Un retour sur les années précédentes explique pourquoi ce mois est synonyme d'attentats dans la mémoire collective des Algériens. Depuis l'arrêt du processus électoral en janvier 1992, le mois de Ramadan a constitué un rendez-vous où la barbarie terroriste a accompli les plus ignobles massacres connus par l'humanité. Le citoyen algérien appréhende, depuis, l'arrivée de ce mois de piété, tant les souvenirs font remonter à la surface des atrocités faites de sang. Deux repères indélébiles sont inscrits dans la mémoire collective des Algériens, l'attentat à la bombe commis au boulevard Amirouche à la veille du Ramadan 1995 et qui a coûté la vie à une centaine de personnes, et le massacre de 318 autres à Sidi Youcef durant le Ramadan 1997. Le bal macabre a été ouvert durant l'année 1993. Les terroristes, alors enthousiasmés par le djihad et forts d'un soutien logistique acquis après la gestion de la plupart des APC, ont fait de ce mois une échéance de «sacrifice» et de djihad contre les «mécréants» qu'étaient les Algériens qui ne pensaient pas comme eux. En 1994, l'horreur est apparue sans voie, particulièrement avec le GIA de plus en plus assassin, et les prémices des Ramadan rouges devenaient, de plus en plus, effectives. L'Algérie s'enfonce en 1995 dans un terrorisme urbain sans précédent. Le Ramadan 1995 s'annonce avec l'horreur de la bombe du boulevard Amirouche, suivie d'assassinats et d'attentats presque quotidiens durant ce mois de jeûne. Les bourreaux n'ont pas manqué le rendez-vous du Ramadan 1996. Le terrorisme urbain fut porté à son apogée par des attentats à la bombe et voitures piégées. Les services de sécurité semblaient, dans certains cas, dépassés devant cette situation à laquelle ils n'étaient pas rompus. De 1997 à 1999, toujours au Ramadan, on assiste à un deuxième acte de l'horreur. Le terrorisme fauchait des familles entières. Une simple rétrospective sur les mois de jeûne de ces années explique pourquoi les Algériens appréhendent l'arrivée du mois sacré, devenu dans leur mémoire inhérent aux massacres. 318 personnes massacrées à Sidi Youcef, 29 assassinées à Ouled Sahnine, dans la wilaya de Relizane, 28 à Ouled Tayeb, 21 au douar Kherarba, dans la même wilaya, et 23 autres à Bouguerra, dans la wilaya de Bouira. Tel est le bilan très approximatif des massacres du Ramadan 1997. Loin d'être exhaustive, la liste des massa- cres du Ramadan 1998 rappelle ces tristes souvenirs: 103 personnes massacrées à coups de hache entre Meftah et Larbaâ, 20 à Haouch Mecharef (Tiaret), et 11 à Bordj Akhris (sud-est de Blida). Avec la même atrocité, les terroristes massacrent 11 personnes à Bou Ismaïl (Tipasa), d'autres à Chlef, Aïn Defla au Ramadan 1999. La récurrence des massacres et des attentats est devenue presque un fait durant le Ramadan. Si la courbe est descendante de 1999 à 2001, il n'en demeure pas moins que des attentats, enregistrés à chaque fois, viennent rappeler que les terroristes peuvent frapper. L'année 2001 vient de connaître un contexte nouveau dans la lutte antiterroriste, cette nouvelle donne peut, à elle seule, inciter les assassins à manifester leur existence par des attentats spectaculaires et médiatiques. La seule arme efficace demeure la vigilance.