Cherchell, la ville natale de la défunte Membre de l'Académie française depuis 2005, la défunte a été pressentie plusieurs fois au prix Nobel de littérature. Triste nouvelle pour la famille intellectuelle et littéraire. L'écrivaine de notoriété mondiale, Assia Djebar, est décédée vendredi dernier à 79 ans, dans un hôpital parisien des suites d'une longue maladie. La nouvelle de sa mort a fait le tour de la planète. La quasi-totalité de la presse mondiale en fait écho, pour dire combien la famille littéraire mondiale regrette son décès. Normalienne, membre de l'Académie française depuis 2005, la défunte a été pressentie plusieurs fois au prix Nobel de littérature. Romancière de talent et poète, ses essais traduits dans 23 langues, Assia Djebar est considérée comme l'une des auteurs les plus célèbres et influentes du Maghreb. Née Fatma-Zohra Imalayène à Cherchell le 30 juin 1936, Assia Djebar est une vraie icône de la littérature francophone et elle a été la première personnalité maghrébine élue a l'Académie française, dont l'oeuvre romanesque défend les droits des femmes dans le monde musulman. Selon des membres de sa famille, elle sera enterrée en Algérie, au cimetière de Cherchell aux côtés de son père et de son frère Mohamed, décédé nourrisson. Fatma-Zohra Imalayène est la première algérienne et la première femme musulmane à intégrer l'Ecole normale supérieure de jeunes filles de Sèvres en 1955 où elle choisit l'étude de l'Histoire en 1956. À partir de 1956, elle suit le mot d'ordre de grève de l'Ugema, l'Union générale des étudiants musulmans algériens, et ne passe pas ses examens. C'est à cette occasion qu'elle écrira son premier roman, «La Soif». Elle adopte depuis le nom de plume, Assia Djebar. En marge de la littérature, elle se lance également dans le cinéma, réalisant notamment le film La Nouba des Femmes du Mont Chenoua en 1978 pour lequel elle recevra le Prix de la Critique internationale à la Biennale de Venise. En 1983, Pierre Beregovoy, ministre français des Affaires sociales, la choisit pour représenter l'immigration algérienne au Conseil d'administration du Fonds d'action sociale (FAS) où elle siège six ans. Après la mort de son père, en 1995, Assia, qui a toujours vécu entre la France et l'Algérie, accepte la direction du Centre d'études françaises et francophones de Bâton Rouge (Louisiane). Tout au long de sa carrière, Assia Djebar recevra de nombreuses distinctions littéraires prestigieuses (Prix Liberature de Francfort en 1989, prix Maurice Maeterliinck en 1995 ou encore le prix Marguerite Yourcenar en 1997). Pendant une dizaine d'années (les années soixante- dix), elle délaisse l'écriture pour le cinéma. En 1999 elle soutient sa thèse à l'université Paul-Valéry Montpellier 3, une thèse sur sa propre oeuvre: «Le roman maghrébin francophone, entre les langues et les cultures: quarante ans d'un parcours: Assia Djebar, 1957-1997». La même année, elle est élue membre de l'Académie royale de langue et de littérature françaises de Belgique. Depuis 2001, elle enseigne au département d'études françaises de l'université de New York. Le 16 juin 2005, elle est élue au fauteuil 5 de l'Académie française, succédant à Georges Vedel, et y est reçue le 22 juin 2006. Elle est docteur honoris causa des universités de Vienne (Autriche), de Concordia (Montréal), d'Osnabrück (Allemagne). L'oeuvre de Assia Djebar a pour thèmes l'émancipation des femmes, l'histoire, l'Algérie considérée à travers sa violence et ses langues. Après un premier mariage (1968-1975), avec l'écrivain Walid Carn (pseudonyme d'Ould-Rouis Ahmed), elle avait épousé le poète Malek Alloula, en 1981. A la demande de Françoise Giroud qui dirige L'Express elle retourne en Algérie le 1er juillet 1962, après huit années d'absence pour réaliser une enquête sur les Algériennes à peine sorties de 132 ans de colonisation et de sept années de guerre. L'enquête sera publiée le 26 juillet 1962 sous le titre L'Algérie des femmes. Assia Djebar conclut son enquête avec les phrases suivantes: «Je les ai vues, la plupart, les premiers jours de l'indépendance. Elles rendaient grâce à Dieu de ces jours arrivés; et maintenant, elles attendent.» Elle dira quelques années plus tard: «J'écris, comme tant d'autres femmes écrivaines algériennes avec un sentiment d'urgence, contre la régression et la misogynie.» Avec cette disparition devrait se poser la question de l'entrée d'un nouveau membre sous la Coupole. Récemment, l'académicienne Hélène Carrère d'Encausse s'était montrée enthousiaste à l'idée d'une candidature de Michel Houellebecq, prix Goncourt 2010. Mais cet écrivain à la tête de blette a peu de chance d'occuper le siège vacant de l'Académie française dans la mesure où son dernier ouvrage «la soumission»a déchaîné les passions et a réveillé les démons de l'extrémisme et de l'islamophobie en France.