Au lendemain de sa conférence réussie, l'ex-chef de gouvernement a déposé une gerbe de fleurs sur la stèle de Saïd Mekbel, à la placette du même nom pour la Liberté de la presse. Histoire, mouvement national, armée, consensus, réformes, crise politique et institutionnelle, les menaces qui pèsent sur le pays, tels étaient les grands axes développés par Mouloud Hamrouche, le père des réformes en Algérie, vendredi soir à l'hôtel Royal, dans la ville de Yemma Gouraya. Sur invitation de l'association des journalistes et correspondants de la wilaya de Béjaïa, l'ex-chef de gouvernement, un homme dont le parcours fait honneur au processus balbutiant de démocratisation de la vie économique, sociale et politique dans notre pays, a fait salle comble. Il a été en l'espace d'une soirée ramadanesque l'homme du consensus politique le mieux indiqué en regroupant beaucoup de monde, représentants de ces générations en manque de confiance et de vision, les différents partis d'opposition, mais aussi proches du pouvoir et toute la composante de la société civile. D'emblée, il déclara: «L'Algérie est aujourd'hui en crise et cela impose que certains prennent l'initiative et assument des responsabilités. Le système politique algérien aujourd'hui est bâti sur la coercition, le clanisme, la corruption et la neutralisation de l'administration et de la société.» Il a dressé un tableau peu reluisant de la situation politique que traverse l'Algérie en cette période.«Les facteurs de blocage sont toujours là, avec ou sans renouvellement de mandat. Ce sont des impasses qui recèlent de graves menaces, exacerbent les facteurs de division, paralysent les institutions et soumettent les hommes à des pressions impossibles» a-t-il martelé tout au long de sa conférence. Sur l'armée, Mouloud Hamrouche a tenu à préciser sa position en déclarant «je ne suis pas venu pour faire les éloges de l'armée, mais c'est pour insister sur le caractère national de cette institution qui est la seule à même d'accompagner le consensus national une fois dégagé. Nos vivons une crise générale, les grands services publics ont disparu, l'Etat de droit et l'Etat démocratique pour lesquels nous avons lutté et nous avons payé la facture très chère ne sont pas là, La cohésion sociale s'est érodée, le pluralisme politique s'est disloqué et le syndicat s'est effrité...l'armée doit servir de clé de voûte pour l'Etat.» Poussé à chaque fois dans les débats pour donner sa vision sur les hommes qui gouvernent actuellement le pays, tacticien, homme politique averti, M.Hamrouche répliquera en insistant sur l'urgence à se concerter. «Je ne suis pas pour le procès des gens et je m'interdis de manquer de respect à quiconque, ce n'est pas l'éducation de ma génération», expliquera-t-il à ceux qui attendaient un procès d'intention, mais sans toutefois les laisser sur leur faim «le gouvernement algérien a perdu sa capacité d'agir. Il ne suffit pas de faire des constats mais plutôt d'agir vite. L'école, la santé, la justice... ce sont des secteurs gravement malades. Un seul homme ne pourra jamais redresser la barre. C'est l'affaire des experts avec une volonté politique réelle, sinon on tournera toujours autour pour revenir au même point de départ» déclarera-t-il avant d'ajouter: «C'est notre échec à tous, échec de l'opposition, échec du pouvoir échec du politique. Ça fait un quart de siècle que le pouvoir est bloqué. Nous traversons une crise sans précédent. Elle est à la fois coûteuse, ruineuse...nous sommes dans l'impasse... le pays est candidat à l'implosion» a-t-il dit avec beaucoup d'amertume avant de revenir une fois de plus au rôle que doit jouer l'armée «aujourd'hui, il n'est pas dans l'intérêt de l'armée, de rester figée. Notre armée fait le consensus national, elle appartient au peuple. L'action de l'armée doit être salutaire avec une assurance concertante.» Par ailleurs, pour clôturer sa sortie dans l'ex-capitale des Hamadites, Hamrouche étalera son idée sur la sortie de crise «L'idée, c'est d'élaborer un consensus national nouveau fondé sur notre identité, notre sécurité et notre projet national d'instaurer l'Etat démocratique fort qui garantisse tous les droits et l'égalité entre tous les Algériens passant d'un système totalement autoritaire vers un système totalement ouvert et démocratique....il faut que le nouveau consensus soit défini avant tout sur la base de la réhabilitation de l'Etat et de ses institutions qui sont livrées aux réseaux mafieux...»