Dénoncer le plan Baker, en soutenant la position marocaine, ne répond à aucune logique politique. L'ancien numéro un de l'ex-FIS donne véritablement l'air d'être à bout de souffle. Après avoir tenu en haleine, l'année passée, le monde entier à propos de son «initiative de paix», observateurs et politiques ont cessé de le prendre au sérieux. C'est pourquoi il multiplie les sorties médiatiques et les appels du pied à des chancelleries qu'il sait importantes aux yeux des autorités algériennes. Profitant, ainsi, de son second passage par Al-Jazeera, celui qui assume une large responsabilité politique des horribles crimes commis en Algérie, joue brusquement l'entremetteur empressé en multipliant les appels en faveur de la libération des otages en Irak. Abassi Madani, on s'en souvient, était allé jusqu'à observer une «symbolique» grève de la faim afin que les deux journalistes français soient libérés. Le geste, mûrement calculé présume-t-on, cherchait avant tout à se faire bien voir de la part des autorités consulaires françaises. L'ancien numéro un de l'ex-FIS, visiblement dépassé par les événements, se sait incapable de reprendre les choses en main du fond de son exil doré en Arabie Saoudite. C'est donc dans le but manifeste de décrocher un asile territorial ou politique en France qu'Abassi Madani vient découvrir brusquement à quel point il est inhumain que des innocents soient enlevés, torturés puis décapités par des groupes qui se revendiquent de l'islamisme politique, mais qui n'ont rien à voir avec cette religion basée avant tout sur la tolérance et le dialogue. Abassi Madani, du reste, trahit définitivement ses desseins stratégiques en lançant un véritable «chant des sirènes» en direction de Paris et de Rabat. Prenant à contre-courant la position algérienne, que le peuple soutient dans son écrasante majorité, l'ancien homme fort du parti dissous pourfende ainsi le plan Baker et se prononce en faveur d'une «autonomie retreinte» du Sahara Occidental sous l'autorité du royaume marocain. Mohammed VI, en perte de vitesse, ne pouvait guère en espérer tant, à ceci près quand même qu'Abassi Madani a perdu toute crédibilité à l'échelle nationale et internationale. Les raisons en sont multiples. La première en est que cet homme ne saurait être sincère dans sa démarche tout aussi pacifiste que contradictoire. Sinon, comment expliquer qu'à aucun moment sa voix ne s'est élevée pour dénoncer les horribles crimes commis en Algérie contre les populations civiles au nom de son ancien parti? Abassi Madani, depuis sa libération de prison et sa sortie du territoire national pour de supposées raisons de santé, était attendu de pied ferme par tous les analystes, observateurs et chancelleries du monde entier. Or, sa proposition de sortie de crise, livrée en exclusivité a Al-Jazeera, était tout simplement confuse, décousue, et quasi surréaliste. Depuis, il s'est mis à collectionner les «impairs», dont le dernier est cette interview accordée jeudi à la chaîne qatarie. Cela ne l'a quand même pas empêché de remettre une nouvelle fois cela en adressant également un communiqué à la presse mondiale dans lequel il soutient implicitement les mouvements armés irakiens, leur demandant juste de relâcher certains otages, notamment français et britanniques, dans le but d'acquérir plus de légitimité aux yeux de l'opinion internationale. Cette redondance est devenue tellement lassante que les observateurs ont tout simplement cessé de se demander quand Abassi Madani lancera enfin un appel, sans grande chance d'être écouté certes, en direction des terroristes encore actifs en Algérie afin de mettre fin au massacre dont l'inanité militaire et politique ne fait plus de doute pour personne...