D'une initiative à l'autre ce leader politique veut unir le courant islamiste en profitant de l'ambiance anti-moderniste suscitée par certains ministres. Lancée il y a quelques semaines par certains islamistes, à leur tête Abdallah Djaballah, l'initiative visant à réunir toute la famille islamiste ne semble pas aller bon train. A peine rendue publique, plusieurs leaders islamistes, notamment du MSP, d'El Islah et d'Ennahda se sont déclarés non concernés. Sur le plan médiatique, la chronique n'a pas été défrayée. Conscient de cette frilosité de la classe politique face à ce type d'initiative «trop idéologique», le président du Front de la justice et du développement, et ses amis, ne comptent pas jeter l'éponge de sitôt et s'agitent tous azimuts pour expliquer leur démarche. Lors d'une rencontre qu'il ont organisée il y a quelques jours au siège du FJD, ils ont longuement expliqué leur initiative en précisant notamment qu'elle n'émane pas d'un ou de plusieurs partis politiques mais de militants islamistes et en dehors de tout cadre partisan. «Notre initiative émanant d'un groupe d'individus et non pas de partis ou d'autres structures politiques, se veut un appel à tous les Algériens à leur tête les acteurs politiques, y compris les représentants de l'Etat. En d'autres termes, elle s'adresse à tous les enfants du projet islamique que représentent tous les croyants en l'islam comme religion de l'Etat, sans distinction ni préférence. Ce sont tous ces segments-là que nous appelons à adhérer à notre projet pour l'ouverture d'un débat, à dialoguer et à se concerter pour dégager une feuille de route à suivre pour sortir le pays de la crise», ont expliqué Abdallah Djaballah, Mohamed Boulahya et Abdelmostapha Ghazal dans leur plaidoyer pour le rassemblement de toux ceux qui croient en l'islam dans un seul pôle. Pourquoi donc les islamistes version Djaballah, dont le parcours politique est ponctué de toutes sortes d'échecs, veulent-ils créer un pôle regroupant exclusivement les partisans du projet islamiste au moment où l'ensemble de la classe politique nationale recommande la mise en place d'une démarche consensuelle dans le traitement de toutes les questions engageant l'avenir du pays? Pourquoi un pôle politique islamiste au moment où la société est traversée par une multitudes de conflits d'ordre idéologique, notamment la question de la violence contre les femmes, l'introduction des langues maternelles dans le système éducatif et le statut du français en Algérie? Autant de questions dont les réponses constituent sans nul doute les raisons fondamentales qui ont poussé certains leaders islamistes à opter pour l'unification de la famille anti-laïque d'autant plus que, même pour une simple couverture médiatique, les promoteurs de cette démarche ont exclu la presse réputée républicaine. En effet, face à la marginalisation qu'ils subissent dans le cadre de la Coordination nationale pour les libertés et la transition démocratique (Cnltd) en raison de leur non-maîtrise du jargon inhérent à la démocratie et aux droits de l'homme, certains islamistes n'ont pas trouvé mieux que de se tailler un nouveau destin en dehors du conglomérat de l'opposition afin de peser sur la scène politique. Néanmoins, leur influence dans la société se réduisant comme une peau de chagrin, ce qui s'est vérifié par le recul massif de leurs scores électoraux, après des lustres de surenchère islamiste plutôt stérile, il était urgent pour eux de se remobiliser afin de créer un nouveau rapport de force en faveur de leur projet. Le choix du moment en est d'ailleurs un parfait indicateur. En effet, bien qu'engagé dans le cadre de la Cnltd dont le projet est présenté par ses membres comme étant une priorité nationale, Abdallah Djaballah a lancé son initiative d'unification du courant islamiste et, qui plus est, en plein été pour surfer sur la vague de colère d'obédience islamiste qui souffle sur la société, suite à l'offensive moderniste enregistrée dans certains secteurs, notamment le commerce, l'éducation et la justice, et semble résolu à en faire une priorité. D'ailleurs, les initiateurs de ce projet n'ont pas hésité à clamer, à chacune de leur sortie médiatique, que «l'adhan a sonné pour les partisans du projet islamiste». C'est dire que les islamistes ont bien tâté le terrain et ont constaté que leurs partisans potentiels sortent massivement de leur tanière suite aux décisions prises récemment par l'ex-ministre du Commerce, Amara Benyounès, le ministre de la Justice, Tayeb Louh, ainsi que la ministre de l'Education nationale, Nouria Benghebrit qui représente un abcès de fixation pour l'ensemble des milieux islamo-conservateurs. Alors Djaballah et ses amis vont-ils tirer bénéfice de cette situation et réussir leur pari d'unification de la famille islamiste ou alors essuyer, encore une fois, un énième échec comme le présage d'ores et déjà la frilosité affichée par leurs cibles potentielles?