L'Assemblée nationale et le Sénat ont été convoqués en séance plénière pour voter dans la journée le texte, qui ouvrait initialement la voie au report de la prochaine présidentielle. La loi électorale à l'origine de violences meurtrières en République démocratique du Congo (RDC) devait être adoptée hier par le Parlement, au lendemain du recul du camp du chef de l'Etat Joseph Kabila et du retrait de la disposition litigieuse. Face à la contestation populaire, le président de la Chambre basse, Aubin Minaku, chef de la majorité présidentielle, a annoncé samedi soir le retrait d'un alinéa qui conditionnait la tenue de la présidentielle, prévue fin 2016, aux résultats d'un recensement général de la population devant commencer cette année et qui, selon plusieurs analystes, pourrait prendre jusqu'à trois ans. Au pouvoir depuis 2001, la Constitution interdit à M.Kabila de briguer un nouveau mandat. Le projet de révision de la loi électorale a enflammé Kinshasa: de lundi à mercredi, la bouillante capitale de 10 millions d'habitants a été secouée par des violences ayant fait entre 12 et 42 morts, selon les sources. Le mouvement de contestation a vite échappé au contrôle de ses initiateurs, un collectif réuni autour de membres des trois principaux partis de l'opposition. La police est rapidement apparue débordée - voire passive par endroits -, entraînant l'intervention de l'armée, et en particulier de la Garde républicaine qui assure la sécurité du chef de l'Etat. Arrivé au pouvoir en 2001 après l'assassinat de son père Laurent-Désiré Kabila, rebelle devenu chef de l'Etat par les armes, Joseph Kabila avait été élu président en 2006, puis réélu en 2011 à l'issue d'un scrutin marqué par des irrégularités massives et à l'origine de la crise politique que connaît le pays. Vital Karmehe, chef de l'Union pour la nation congolaise (UNC), l'un des meneurs du collectif d'opposants, s'est félicité samedi du retrait de l'alinéa le plus litigieux. «C'est une victoire (...) car il n'y aura pas de (report) de la présidentielle», a-t-il déclaré. M. Kamerhe «va un peu vite en besogne en criant victoire», indiquait hier une source proche du gouvernement, «le retrait n'est qu'une tactique du clan présidentiel». L'annonce du recul de la majorité face à la contestation populaire a aussi surpris les diplomates. Samedi matin, cinq ambassadeurs en poste à Kinshasa (Belgique, Etats-Unis, France, Royaume-Uni et Union européenne), accompagnés du chef de la Mission de l'ONU en RDC (Monusco), avaient rencontré M.Kabila pour lui signifier leur «préoccupation» après les violences et lui demander de retirer l'alinéa litigieux. La volte-face du pouvoir annoncée par M.Minaku, chef de la majorité présidentielle, «nous (a surpris) vu la détermination (à faire passer le texte) Affichée» par le président devant les ambassadeurs, indiquait samedi soir un diplomate. «On se demande ce que cela cache». M.Kamerhe reconnaît qu'aux yeux de l'opposition, un autre article du projet de loi pose problème. Il lie la définition des circonscriptions électorales aux résultats du recensement et risque donc d'entraîner un report des prochaines législatives, prévues en même temps que la présidentielle fin 2016.