L'Algérie est en train de compromettre ses chances d'accoster au port des pays respectueux des libertés. La Ligue algérienne pour la défense des droits de l'homme (Laddh) attire l'attention des ONG et des autorités sur les conditions déplorables que vivent huit délégués du mouvement citoyen du Sud, incarcérés depuis le 5 juin 2004. Dans un communiqué signé par Me Ali Yahia Abdenour, président de la Laddh, il est fait état notamment du «traitement humiliant» dont font l'objet six parmi les huit détenus, et qui observent une grève de la faim depuis le 26 juin. «Leur état de santé est critique et nécessite une réaction urgente de la part des défenseurs des droits de l'homme et des autorités responsables de leur arrestation», dit le communiqué qui souligne que «leur seul tort est d'avoir lancé des actions citoyennes qui ne sont ni des crimes ni des délits». Les autorités judiciaires de Ouargla reprochent aux six membres du mouvement citoyen d'avoir procédé à la récolte de signatures dans le cadre de comités de quartiers pour demander aux habitants de ne pas payer leurs factures d'électricité, et aux militants du bureau de la Laddh de Labiod Sid Cheikh (wilaya d'El Bayadh) d'avoir assisté aux réunions des membres du mouvement citoyen du Sud. Par ailleurs, trois autres citoyens ont été arrêtés, dimanche dernier, lors d'un sit-in devant le palais de justice de Ouargla pour protester contre l'arrestation abusive des huit détenus et demander leur libération. Selon Me Ahmine Noureddine, qui est avocat (Laghouat) et membre de la Laddh, «il a été constaté sur les lieux que les conditions de détention de ces citoyens sont pour le moins déplorables. Les détenus ont été placés en isolement dans des cellules à peine aérées en période de chaleur caniculaire, en particulier dans le sud du pays. Une situation d'autant plus pénible et dangereuse pour leur santé qu'ils sont en grève de la faim depuis douze jours». Nous assistons, depuis un certain temps, à un net recul des libertés individuelles et collectives, alors que l'embellie économique est favorable à une accalmie sociale et politique. Les atteintes aux droits de l'homme, que les autorités préfèrent qualifier de «rigueur affichée pour restaurer l'autorité de l'Etat», sont venues entacher inutilement une Algérie désireuse d'accéder au rang de partenaire à part entière de l'OMC et de l'UE. Inutilement et lamentablement, parce que, du côté nord de la Méditerranée, on recommence à lorgner l'Algérie comme on le ferait avec un pays suspect.