Dans un contexte de mort et de crainte, le téléthon sollicite les coeurs en peine. Après l'effroyable épreuve de samedi noir et les centaines de morts qui ont endeuillé le pays, l'Algérois a cru, l'espace d'une douleur, avoir tout vu, tout vécu. Qu'y a-t-il de pire que de voir les morts ensevelis sous un tas de boue et des survivants, meurtris, en quête d'une aide élémentaire. Rien, dira-t-on, pourtant, rétorqueront les sages, le pire serait que le cauchemar de la mort continue et que la solidarité des Algériens soit brisée par les élans fantasques et infâmes de vils opportunistes. Pour ce qui est du cauchemar, la ville d'Alger vient d'en vivre un autre. En ce mois de piété, la capitale, déjà endeuillée, se voit gangrenée par l'action abjecte d'un terrorisme en son sein. Une horrible bombe vient de coûter deux jambes à de malheureux étudiants qui attendaient patiemment qu'un bus bondé vienne, enfin, les déposer dans leur université. Pas de morts? Il pouvait y en avoir toutefois. Cette bombe artisanale n'est autre qu'un avertissement pour les esprits crédules qui croyaient qu'on en avait fini avec le terrorisme. Ce n'est qu'une amorce qui en annonce d'autres, plus criminelles, et qui n'ont pas fini de faire du deuil un banal procès de circonstance. Face à ces épreuves naturelles et criminelles, le citoyen moyen ne peut faire preuve que de patience, de résistance et de solidarité. C'est certainement l'esprit de cette dernière qu'il faut à tout prix préserver pour que l'espoir ne soit pas, à son tour, enterré comme le sont ces victimes innocentes. La solidarité, nous la connaissons énergique, intense et les citoyens en ont toujours manifesté des plus augustes. Il reste, qu'en ces temps difficiles où la suspicion et la méfiance sont de mise, les Algériens ne savent plus à qui faire confiance ni à qui profiterait leur élan de générosité. Notons, par ailleurs, que devant l'ampleur de la détresse des uns et le désespoir des autres, certaines bonnes gens ont tendance, en ces temps de crise, à occulter ce genre de questions et à multiplier leurs dons espérant qu'une partie, au moins, parviennent aux sinistrés et aux malheureux. Le téléthon qu'organise l'ENTV le 28 et 29 novembre gagnerait à sensibiliser davantage les citoyens et à les rassurer du bon acheminement des aides. Quoi qu'on en pense, il demeure une excellente initiative et un bon moyen pour la mobilisation et la création d'un climat solidaire à condition, toutefois, que les fonds recueillis bénéficient d'un suivi régulier et d'une communication systématique de ce à quoi ils vont servir. Dépasser la barre des 50 milliards de centimes est un pari qu'il faut à tout prix gagner. Une telle somme ne réglera pas tous les problèmes, ne ramènera pas la sécurité que tout un chacun rêve de voir revenir ; mais elle permettra sans doute de panser quelques plaies. Elle nous permettra également de croire à une union dans la douleur et, pourquoi pas, à un avenir meilleur.