Spectaculaire reprise des affrontements en divers points du pays et enlèvement hier de quatre étrangers. Bagdad et Tall Afar, au nord de la capitale irakienne, ont été durant ces dernières quarante heures le théâtre de sanglants affrontements entre la guérilla irakienne et l'armée d'occupation américaine. Affrontements, bombardements (à Bagdad et Falloujah, occasionnant 15 morts hier dans cette ville rebelle sunnite,) voitures piégées rythment depuis quelques jours la vie des Irakiens pris en tenaille entre deux forces antagonistes peu regardantes sur les moyens de tuer. Et c'est encore les forces américaines qui usent à grande échelle des moyens de guerre par l'emploi dans ses offensives des chars d'assaut, des hélicoptères de combat et bombardements aériens. Cela a été le cas hier à Falloujah et à Bagdad ou, en sus, un couvre-feu a été appliqué dans le centre de la capitale par les autorités militaires américaines. Hier, sillonnant les rues du centre, installés sur des Humvees et à l'aide de haut-parleurs, des soldats américains incitaient la population à demeurer chez elle dans un message répété tout au long de la journée, indiquant: «Eloignez-vous des fenêtres et des portes. Restez chez vous. Quiconque sera trouvé dehors durant cette période sera considéré comme un terroriste et risque la mort». D'autre part, Tall Afar, ville frontalière avec la Syrie, vit depuis une semaine l'enfer tant par les bombardements aériens continus de l'armée américaine que par le blocus qui lui est imposé. 51 morts ont été dénombrés dimanche dans cette localité où les forces d'occupation américaines obligent les habitants de la ville à quitter leur foyer. De fait, face à cette escalade meurtrière à Tall Afar, l'ambassadeur américain à Ankara a été convoqué hier au ministère turc des Affaires étrangères qui s'inquiète du sort fait à la région (Tall Afar) peuplée en majorité par des Turcomans. Utilisant les grands moyens, les forces américaines ne reculent devant aucun expédient, comme celui de dimanche lorsque un missile fut lancé sur une foule attroupée autour d'un char américain en flamme, tuant pratiquement en direct, le journaliste palestinien Mazen Tomeizi, alors qu'il commentait, pour la chaîne satellitaire Al-Arabiya, les évènements dont il était le témoin. Un caméraman de l'agence britannique Reuters, Seif Fouad, qui était sur place témoigne: «J'ai regardé vers le ciel et j'ai vu un hélicoptère voler à très basse altitude» (...) «Quelques instants après, un trait de lumière est parti de l'Apache. Puis il y eut une forte explosion» poursuit le témoin qui ajoute: «Le sang de Mazen était sur ma caméra et sur mon visage» Et Tomeizi d'appeler «Seif! Seif! Je vais mourir» criait le journaliste palestinien touché à mort. En fait, les soldats américains qui participent aux confrontations avec la guérilla ne prennent aucun risque et semblent prêts, pour neutraliser un résistant, à tuer tous ceux qui bougent, y compris des personnes innocentes prises dans l'engrenage de ce déchaînement de violence. Protégés dans leurs chars blindés, dans leurs hélicoptères ou leurs avions de combat, les GI américains tuent d'abord et s'enquièrent ensuite de ceux qui sont morts. Cela a été le cas dimanche lorsqu'un missile est tombé sur un quartier résidentiel de Ramadi tuant dix Irakiens essentiellement des femmes et des enfants selon des sources hospitalières. Ainsi, ne faisant pas de distinction entre ceux portant les armes et le peuple désarmé, les forces d'occupation américaines privilégient la manière forte laquelle ne peut que se traduire par d'énormes dégâts. Aussi, plus de 110 morts ont été recensés en l'espace de deux jours d'affrontements dans plusieurs villes irakiennes. Les Américains qui voient Abou Moussab Al-Zarqaoui, partout en Irak, bombardent tout lieu où lui ou ses partisans sont signalés, semant la mort également un peu partout en Irak. Par ailleurs, au moment où la violence est à son comble et alors que l'on ignore toujours le sort réservé aux otages français, italiens et irakiens de ces derniers jours, un groupe islamiste s'est manifesté hier, annonçant l'enlèvement de deux Australiens et deux ressortissants asiatiques, menaçant de tuer les premiers si l'Australie ne retire pas ses troupes d'Irak dans les 24 heures. Cette escalade de la violence n'annonce guère des jours plus calmes pour l'Irak.