évolution du taux croisé dollar US/euro, et, d'autre part, par le passage de 0 (zéro) à 847 millions de dollars US des crédits financiers crédit-bail. M. R. Programme du nouveau gouvernement Bientôt devant l'APN Le nouveau Chef du gouvernement, Ahmed Ouyahia, n'a pas voulu prendre la parole devant le Conseil national économique et social (Cnes). “Par respect à l'institution, je m'adresserais en premier lieu à l'Assemblée populaire nationale”, a-t-il répondu à la presse. Ahmed Ouyahia juge, néanmoins, “utile” le rôle du Cnes. Il annonce que le programme du gouvernement sera “présenté bientôt devant le gouvernement”. Karim Younès, président de l'APN “Le Cnes est une structure de référence” Le président de l'Assemblée populaire nationale, dans son intervention, la première du genre selon Mentouri, a longuement félicité le Cnes pour son travail d'analyse. “Le Cnes est un espace de franchise, de liberté d'analyse, de réflexion où toutes les interrogations de la société peuvent être soulevées”, souligne Karim Younès. Pour lui, cet espace là mérite le respect. Le Conseil national économique et social est devenu, aux yeux du président de l'APN, une structure de référence en matière d'analyse et d'évaluation des politiques socioéconomiques. M. R.