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Israël et Washington préparent l'après-Arafat
ALORS QUE LE LIEU DE SON ENTERREMENT POSE TOUJOURS PROBLEME
Publié dans L'Expression le 08 - 11 - 2004

Tsahal a poussé Sharon à prendre langue avec Mahmoud Abbas, successeur naturel du Vieux Lion.
Comme nous l'écrivions dès l'annonce de l'agravation de l'état de santé d'Arafat, celui-ci a forcément été empoisonné. Le crime, puisque crime il y a, comme le suppose à présent Ahmed Qoreï lui-même, a profité aux ennemis jurés du père spirituel de la cause nationale palestinienne. Ainsi, si Israël prépare déjà l'après-Arafat, refusant toujours que ce dernier soit enterré à El-Qods, Washington n'exclut pas, à son tour, un réchauffement entre elle et l'autorité palestinienne. Pendant ce temps, les informations relatives à l'état de santé du président palestinien se font de plus en plus rares et contrôlées, dans un pays qui se trouve être un des plus sévères en la matière. La supposition la plus plausible, dans l'état actuel des choses, est qu'Arafat doit être mort et que les dirigeants palestiniens, ainsi que les capitales occidentales, doivent être en passe de régler la succession sans violence, mais aussi les obsèques du Vieux Lion, très probablement au niveau de la Bande de Ghaza, comme l'a ostensiblement noté Ariel Sharon. Sur le plan diplomatique, donc, des «fuites» organisées par la Maison-Blanche et le Département d'Etat sous le couvert de «paroles d'experts», «la direction palestinienne qui se met en place en l'absence de Yasser Arafat devrait rétablir son dialogue avec les Etats-Unis dans la perspective d'une relance du processus de paix au Proche-Orient».
Une source a ainsi souligné qu'«il est parfaitement clair que la direction palestinienne post-Arafat, et, particulièrement (l'ancien Premier ministre) Mahmoud Abbas, entend travailler avec les Etats-Unis». La source, toutefois, n'explique pas pourquoi cette analyse est faite avec autant d'anticipation de mauvais aloi, ni pourquoi Arafat, prix Nobel de la paix, ne serait pas apte à mener un dialogue avec Washington et l'entité sioniste pour peu que ces dernières fassent montre d'un peu de bonne volonté au lieu d'opposer un veto sans faille à l'empêchement des crimes de Sharon pour la première, et l'encouragement des colonies et des assassinats et crimes contre l'humanité pour la seconde.
Ce samedi, l'OLP, qui s'est réunie en l'absence de Yasser Arafat, a lancé un premier signe en direction de Washington en félicitant le président américain George W.Bush pour sa réélection.«Le comité exécutif de l'OLP (Ceolp) a adressé ses félicitations au président Bush pour sa victoire aux élections et nous espérons être en coordination avec la nouvelle administration pour réaliser sa vision de deux Etats» pour une solution du conflit israélo-arabe, a en effet déclaré à des journalistes Tayeb Abdelrahim, secrétaire de la présidence de l'Autorité palestinienne.
Ce communiqué, publié après la réunion du Ceolp à Ramallah, présidée par M.Abbas, numéro deux de l'OLP, est d'autant plus significatif, estiment les analystes, qu'il s'adresse à un président qui a délibérément ignoré M.Arafat, refusant notamment de le recevoir à la Maison-Blanche pendant toute la durée de son premier mandat.
Abbas n'en maintient pas moins qu' «il est urgent de revenir au plan de paix original, à la Feuille de route». «Celle-ci a été acceptée par tout le monde. Les Palestiniens, les Israéliens et le Quartette», a-t-il ajouté.
Mahmoud Abbas (alias Abou Mazen) avait été reçu en juillet 2003 par le président Bush à Washington. Le mois précédent, il participait au sommet tripartite d'Aqaba (Jordanie), avec le président Bush et le Premier ministre israélien Ariel Sharon pour le lancement officiel de la Feuille de route. Ce plan est resté lettre morte depuis que M.Abbas a abandonné ses fonctions de Premier ministre en septembre 2003. Celui-ci apparaît aujourd'hui comme le dirigeant palestinien de premier plan de l'après-Arafat.
De son côté, le Premier ministre israélien Ariel Sharon semble être soumis à des pressions de l'armée pour engager un dialogue avec Mahmoud Abbas, qui dirige de fait l'Autorité palestinienne en l'absence de Yasser Arafat.
Selon les médias locaux, extrêmement vitriolés par rapport à la maladie d'Arafat, les responsables militaires estiment que M.Sharon doit faire des «gestes» pour aider M.Abbas ainsi qu'Ahmad Qoreï, le Premier ministre actuel, à «assurer leur pouvoir» afin d'éviter que les territoires palestiniens plongent dans le chaos. Avant même la brusque dégradation de l'état de santé du président de l'Autorité palestinienne, le général Moshe Yaalon, chef d'état-major israélien, avait déploré en juillet dernier en termes à peine voilés, l'intransigeance dont avait fait preuve Sharon vis-à-vis de M.Abbas, partisan déclaré de l'arrêt de la lutte armée. Une preuve de plus que le Mossad ne saurait être tout à fait étranger à l'empoisonnement dont a été victime le président palestinien.
Les Palestiniens, pour leur part, ont tenu hier une série de rencontres au plus haut niveau dans le but d'assurer un transfert normal du pouvoir et d'éviter un déferlement de violences après l'éventuelle annonce de la mort de leur dirigeant Yasser Arafat. Le Premier ministre Ahmad Qoreï, qui assure l'intérim du président de l'Autorité palestinienne hospitalisé depuis le 29 octobre dans un hôpital proche de Paris où il est entre la vie et la mort, a réuni à Ramallah, en Cisjordanie, le Conseil national de sécurité.
Dans la soirée d'hier, le mouvement Fatah de M.Arafat, principale composante de l'OLP, devait se réunir sous la direction de l'ex-Premier ministre Mahmoud Abbas. Abbas et Qoreï devaient en outre avoir des discussions dans la soirée avec les chefs de divers groupes armés, notamment le Front populaire de libération de la Palestine (Fplp) et le Front démocratique pour la libération de la Palestine (Fdlp). Il n'est pas question, en revanche, que les mouvements islamistes, notamment le Hamas, soient inclus dans la nouvelle coalition gouvernementale. Israël, qui avait donné naissance au Hamas du temps où il fallait encourager l'islamiste contre les révolutionnaires du Fatah et du Fdlp, se livre à présent à un innommable terrorisme d'Etat en assassinant l'ensemble des dirigeants de ce groupe que dirige le libanais Khaled Mechaâl.
A la lumière de ces développements, il apparaît clairement que tout un chacun prépare l'après-Arafat dont on commence même à parler au passé. Le parcours et l'image d'Abou Ammar n'en font pas moins un géant qui continuera de donner des cauchemars au criminel Sharon et à ses sbires très longtemps après sa mort.


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