Mohamed Ibn Chambas (à g), représentant de l'ONU pour l'Afrique de l'Ouest, le président du Bénin Thomas Boni Yayi (2e à g) et le général putschiste Gilbert Diendéré (2e à d) à la sortie d'une réunion à Ouagadougou Dans l'attente d'une annonce, la tension est montée d'un cran à l'hôtel Laico où se trouvaient les négociateurs, et où une centaine de sympathisants du général Diendéré ont fait irruption hier. Les protagonistes de la crise au Burkina Faso discutaient hier à Ouagadougou avant de dévoiler les grandes lignes du plan de sortie de crise, née du coup d'Etat du 17 septembre, devant permettre le «retour» des institutions en place avant le coup de force du général Gilbert Diendéré. Dirigée par la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cédéao), la médiation avait entamé donné rendez-vous hier à 10H00 locales et GMT pour présenter son projet d'accord, après avoir multiplié les négociations marathon avec les acteurs de la vie politique et civile au Burkina depuis plus de 48 heures. L'annonce devait être faite à l'hôtel Laico à Ouagadougou, par le président sénégalais Macky Sall, président en exercice de la Cédéao, assisté du représentant de l'ONU en Afrique de l'Ouest Mohamed Ibn Chambas. Le général Diendéré - un proche du président déchu Blaise Compaoré - et des représentants de la classe politique et la société civile devaient également être présents. La présidence sénégalaise, qui conduit au Burkina Faso la médiation de la Cédéao, avait annoncé la veille travailler sur un scénario «qui pourrait très fortement conduire au retour» du président de la transition Michel Kafando. Le président béninois Boni Yayi, également médiateur, avait promis samedi soir «une bonne nouvelle» le lendemain, laissant entendre qu'il pourrait s'agir d'«un retour» aux institutions en place avant le coup de force du Régiment de sécurité présidentielle (RSP). Le général Diendéré s'était aussi montré rassurant samedi, déclarant: «Je n'ai jamais dit que j'allais conserver le pouvoir». Rien n'avait filtré en revanche sur les éventuelles garanties ou contreparties offertes aux putschistes. Dans l'attente d'une annonce, la tension est montée d'un cran dans l'hôtel Laico où se trouvaient les négociateurs, et où une centaine de sympathisants du général Diendéré ont fait irruption hier, saccageant le mobilier du hall et chassant à coup de cordelettes des anti-putschistes et des journalistes rassemblés devant l'établissement, ont constaté des journalistes. Juste avant que les violences n'éclatent, d'autres sympathisants du mouvement «Balai citoyen», - en pointe dans le soulèvement populaire contre le président Compaoré en 2014 - s'étaient pressés devant le même hôtel avant d'être dispersés par des forces de l'ordre. Initialement, le «Balai Citoyen» avait appelé à un rassemblement sur la place de la Révolution dans le centre de la capitale pour «maintenir la pression» jusqu'au moment de l'annonce du plan de sortie de crise des médiateurs. Mais des soldats à bord de pick-up ont été positionnés pour éviter tout rassemblement aux abords de cette place, épicentre de la contestation qui avait conduit à la chute du président Compaoré après 27 ans au pouvoir. Selon un dernier bilan hospitalier samedi, les violences qui ont accompagné le coup d'Etat ont fait au moins 10 morts et 113 blessés. La nuit a été calme, après qu'un peu partout à travers le Burkina Faso, des habitants, souvent des jeunes, ont érigé des barrages routiers et brûlé des pneus, paralysant la circulation et le pays pour mettre la pression sur les putschistes. Le 17 septembre, des hommes du RSP ont renversé les institutions de transition du Burkina Faso, avec à leur tête le général Diendéré. Très proche de Compaoré dont il a été pendant des années le chef d'état-major personnel et commandant du RSP, le général Gilbert Diendéré reproche aux autorités installées après la chute en octobre 2014 du président Compaoré d'avoir dévoyé la transition, notamment en excluant les partisans de l'ex-homme fort des prochaines élections. L'Union africaine a annoncé vendredi la suspension du Burkina Faso ainsi que des sanctions à l'encontre des putschistes, frappés d'une interdiction de voyager et d'un gel des avoirs dans tous ses Etats membres.