Une affaire dont l'université algérienne se serait bien passé Après le retrait de la circulaire 628 du 28 mai 2010 stipulant que «la participation aux manifestations scientifiques internationales devrait être soumise à l'accord préalable des autorités compétentes», elle revient sous une forme sournoise. Le docteur Samir Bellal, enseignant à l'université de Boumerdès, vient de faire l'objet d'une censure. Connu pour sa participation active au débat public sur les questions relatives à l'économie nationale, notamment celles en relation avec les stratégies de régulation dont il est un éminent spécialiste, le docteur Bellal s'est vu refuser une prise en charge par l'administration de l'université M'hamed Bouguerra pour une participation à un colloque à Paris. «D'après ce qui m'a été signifié, ma communication contiendrait des éléments susceptibles d'être interprétés comme une critique politique du pouvoir. Des expressions comme crise du régime rentier'', logique clientéliste'' et comportements rentiers'' semblent poser des problèmes aux responsables de l'université qui, se fondant sur des expériences passées, ne voudraient pas avoir à s'expliquer avec les services de sécurité pour m'avoir permis de présenter, à l'étranger de surcroît, une communication dans laquelle la politique économique du pays serait sévèrement critiquée», a déclaré Samir Bellal au quotidien El Watan. Mais cette «censure qui ne dit pas son nom» n'a pas laissé la communauté universitaire insensible. «C'est avec une grande consternation que nous avons appris que notre collègue le Dr Samir Bellal vient de faire l'objet d'une infâme et sournoise censure académique. Notre collègue, exerçant en qualité de maître de conférences (A) au sein de la faculté des sciences économiques de l'université M'hamed Bougara de Boumerdès, voit sa participation à un colloque international, qui se tiendra à partir du 10 juin 2015 à Paris, grandement compromise. Et pour cause, l'administration de l'université de Boumerdès, qui juge la communication de notre collègue «politiquement incorrecte», refuse toujours, en l'absence d'un feu vert du ministère de tutelle, de lui accorder une prise en charge qui lui permettrait de prendre part aux travaux du colloque», a-t-on écrit dans une pétition de soutien lancée par une pléiade d'universitaires dont Lahouari Addi, Mourad Ouchichi, Adel Abderazk, Daho Djerbal, Ahmed Dahmani, Ahmed Rouadji, Ahcene Zehnati. Pour rappel, précise le texte de la pétition, «d'ordinaire, le traitement par le Conseil scientifique des dossiers de postulants à la participation aux colloques internationaux est une simple formalité administrative, inhérente notamment à des considérations de prise en charge logistique. Cependant, pour le cas du Dr Samir Bellal, la formalité s'est transformée en un levier de chantage administratif exercé clairement dans une perspective de censure académique, avec en filigrane des arrière-pensées politiciennes». Et aux rédacteurs de la pétition de s'interroger: «Ne cherche-t-on pas à sortir de nouveau la circulaire 628 du 28 mai 2010, promulguée par le ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique de l'époque, stipulant entre autres que «la participation aux manifestations scientifiques internationales devrait être soumise à l'accord préalable des autorités compétentes»? Enfin, tout en dénonçant les «maîtres censeurs» et autres adeptes zélés du «politiquement correct», les signataires de la pétition ont appelé au «respect des franchises et du travail universitaires» et ont exhorté «l'ensemble de la communauté universitaire ainsi que les citoyens et citoyennes jaloux pour la liberté intellectuelle de réflexion, de production, de débat et d'action à se mobiliser et à manifester (leur soutien) en faveur de notre collègue le Dr Samir Bellal».