Il est loin le moment où l'Algérie avait sa place au Festival africain du Fespaco. A cette époque, l'Algérie, pays le plus riche d'Afrique, était convoité par ce festival en difficulté à cause de la crise financière en Europe, origine de la source de financement de ce festival africain dépendant de l'Europe. Devant cette crise, c'est l'Algérie qui avait contribué financièrement à soutenir le Fespaco entre 2008 et 2010, dans le cadre du Festival panafricain d'Alger. Aujourd'hui, les choses ont visiblement changé. L'Algérie n'est plus un pays à soutenir et paie ainsi sa générosité, en voyant sa participation passer de 12 films en 2011, à seulement quatre en 2015. Mais qu'est-ce qui s'est passé pour voir ainsi sa participation réduite comme une peau de chagrin. Ce n'est pas le manque de production, puisque l'Algérie a produit plus de cinq longs métrages de qualité internationale: El Wahrani, Les Puits, Fathma N'soumer, le dernier opus de Lakhdar Hamina Crépuscule des ombres et bien sûr le dernier film de Rachid Bouchareb, La voie de l'ennemi. A cela s'ajoute l'excellent documentaire de Salem Brahimi Abdelkader. Seulement voilà, le 15 janvier dernier la délégation du Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou (Burkina Faso) a rendu publique à la Cinémathèque française de Paris, (comme par hasard), sa liste des films prévus pour la 24e édition du Fespaco qui se tiendra du 28 février au 7 mars 2015. Sur les 134 films sélectionnés pour cette 24e, un seul film algérien de qualité parmi les six cités est sélectionné. Fathma N'soumer de Belkacem Hadjadj. On notera surtout l'absence aberrante du film de Lyes Salem El Wahrani (L'Oranais), qui avait été sélectionné pour les JCC 2014 à Tunis (Le binome du Fespaco). C'est le film algérien le plus primé en 2014, deux Prix au JCC, Prix du meilleur film arabe au Festival d'Abou Dhabi, Prix de la meilleure interprétation pour Lyes Salem à Angoulême et un Prix au Festival de Bruxelles. Curieusement, cette absence intervient au moment où le film sortira aujourd'hui dans les salles et les cinémathèques d'Algérie. A quoi obéit cette réduction de films dans la catégorie de long-métrage? Même le court-métrage algérien a été sanctionné, puisque celui qui a remporté le plus de prix en 2014, Les jours d'avant du réalisateur algérien, Karim Moussaoui, n'a pas été sélectionné, alors qu'il avait obtenu le Prix du meilleur court-métrage au 30e Festival international du Cinéma «Vues d'Afrique» à Montréal. Et pourtant les organisateurs de «Vues d'Afrique» ont célébré pour cette édition anniversaire «30 ans de jumelage» avec le Festival panafricain de Cinéma de Ouagadougou (Fespaco, Burkina-Faso) qui fêtera ses 30 ans du 28 février au 5 mars 2015. Le court métrage algérien aurait dû être sélectionné à Ouaga conformément aux voeux de «Vues d'Afrique». Seulement, la nouvelle direction du Fespaco, visiblement myope ne voit pas la présence algérienne d'un bon oeil. En effet, après cinq années passées à la tête du Festival panafricain du cinéma de Ouagadougou, Michel Ouédraogo (considéré comme un ami de l'Algérie), a été remplacé par Ardiouma Soma, devenu le nouveau délégué général du Fespaco. Ardiouma Soma était précédemment directeur de la Cinémathèque africaine de Ouagadougou et directeur artistique du Fespaco. Sans financement public local, le Fespaco vit comme un camp de réfugiés, aidé par l'Agence internationale de la francophonie (AIF), le Pnud, l'Unesco, l'Unicef et l'Union européenne. Alors vive le cinéma... africain post-colonial! [email protected]