« Notre défi est plus grand que Daech. Nous devons être plus forts en Somalie, redoubler d'efforts et mettre fin à la violence au Nigeria, c'est pour cette raison que je m'y rendrai dans quelques jours », explique-t-il. « Dans la lutte antiterroriste internationale, il n'y a pas de place pour les divisions confessionnelles. La plus grande erreur que nous puissions faire est d'accuser des musulmans pour des crimes qu'ils n'ont pas perpétrés, des crimes auxquels l'immense majorité des musulmans est opposée », met-il en garde. Abuja, qui peine à contenir l'avancée de Boko Haram, envisage de rappeler ses soldats en mission de maintien de la paix à l'étranger. « C'est pour renforcer ses opérations militaires dans le nord-est du pays », avance Mike Omeri, coordinateur du Centre national d'information, estimant que la Force conjointe multinationale, formée pour combattre Boko Haram, s'est effondrée. Une coopération militaire a été conclue, fin 2014, entre les pays membres de la Commission du bassin du lac Tchad (Cameroun, Niger, Nigeria et Tchad). Composée de 700 militaires de chaque pays, ainsi que du Bénin, cette force n'a jamais pu se matérialiser. La raison ? La persistance des dissensions entre Lagos et ses voisins. Aujourd'hui, la capitale du pays le plus peuplé d'Afrique ne compte pas demander, voire accepter, une force soutenue par l'Union africaine ou l'ONU pour combattre Boko Haram, un point qui figure, pourtant, en bonne place dans l'agenda du 24e sommet des chefs d'Etat de l'UA qui se tiendra dans la capitale éthiopienne les 30 et 31 janvier. « Elle n'est pas nécessaire », déclare Sambo Dasuki, conseiller national à la sécurité du Nigeria. « C'est un problème que nous pouvons parfaitement gérer », dit-il, dans une interview à la radio britannique BBC. Sambo ne souffle pas mot sur la raison de ce revirement. Mardi dernier, trois pays membres de la Commission du bassin du lac Tchad (Cameroun, Niger et Tchad) ont décidé, à l'issue d'une réunion de crise à Niamey, de transférer le commandement de la force du Nigeria au Tchad. Mercredi, l'Union africaine a entériné ce transfert de l'état-major de la force régionale de lutte contre Boko Haram d'Abuja à N'Djamena. Selon toute vraisemblance, Goodluck Jonathan n'a pas apprécié l'offensive diplomatico-militaire menée par son homologue Déby au nom des « intérêts vitaux » du Tchad. Et pour cause, N'Djamena est à 50 km du fief de Boko Haram. Kerry, dont le pays a dépêché, au printemps dernier, des conseillers militaires et civils pour tenter de retrouver les lycéennes enlevées par le « Daech africain », réussira-t-il à faire changer d'avis au président Goodluck Johnathan ? Des combattants du groupe armé ont abattu, vendredi passé, 15 personnes dans un village proche de leur fief historique de Maiduguri, dans le nord-est du Nigeria.