Aujourd'hui, la nécessité d'assainir le secteur est plus que jamais urgente. Plusieurs stations de taxis clandestins existent en plusieurs endroits dans la capitale. Les «clandestins» défient même l'Etat en piétinant les lois de la République. Que fait l'Etat? Nous sommes au coeur d'Alger; place Mauritania, le long de la rue menant de la gare ferroviaire Agha jusqu'à l'ex-siège du ministère des Finances, des dizaines de «taxi fraudeurs» occupent les lieux, sept jours sur sept, 24 heures sur 24. Leur présence dans cet endroit précis dévoile clairement l'affligeante indifférence des autorités, voire même leur encouragement. Car, dans cet endroit l'on retrouve le siège de la direction de la sûreté de la wilaya d'Alger. Etonnante est cette image pour tous ceux que nous avons interrogés. «Savez-vous qu'un nombre important de ces clandestins sont des flics?», nous retourne comme question Mourad, un résident dans le même quartier. Mourad qui les connaît pour la plupart atteste qu'«après leur travail, bon nombre de flics exercent comme clandestins». En effet, après avoir approché et discuté avec bon nombre d'entre eux, nous avons confirmé ces dires. Un des «fraudeurs», nous explique que leur présence arrange plus qu'elle ne dérange, car selon lui, «c'est le manque de transport en commun de jour comme de nuit en plus que le citoyen trouve plus abordable coté prix»... «Les différentes explications n'engagent que la personne en question puisque les lois de la République sont claires sauf qu'elles ne sont pas respectées», réagit un taximan interrogé sur place. Lui, c'est Aâmi Ali, la soixantaine, qui ne mâche pas ses mots: «Bien sûr, tant que vous travaillez devant la sûreté de wilaya et personne ne vient vous déranger, vous pouvez en abuser davantage. C'est dommage!», lâche Aâmi Ali. Il faut dire que ce genre de guéguerres entre «taximen» et «clandestin» sont très courantes. Nous avons quitté la «place Mauritania», à destination de la rue des Fusillés. Là encore, la scène est semblable. Tout le long de la station du tram, des dizaines de «fraudeurs» y stationnent. Pis encore, ils squattent même les espaces réservés pour les arrêts de bus et souvent en deuxième position. Le tout bien sûr sous le regard impassible des policiers présents sur place. Encore une autre image un peu plus haut, à Kouba et plus précisément devant le commissariat de police de Ben Omar. Des dizaines de personnes ayant garé leurs voitures pas loin, interpellent carrément les passants s'ils ne veulent pas d'une «course». Bien sûr, les usagers de certaines lignes acceptent de monter à bord car selon eux, ils souffrent du comportement des taxis qui «arrêtent le service à partir de 17h en les laissant en rade, désemparés». «C'est ce qui fait que ces clandestins sont disponibles à toute heure de la journée ou de la nuit», nous explique un usager. Pour un des usagers rencontré sur place «les taxis clandestins sont d'un grand secours pour nous, dans la mesure où ils comblent les défaillances du transport régulier». Une thèse que rejettent des chauffeurs de taxi qui, eux, parlent de complicité avec des réseaux «d'une mafia organisée, très puissante et difficile à combattre». D'ailleurs, un chauffeur de taxi lâche; «Ils ont tout à gagner, ils ne payent aucune charge, ni même l'assurance. Il leur suffit juste d'avoir une voiture et de commencer à travailler». Par contre «nous, les chauffeurs de taxis on paye leurs impôts, l'assurance, la location de licence, les charges quotidiennes...etc.», regrettent-ils. En effet, nous sommes face à une des situations les plus inquiétantes. D'un côté, nous assistons à la faillite pure et simple des professionnels et d'un autre, l'exposition des usagers à toute forme d'insécurité. Aujourd'hui, la nécessité d'assainir le secteur est plus que jamais urgente. D'ailleurs, «dans la capitale, on a l'impression parfois que tout le monde est taxi-clandestin», renchérit un jeune Algérois. Il faut savoir que «l'activité des taxis clandestins représente entre 10 et 15% du total du parc des voitures taxis», selon les experts qui soutiennent que c'est un phénomène qui ne cesse de croître. Le citoyen algérien souffre d'un dysfonctionnement dans le secteur des transports publics, et reste impuissant face à un pouvoir d'achat qui est en hausse persistante, une situation qui encourage malheureusement cette activité. Enfin, ce qui reste du moins intriguant est le fait que la plupart des «clandos» activent souvent devant les commissariats de police ou des brigades de la gendarmerie. Un petit tour dans la capitale et le constat est frappant: devant la sûreté de wilaya, le commissariat de Ben Omar à Kouba, devant la brigade de la gendarmerie de Aïn Naâdja, à l'intérieur des parkings automobiles de l'aéroport, à l'intérieur et devant le portail principal de la gare routière... etc. Nous sommes face à une anarchie généralisée et les autorités semblent s'y plaire. C'est l'image d'une capitale qui est froissée!