La journaliste française a publié un ouvrage dans lequel elle dresse un portrait circonstancié des deux candidats à la présidence américaine. Voici un livre qui tombe à pic et qui éclaire certains aspects d'une campagne au vitriol, et aussi pour comprendre les enjeux d'une élection pas comme les autres qui intervient dans un contexte américain et international controversé marqué par la lutte antiterroriste et la guerre en Irak. Christine Ockrent, journaliste professionnelle et écrivaine, animant un talk-show sur France 3, «France Europe Express», et ayant séjourné une décennie aux Etats-Unis, est l'une des personnes qui connaissent le mieux les arcanes de la politique américaine, ses grands et ses petits secrets. Par petites touches, la journaliste présente le décor dans lequel se meuvent les deux postulants à la Maison-Blanche, le président sortant, George Walker Bush, et son challenger John Forbes Kerry qui veulent gagner les suffrages d'une Amérique dont la confiance en soi reste teintée de la crainte du terrorisme. C'est cette Amérique changeante et semblable qui sert de toile de fond au duel «fratricide» entre deux garçons bien élevés et bien éduqués de l'aristocratie bourgeoise de la côte Est. Bush-Kerry, les deux Amérique présente en fait les portraits croisés des deux hommes, leur adolescence, leurs études, leurs itinéraires universitaires et politiques, ou comment deux hommes issus du même milieu de la bonne société américaine en sont venus à se vouer une haine féroce et cultiver des positions politiques aux antipodes les unes des autres. L'ascension de George W.Bush et de John F. Kerry est ainsi passée au scanner par Christine Ockrent qui donne à lire les étapes qui ont marqué le néo-conservateur George W.Bush et le libéral John F. Kerry. Comme l'explique Mme Ockrent, le terme «libéral» ne recouvre pas la même signification que l'on soit à l'Est ou à l'Ouest de l'océan Atlantique. En effet, en Amérique un homme politique «libéral» est un homme progressiste de gauche, voire un «gauchiste». Kerry est donc un progressiste, du point de vue américain, alors que le président sortant estampillé «néo-conservateur» est plutôt un homme de la droite religieuse américaine. Cela situe quelque peu les débats dans une Amérique qui n'arrive toujours pas à se défaire de ses démons. Issus du même milieu aisé de l'aristocratie bourgeoise de la côte Est, Bush et Kerry, des types «B.c.b.g.», ont suivi des chemins différents, quoique ayant fait leurs humanités dans les mêmes établissements scolaires et universitaires, notamment leur passage, tous les deux, par la prestigieuse université de Yale, de New Haven, près de Boston (capitale du Massachusetts). Ils ont fréquenté les mêmes clubs et fait partie des mêmes associations, dont l'énigmatique et secret club appelé «Skull and Bones» (littéralement Crânes et Tibias), dont plusieurs présidents américains, dont George Bush père, ont en été membres. Christine Ockrent écrit à leur propos : «En ce début de troisième millénaire, ce sont deux ‘‘brahmanes'', selon le jargon sociologique local, deux membres de la caste supérieure, deux fils de famille, qui vont se battre jusqu'au sang (...).» Et c'est effectivement ce que font depuis de longs mois les deux postulants à la Maison-Blanche qui s'étripent à qui mieux mieux. Bush-Kerry, les deux Amérique montre de l'intérieur les deux hommes, dont le vainqueur de la présidentielle de mardi, sera l'homme le plus puissant du monde. Leurs études, leurs amis, leurs faits d'armes, leurs épouses, leurs héritages, politique, social et financier (les deux candidats à la Maison-Blanche sont millionnaires parmi les citoyens américains les plus riches) expliquent quelque peu l'évolution des deux postulants vers les positions, irréconciliables, qui sont les leurs aujourd'hui. Il est vrai qu'un George W. Bush, a été pris en charge très tôt par un gourou de la droite pure et dure américaine, Karl Rove - inconnu du grand public, manipulateur-né et l'homme des coulisses est, dit-on, celui des coups tordus, dont la devise est «Attack !, Attack!, Attack!» - ancien conseiller du président Bush père, devenu le mentor et maître à penser du jeune Bush. Pris en main par un Karl Rove, George W. Bush l'est également par les religieux intégristes, d'où la religiosité apparente ,ces dernières années, du président sortant, notamment depuis les attentats anti-américains du 11 septembre 2001. Catholique pratiquant, John Kerry est plus discret dans ce domaine. Dans son ouvrage, qui fourmille de détails qui aident à avoir une meilleure vision des deux hommes qui postulent à «gouverner le monde» (ce qui est un peu le cas en fait au regard de la position qui est celle des Etats-Unis sur l'échiquier politique international), Christine Ockrent suit à la trace George Walker Bush et John Forbes Kerry, restituant leurs faits et gestes et éclairant un scrutin qui n'intéresse pas uniquement les Américains.