Ouyahia reste le seul candidat à la difficile mission de mener l'Algérie à travers les vagues d'une crise annoncée Le gouvernement actuel s'est trouvé confronté, malgré lui, à une véritable crise générée par une chute du prix du pétrole imprévue mais prévisible et mille fois annoncée par les observateurs. Alors que toute la presse annonçait un changement gouvernemental imminent en août passé, nous avions écrit que «Si Bouteflika garde les mêmes considérations, il procèderait au changement de l'actuelle équipe gouvernementale vers le mois de mai ou juin 2015, ce serait plus conforme à sa manière de faire». (L'Expression du 26/08/2014). Tout indiquait en effet que cela allait être ainsi mais, depuis quelque temps, une chute du prix du pétrole est venue changer énormément les choses. Aujourd'hui, et alors que personne n'annonce aucun changement gouvernemental, nous revenons sur cette question le temps de faire quelques prévisions et de dire, après avoir intégré la nouvelle donne que le remaniement gouvernemental pourrait bien être avancé de quelques mois et que, au tout début de l'année 2015, nous avons de grandes chances d'assister à un important changement de gouvernement qui verra même le chef du gouvernement céder sa place. Le gouvernement Sellal, de par sa composition humaine, n'a pas vocation à assumer une mission de gestion de crise. Populaire, apprécié pour son intégrité morale, sa compétence aussi, mais il lui manque une flèche à son arc, celle d'un vrai «cabinet de guerre», capable de faire face à l'imprévu et aux aléas de la conjoncture économique internationale. L'actuel gouvernement devra partir Ce n'est pas dans une boule de cristal que l'on a lu ceci ni dans la bouche d'une «guezzana» qu'on l'a entendu. En mettant les données l'une à côté de l'autre, on peut remarquer, en effet, que Bouteflika, qui se rend compte de la difficulté de la conjoncture, n'a pas beaucoup de choix finalement, étant donné la crise qui frappe le pays et qui risque de durer, surtout que l'on sait, maintenant, que ces prix continueront à chuter du moment que l'Opep ne veut pas réduire la production. Il est impossible d'attendre jusqu'à mai ou juin pour procéder au remaniement gouvernemental. Des décisions doivent être prises dans l'immédiat pour tenter de réduire l'effet de la crise et des mesures, difficiles pour la plupart, doivent voir le jour. L'Algérie a besoin, maintenant, de décisions fortes et courageuses à un moment où les revendications sociales ont atteint un niveau qu'elles n'ont jamais connu auparavant. Le remaniement s'impose maintenant sinon, dans quelques mois, il ne servira à rien. Il est impossible de continuer à vouloir plaire ou de poursuivre sur le chemin du charme. Les problèmes ont besoin d'être résolus et non d'être reportés indéfiniment et certaines mauvaises habitudes instaurées devraient être maintenant oubliées peu à peu. Le gouvernement actuel s'est trouvé confronté, malgré lui, à une véritable crise générée par une chute du prix du pétrole imprévue mais prévisible et mille fois annoncée par les observateurs d'ici et d'ailleurs. Chargé à l'origine d'une longue opération de charme déplacée et, habitué à jeter, avec sourire et générosité, des milliards de dinars aux wilayas, ce gouvernement ne s'est jamais intéressé réellement à la gestion et il n'en a jamais fait. Il n'a même pas eu le temps pour cela. La politique du pompier, seul style développé pour la conduite des affaires des citoyens, est impossible à mener sur un long terme surtout lorsqu'une situation d'instabilité sociale, comme celle qui secoue le pays depuis quelques mois, se voit aggravée par une autre crise plus dangereuse celle-là, induite par la chute du prix du pétrole, le seul robinet pour notre économie! La question qui se pose dès lors est la suivante: que fera Bouteflika? Il a certes tenu une réunion avec ses ministres et a donné quelques orientations, mais est-ce suffisant? Il ne fait pas de doute que non, surtout que, dorénavant, les décisions ne doivent plus être seulement prises mais appliquées et suivies. L'austérité impose en effet beaucoup de sérieux, de la rigueur et donc autant de contrôle. Or, habitué à bouger dans les espaces plutôt virtuels rendus possibles uniquement par l'embellie financière sans pareille qui fut nôtre il y a quelque temps, le gouvernement actuel sera incapable de faire face à la crise qui pointe car il n'a jamais essayé la rigueur et encore moins le contrôle. L'impopularité aux aguets Par ailleurs, qui dit rigueur dit forcément mesures impopulaires. On ne peut pas demander aux gens de subir des décisions difficiles et s'attendre à leur plaire. Pour cela on a besoin de beaucoup de courage et, surtout, d'énormément de persévérance. A cela, il faut ajouter aussi une nécessaire maîtrise des dossiers et une capacité à gérer avec un oeil sur les grands agrégats macroéconomiques. C'est pour ces raisons que, nous semble-t-il, Ouyahia, pourrait être rappelé bientôt au poste de Premier ministre. Ouyahia a, en effet, des atouts évidents dans ce genre de situations. Il a déjà géré, par le passé, des périodes de crises difficiles qui ont fait de lui, comme il se définit lui-même d'ailleurs, un «homme des sales missions» à cause des mesures impopulaires qu'il a été mené à prendre plus d'une fois pour faire face à des conjonctures encore plus difficiles que celles qui s'annoncent. Bien sûr, Ouyahia n'est pas le seul Algérien à pouvoir diriger un gouvernement de grande crise mais Bouteflika n'est certainement pas prêt de se risquer avec quelqu'un qui n'a pas d'expérience ou qui n'a pas fait ses preuves car il sait que le moment n'est pas à la promenade. Or, dans ses alentours, il y a Saâdani et quelques chefs de partis de l'Alliance présidentielle. Saâdani n'a pas les capacités qui lui permettraient de gérer le pays et il ne peut être qu'éliminé d'office d'autant plus qu'il n'a été ramené de sa traversée du désert que pour s'occuper du FLN et des problèmes du FLN, choses qu'il a déjà du mal à maîtriser au vu des crises à répétition qui secouent de manière ininterrompue l'ex-parti unique depuis de longs mois. Saâdani, qui n'a eu de cesse, ces derniers temps, d'appeler de tous ses voeux, à ce que le gouvernement revienne au parti majoritaire devrait donc revoir ses ambitions à la baisse et se contenter d'attendre les jours meilleurs. Les autres présidents de partis faisant partie de l'alliance mise en place n'ont pas l'envergure nécessaire, en tout cas pas pour une période aussi cruciale que celle vers laquelle nous nous dirigeons. Ainsi, nous semble-t-il, Ouyahia reste le seul candidat à la difficile mission de mener l'Algérie à travers les vagues d'une crise annoncée et il a, de ce fait, beaucoup de chance d'être rappelé ces jours-ci pour diriger le nouveau gouvernement. Une question se pose? Acceptera-t-il? Se disant lui-même un commis de l'Etat, un soldat de la République, il n'y a pas de doute à ce qu'il accepte mais il est possible que, pour cela, il pourrait négocier à propos de son avenir. Si ces prévisions s'avèrent correctes, le nouveau gouvernement devra certainement être plus ramassé avec un minimum de postes ministériels et avec quelques ministères nouveaux, histoire de coller à l'actualité. Un ministère de l'Economie, de la Planification ou de la Prospective devrait voir le jour alors que la jeunesse et les sports pourraient se retrouver après avoir été séparés tandis que le nouveau découpage territorial prévu serait probablement reporté à une date ultérieure. Attendons donc pour voir.