Les combats font rage dans la province de Maiduguri entre l'armée et Boko Haram De violents combats opposaient hier l'armée à Boko Haram à Maiduguri, fief historique des islamistes dans le nord-est du Nigeria, peu avant l'arrivée à Lagos du secrétaire d'Etat américain John Kerry. Outre les incessantes attaques des islamistes dans le nord-est du pays, John Kerry vient évoquer l'avenir politique du pays, à trois semaines des élections présidentielle et législatives qui s'annoncent les plus serrées depuis le retour de la démocratie au Nigeria en 1999. Alors même que le dirigeant américain était en route pour Lagos, la capitale économique du pays, une opération militaire aérienne et terrestre était en cours à Maiduguri, capitale de l'Etat de Borno (nord-est), où un couvre-feu a été instauré. La crainte d'une offensive islamiste contre cette ville planait depuis quelques mois, depuis que les insurgés ont commencé à conquérir une localité après l'autre (villes et villages) dans la région. C'est à Maiduguri qu'est né le mouvement Boko Haram en 2002 - d'abord une simple secte, qui s'est insurgée en 2009 pour devenir un groupe islamiste armé après l'exécution de son leader de l'époque par les forces de l'ordre. Ces attaques surviennent au lendemain d'une visite du président nigérian Goodluck Jonathan dans la ville pour son premier meeting de campagne. «Je peux vous assurer que si je suis réélu président, le problème de l'insécurité sera Traité», avait-il lancé à ses sympathisants. John Kerry a lui-même annoncé sa visite à Lagos vendredi depuis le Forum économique mondial de Davos, en Suisse, à l'occasion d'un discours où il a appelé la communauté internationale à combattre le «terrorisme» et les groupes islamistes comme Boko Haram, qui multiplie exactions et conquêtes territoriales dans le nord-est du Nigeria. Mais sa visite dans le pays le plus peuplé d'Afrique, première économie du continent, ne devrait pas être consacrée exclusivement au combat contre les insurgés, dont la conduite inefficace par les autorités nigérianes a suscité des tensions entre Washington et Abuja. La question des élections prochaines est centrale. Les Etats-Unis ont insisté pour qu'elles aient bien lieu le 14 février, malgré l'extrême violence de l'insurrection islamiste dans le nord-est reculé du pays, qui risque d'empêcher des centaines de milliers de déplacés de participer au scrutin. Le conseiller national à la sécurité du Nigeria, Sambo Dasuki, a appelé cette semaine au report des élections, expliquant que 30 millions de cartes d'électeurs n'avaient toujours pas été distribuées. Mais la commission électorale a maintenu son calendrier. John Kerry devrait rencontrer à Lagos le président Goodluck Jonathan, qui se présente pour un deuxième mandat de quatre ans, et son principal rival, l'ex-dirigeant militaire Muhammadu Buhari. Selon des analystes, M.Buhari et son parti, le Congrès progressiste (APC), ont une chance réelle de chasser du pouvoir le Parti démocratique du peuple (PDP), pour la première fois en 16 ans de démocratie. Le PDP a choisi de mener une campagne très ciblée contre M.Buhari, qui a dû répondre à des accusations sur son éligibilité, sa santé et ses croyances religieuses. Le climat politique «de plus en plus violent» au Nigeria avait été souligné par l'International Crisis Group (ICG) dès novembre 2014. Or le souvenir des violences postélectorales de 2011 reste vivace: elles avaient causé la mort de plus de 1000 personnes. Le sudiste chrétien Goodluck Jonathan, le nordiste musulman Muhammadu Buhari et les 12 autres candidats à l'élection présidentielle ont signé un pacte de non-violence, mais des affrontements et des incidents sporadiques ont déjà eu lieu. La visite de M.Kerry intervient alors que les relations se sont tendues depuis fin 2014 entre les Etats-Unis et leur partenaire nigérian. Les Etats-Unis restent toutefois un allié d'Abuja et y ont dépêché l'an dernier des conseillers militaires et civils pour tenter de retrouver les plus de 200 lycéennes enlevées par Boko Haram à Chibok (nord-est). Sans succès jusqu'à présent.