On le sait de longue date déjà, mondialisation veut dire américanisation, c'est-à-dire extension de l'hégémonie américaine aux quatre coins de la planète. Le monde arabe et musulman, qui va du Maroc à l'Afghanistan, pudiquement classé par Bush dans son projet de Grand Moyen-Orient, n'échappe pas à cette logique et à cette vision américano-centristes. Ce projet épouse étrangement ce qu'on appelle la route de la soie, et il est aujourd'hui la route du pétrole, avec ses oléoducs, ses gazoducs, toutes les voies de communication qui regorgent de cette énergie dont ont besoin l'Occident autant que la Chine. L'oncle Sam tient à contrôler cette route du pétrole, et cela quel que soit le nom du locataire de la Maison-Blanche. On doute que la victoire de Kerry aux élections du 3 novembre, puisse apporter un changement profond sur cette question. Pendant longtemps, des régimes autocratiques dociles et corrompus ont été les alliés objectifs des Etats-Unis, mais la poussée des nationalismes intégristes ou baasistes a commencé à inquiéter sérieusement les Etats-Unis. La première menace était venue de Mossadegh, premier ministre iranien au début des années cinquante, qui s'opposa au chah et prôna la nationalisation des hydrocarbures. Son arrestation mit fin à son aventure nationaliste, mais à la fin des années soixante, l'expérience des étatisations du pétrole fit tâche d'huile dans des pays aussi différents que l'Algérie, la Libye, l'Arabie Saoudite, L'irak. La création de l'Opep puis le premier choc pétrolier en 1973, pour punir le soutien apporté à Israël par les pays occidentaux lors de la guerre d'octobre, Amérique en tête, avaient poussé les Etats-Unis à réfléchir à une stratégie à mettre en place pour venir à bout de cette rébellion des pays arabes et musulmans producteurs de pétrole. Les occasions n'ont pas manqué, tant la région du Moyen-Orient, du fait du conflit israélo-palestinien et des différences idéologiques induites par la montée du Komeinisme, est une poudrière prête à exploser à tout moment. Il fallait dans un premier temps contenir l'ascension des Ayatollah en poussant Saddam Hussein à leur faire la guerre. Ensuite, c'est l'invasion du Koweit par ce même Saddam Hussein, qui offrira le prétexte à Bush père pour venir installer ses bases militaires en Arabie Saoudite et aux Emirats, car le but porte sur le contrôle militaire direct des ressources énergétiques. Oussama Ben Laden, depuis les attentats du 11 septembre, est en train de sous-traiter la dernière partie de cette mainmise américaine sur le pétrole en tendant une perche idéale aux faucons de la Maison-Blanche et du Pentagone pour asseoir leur suprématie sur les plus importantes réserves d'énergie que la terre porte dans ses entrailles. Après la chute du régime des Talibans en Afghanistan et celui de Saddam Hussein en Irak, les forces armées américaines sont plus que jamais présentes sur le sol arabe et musulman. Près de 200.000 GI's et Marines, avec leurs missiles, leur porte-avions, leurs radars, leurs armes à infrarouge et toute leur armada sophistiquée, veillent sur les puits de pétrole et les réseaux de son acheminement dans les raffineries des pays industrialisés. Bien sûr les Etats-Unis ne disent pas : on va envahir telle partie du monde pour piller ses richesses, mais ils expliquent qu'ils sont en guerre contre les forces du mal, qu'ils veulent détruire les armes de destruction massive, qu'ils veulent instaurer la démocratie dans cette partie du monde.Du reste, les pays arabes, y compris les plus modérés et réputés les pour proches de Washington, comme l'Egypte ou l'Arabie Saoudite, ont exprimé leurs réserves ou carrément leur hostilité au projet de Grand Moyen-Orient, refusant même d'assister à la réunion du G8 consacrée à cette question. L'Otan, où les pays européens membres de l'UE sont majoritaires, a montré sa tiédeur à un projet qui vise à l'éjecter du contrôle des puits de pétrole. Mais les Américains n'ont pas dit leur dernier mot.