Les chefs des diplomaties américaine et iranienne, John Kerry et Mohammed Javad Zarif, tentent de pousser vers l'avant des négociations qui s'éternisent L'heure des choix a sonné à Vienne, où un accord historique sur le nucléaire iranien semblait dimanche «à portée de main», à condition de surmonter deux ou trois derniers points de friction. «On arrive à de vraies décisions», a estimé le chef de la diplomatie américaine John Kerry, se disant à deux reprises «optimiste» malgré un «petit nombre de points» toujours en suspens. En écho, le chef de la diplomatie européenne, Federica Mogherini, a twitté que les négociations étaient entrées dans «des heures décisives». Et le ministre français des Affaires étrangères Laurent Fabius a dit «croire» que les «négociations marathon» étaient entrées dans «leur dernière phase». Pour un diplomate iranien présent à Vienne, un accord est bien «à portée de main» mais, a-t-il relativisé, il faut encore «de la volonté politique» pour l'atteindre. Depuis quinze jours, le groupe P5+1 (Etats-Unis, Russie, Chine, France, Royaume-Uni et Allemagne) tente de finaliser un accord avec l'Iran qui garantisse le caractère strictement civil de son programme nucléaire, en échange de la levée des sanctions internationales. Les discussions censées se terminer le 30 juin ont été reportées à trois reprises avec une énième date-butoir fixée à aujourd'hui. A l'approche de cette échéance, le rythme des réunions s'est accéléré samedi, avec des échanges au niveau ministériel jusqu'au milieu de la nuit, notamment entre M.Kerry et son homologue iranien Mohammed Javad Zarif. Signe qu'un épilogue se prépare, le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, absent depuis plusieurs jours de la capitale autrichienne, était en route hier après-midi pour le palais Coburg, qui abrite les pourparlers. Le but de ces efforts? Refermer un dossier qui empoisonne les relations internationales depuis plus de 12 ans. La République islamique est soupçonnée d'avoir mis en oeuvre jusqu'en 2003, et peut-être au delà, un programme nucléaire militaire sous couvert d'un programme civil, ce qu'elle a toujours nié. Depuis 2006, les Etats-Unis, l'UE et l'ONU ont adopté plusieurs trains de sanctions contre Téhéran, qui étouffent l'économie de ce pays. Depuis septembre 2013, les deux camps tentent de trouver une solution concertée, mais un accord s'est dérobé à plusieurs reprises en raison de la complexité du dossier et de ses enjeux. En avril, à Lausanne, les négociateurs avaient obtenu à l'arraché un accord sur de grands principes. L'Iran avait notamment accepté de réduire le nombre de ses centrifugeuses ou son stock d'uranium enrichi, ce qui, en pratique, doit rendre quasi impossible la confection d'une bombe atomique. Depuis, les experts des deux parties ont poursuivi les tractations pour définir les modalités pratiques de l'accord final. Les négociations ont notamment buté jusqu'ici sur la levée de restrictions sur le commerce des armes, réclamée par Téhéran avec le soutien de Moscou. Les Occidentaux jugent cette demande délicate en raison de l'implication iranienne dans plusieurs conflits, en particulier en Syrie et en Irak. Autre point de désaccord: le rythme de la levée des sanctions. Les Iraniens souhaitent qu'elle soit immédiate, mais leurs partenaires envisagent une levée graduelle et la possibilité de revenir en arrière en cas de violation de l'accord. Le P5+1 demande aussi que des inspecteurs de l'Agence internationale de l'énergie atomique (Aiea) puissent accéder à des sites militaires «si nécessaire», ce que rejettent les responsables militaires iraniens. Enfin, les deux camps se disputent sur la durée des clauses imposées à l'Iran. Si un accord est signé à Vienne, il marquera une normalisation des relations de l'Iran avec la communauté internationale. Il se heurte à l'hostilité des puissances régionales du Golfe et d'Israël, dont le Premier ministre Benjamin Netanyahu a encore prévenu hier qu'il s'y opposerait.