Dilma Rousseff, réélue dimanche présidente du Brésil avec un score étriqué, aborde un second mandat rempli de défis, selon les analystes, qui citent l'économie, la corruption et la division des Brésiliens. «L'économie ne va pas bien. Le Parlement est fragmenté en 28 partis et la présidente y repose sur une majorité volatile. Il existe de graves dénonciations de corruption au sein du géant pétrolier Petrobras. Enfin le pays est divisé après une campagne électorale très polarisée», énumère le politologue indépendant André César. Le Brésil de 2014 n'est pas le même qu'il y a quatre ans, quand Mme Rousseff avait hérité de son parrain politique, Luiz Inacio Lula da Silva, d'une croissance économique de 7,5%. La population était euphorique avec l'amélioration du niveau de vie après huit ans de gouvernement Lula qui avait sorti 29 millions de Brésiliens de la misère et augmenté comme jamais le crédit et la consommation. Depuis, l'économie brésilienne a fortement ralenti jusqu'à entrer en récession au premier semestre. L'inflation est en surchauffe, l'industrie perd du terrain et les comptes publics se dégradent. «Son premier défi sera d'annoncer ce qu'elle fera avec la politique économique et les comptes publics. La présidente doit essayer de récupérer la confiance perdue des secteurs économiques», estime José Francisco Lima Gonçalves, économiste chef de la banque d'investissements Fator. Même si le pays continue d'attirer d'importants investissements étrangers, «la confiance des entrepreneurs est à son niveau le plus bas des cinq dernières années et les investisseurs sont mécontents. Il est urgent que la présidente tende la main à ces secteurs», affirme Richard Lapper, principal analyste de LatAm Confidential. Aecio Neves, qui promettait un tournant libéral de l'économie, était le candidat favori des milieux d'affaires et des marchés. La chef de l'Etat a déjà annoncé depuis des semaines qu'elle changera son ministre de l'Economie, Guido Mantega, et l'expectative est grande sur le nom de son successeur. Cette économiste de 66 ans a jusqu'à présent défendu mordicus sa politique économique en attribuant les nuages actuels au seul contexte international. Elle se prévaut d'avoir continué à augmenter les bas salaires et d'avoir abaissé le chômage à son plus bas niveau historique (4,9%). Mais bon nombre estiment qu'avec une croissance pratiquement nulle cette année, le Brésil perdra des postes de travail en 2015. «La sécurité de l'emploi a été l'un des principaux piliers du gouvernement actuel. 70% des Brésiliens se sentent sûrs dans leur emploi», affirme Mauro Paulino, directeur de l'institut de sondage Datafolha. Les grandes manifestations de rues de 2013 ont montré que les Brésiliens attendaient d'urgence l'amélioration des services publics de santé, d'éducation et de transports. «Mais la présidente devra le faire avec des restrictions budgétaires en raison de la situation économique», relève Vinicius Botelho, de la Fondation Getulio Vargas (FGV). Cette campagne électorale, émaillée d'attaques personnelles, a scindé le pays en deux blocs, selon les appartenances sociales: les plus pauvres en faveur de Dilma Rousseff, les plus aisés pour le candidat «du changement». «La grande tâche de Dilma (Rousseff) sera de gouverner pour les 48% qui ont voté contre elle», souligne Daniel Barcelos Vargas de la FGV. Tirant les leçons de ce succès en demi-teinte, dans son premier discours, la présidente, vêtue de blanc, a appelé «à la paix, l'union et au dialogue».