Un double attentat a fait des dizaines de morts à Maiduguri dans le nord-est du Nigeria, cinq jours après l'attaque de la mosquée de Kano 120 tués (Archives) Deux bombes ont explosé sur un marché de Maiduguri, ville carrefour de l'Etat de Borno et fief historique des insurgés, déjà prise pour cible par deux femmes kamikazes la semaine dernière. Les violences ne connaissent aucun répit dans le nord-est du Nigeria: au moment où des membres présumés du groupe islamiste Boko Haram prenaient d'assaut Damaturu, une capitale provinciale, un marché de la grande ville de Maiduguri a été visé hier par un double attentat. «Une femme âgée d'une quarantaine d'années s'est approchée des stands de marchands de poulets (...) mais les miliciens postés non loin ont voulu vérifier ses bagages», a déclaré Ahmad Sanusi, un témoin. «La femme a refusé (...) des gens se sont amassés sur les lieux et c'est là qu'elle a déclenché un explosif», a-t-il ajouté. Une seconde bombe a explosé ensuite, d'après un autre témoin. A Damaturu, capitale de l'Etat voisin de Yobe, les détonations ont réveillé tout un quartier à l'aube, selon Umar Sada, un habitant. «Les hommes armés sont venus en grand nombre. Ils ont incendié les locaux de la police et se dirigent maintenant vers les quartiers résidentiels», a déclaré ce témoin en début de matinée. Un autre habitant, un responsable gouvernemental ayant requis l'anonymat, a raconté que «c'est le chaos dans toute la ville». «Nous avons quitté nos maisons. Nous sommes maintenant dans la brousse. Nous ne savons pas ce qui va se passer», a ajouté M.Sada. L'armée, qui a une base importante à Damaturu, ne s'est pas encore exprimée sur cette attaque. Mais des habitants ont dit avoir vu un avion militaire survoler la ville. Le commissaire de police de l'Etat de Yobe, Marcus Danladi, a seulement déclaré que les policiers faisaient face à «une situation grave». ««Les combats continuent à faire rage», rapportait en fin de matinée un employé de l'école polytechnique de l'Etat de Yobe. «Des grenades sont tombées dans l'enceinte de l'école», a-t-il ajouté. Selon d'autres habitants, des combats ont lieu à proximité d'une prison où sont détenus des membres présumés de Boko Haram, attenante à la résidence du gouverneur de l'Etat. Yobe est l'un des trois Etats du Nord-est les plus affectés par l'insurrection, qui avaient été placés sous état d'urgence en mai 2013. Le président nigérian Goodluck Jonathan avait réclamé une prolongation de l'état d'urgence dans cette région, mais il n'a pas réussi à faire voter ces mesures spéciales, à l'efficacité maintes fois remise en cause, par le Parlement avant leur expiration le 20 novembre. Boko Haram avait revendiqué une opération sur Damaturu le 24 octobre, au cours de laquelle quatre bâtiments de la police avaient été attaqués à l'aide d'armes à feu et d'explosifs. Trente personnes, apparemment tous des soldats, avaient été tuées. Le président Jonathan, candidat à sa succession à l'élection de février 2015, est très critiqué pour n'avoir pas su mettre un terme aux violences dans cette région, où les attaques de Boko Haram et leur répression par l'armée ont fait plus de 13.000 morts depuis 2009. Le président a de nouveau été mis en cause ce week-end après l'attaque sanglante de Kano, la principale ville du Nord. Un double attentat suicide, suivi d'une fusillade, a tué au moins 120 personnes à la grande mosquée de Kano vendredi, au moment de la prière hebdomadaire. La principale organisation de musulmans du Nigeria, JNI, a dénoncé dimanche l'incapacité du gouvernement à protéger la population et appelé les fidèles à «prendre toutes les mesures défensives» nécessaires. Ces derniers mois, les attaques de Boko Haram sont devenues quasi-quotidiennes et le groupe s'est emparé d'une vingtaine de localités du Nord-est, proclamant un «califat» dans les zones sous son contrôle. Une nouvelle attaque a été perpétrée samedi soir à Shani, dans l'Etat de Borno, où les terroristes ont attaqué un commissariat de police et détruit toutes les églises et de nombreux commerces, selon des témoins. Mais il n'y a pas eu de victime, les civils ayant pris la fuite pour la plupart.