Les membres du «trio présidentiel» tiennent des propos diamétralement opposés. Depuis son installation à la veille de l'élection du 8 avril dernier, l'alliance présidentielle s'est confinée dans des déclarations de conjoncture, évitant d'engager des débats de fond sur des sujets d'actualité. Le FLN, le RND et le MSP, après avoir fait front en faveur de la candidature d'Abdelaziz Bouteflika, ne se rencontrent, aujourd'hui, que pour célébrer un anniversaire, remettre des présents ou assister à des meetings de soutien aux peuples irakien, sahraoui ou palestinien. Pourtant, lors de sa création, l'alliance présidentielle, brassage islamo-nationaliste, s'est voulue une force de proposition et de changement, face à une opposition qui commençait à donner des signes manifestes d'essoufflement. Une prétention qui est en passe d'être démentie, au vu des quelques divergences des trois formations politiques autour des thèmes de projet de société, à savoir la réforme du système éducatif et la révision du code de la famille. D'ailleurs, ce n'est pas la première fois que les membres du «trio présidentiel» tiennent des propos diamétralement opposés par rapport à ce qui les a unis, lors de l'élection présidentielle. Par exemple, la conception du MSP du règlement de la crise de Kabylie ne dépasse pas le cap de l'appel à la raison et au retour à la table du dialogue, sans pour autant s'exprimer ouvertement sur les points contenus dans la plate-forme d'El Kseur, en particulier l'officialisation de tamazight, une revendication contre laquelle ce parti islamiste n'a cessé d'afficher une opposition farouche. L'autre point et non des moindres à «diviser» les partis de l'alliance, c'est incontestablement la révision du code de la famille. Les dernières déclarations du président du MSP à propos de ce dossier ne trompe pas. Pour Soltani, certains amendements de l'avant-projet du code de la famille remis récemment par la commission Boutarene au ministre de la Justice, sont contraires aux préceptes islamiques. Le leader du MSP oublie par la même occasion que la loi interdit l'utilisation de la religion à des fins politiques, sachant que «l'islam, religion de l'Etat» est pris en charge dans le cadre de la Constitution, la seule façon de le préserver des surenchères partisanes. Une vision développée par le haut conseil islamique qui doit faire montre de recul par rapport à une réforme qui ne vise en réalité qu'à mettre un terme à l'asservissement de la femme, que la religion musulmane a pourtant bannie. Il est donc pratiquement impossible que des formations politiques, rompues à l'art de la manoeuvre et de l'entrisme, s'entendent sur un projet politique ou économique, s'inscrivant dans la durée et portant à bout de bras, le programme du président de la République avec lequel, vu leur moule idéologique, ils ne peuvent s'adapter. Déjà, l'introduction de la langue française dans l'enseignement primaire a fait pas mal de mécontents au sein de la mouvance islamiste, d'autant plus que ce sont les mêmes personnes qui s'étaient opposées à la commission Benzaghou, portant réforme du système éducatif et qui s'étaient regroupées autour du comité national de «sauvegarde de l'école algérienne authentique»: Il est donc clair qu'à l'exception de la convoitise du pouvoir, les partis de la coalition n'ont en réalité aucune stratégie de redéploiement politique, leur permettant d'appuyer leur projet d'alliance autour du président de la République. Pour eux, seul compte pour le moment, le degré d'allégeance apporté à l'homme fort du pays, qui en réalité n'attend pas grand-chose des organisations et des partis politiques.