Les condamnations unanimes de la communauté internationale du coup d'Etat opéré mercredi au Burkina Faso n'ont pas fait reculer les putschistes, lesquels se sont limités à promettre d'organiser "rapidement" des élections prévues à l'origine en octobre prochain. En attendant, ils ont annoncé hier matin qu'"en signe d'apaisement et d'intérêt général, le Conseil national pour la démocratie a décidé la libération des ministres et la libération de Michel Kafando". Ainsi, le président de la transition du Burkina Faso, Michel Kafando, qui était séquestré par les militaires qui l'ont destitué, a été libéré jeudi soir, mais pas son Premier ministre Isaac Zida, ont annoncé hier les putschistes dans un communiqué. Les dirigeants de la transition burkinabè étaient retenus depuis mercredi après-midi par des soldats qui avaient fait irruption en plein Conseil des ministres. Aux dernières nouvelles, seul le Premier ministre Isaac Zida n'a pas été libéré et reste "en résidence surveillée", a précisé à des journalistes le nouvel homme fort du Burkina, le général Gilbert Diendéré, qui a officiellement pris la tête des putschistes jeudi. Pour rappel, le lieutenant-colonel Zida est l'ancien numéro deux du Régiment de sécurité présidentiel (RSP), l'unité d'élite de l'armée qui a perpétré ce nouveau coup d'Etat. Il avait été porté au pouvoir l'an dernier après la chute du président Blaise Compaoré. Perçu comme l'homme de l'armée au sein de la transition, le Premier ministre a vu ses relations avec le RSP se brouiller rapidement, au point que des officiers supérieurs de ce régiment avaient exigé sa démission à plusieurs reprises cette année, provoquant même des troubles. Ceci étant, la libération des dirigeants de la transition, qui était exigée depuis mercredi par la communauté internationale, a bien eu lieu, mais les putschistes se maintiennent au pouvoir, en dépit des condamnations unanimes de toutes les instances internationales. Dans l'espoir de faire plier les chefs putschistes, deux chefs d'Etat africains étaient attendus hier à Ouagadougou, dans l'espoir de convaincre Gilbert Diendéré de rendre le pouvoir aux dirigeants de la transition. Il s'agit du président sénégalais Macky Sall, dirigeant en exercice de la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (Cédéao), et de son homologue béninois Thomas Boni Yayi. Pour rappel, M. Sall avait déjà été l'émissaire de la Cédéao lors du soulèvement populaire qui avait chassé du pouvoir en octobre 2014 le président Compaoré après 27 ans à la tête du pays. Et M. Boni Yayi était le médiateur désigné par la Cédéao pour les élections présidentielle et législatives qui étaient programmées le 11 octobre. À Ouagadougou, la circulation était moins intense que d'habitude, mais avait repris tout de même hier matin, bien que de nombreux magasins restaient fermés. La ville n'était plus étroitement quadrillée, comme la veille, par les hommes du RSP, qui avaient tiré jeudi pour disperser les attroupements, faisant au moins trois morts et une soixantaine de blessés, selon une source hospitalière. Par contre, des manifestants se sont rassemblés dans plusieurs villes de province pour protester contre le putsch, notamment à Bobo Dioulasso à l'ouest, deuxième ville du pays, et Fada-Ngourma à l'est. Les protestations se sont déroulées sans incidents, les forces de l'ordre n'ayant pas cherché à intervenir. L'armée, la police et la gendarmerie sont restées très discrètes depuis le coup d'Etat. À signaler enfin que les frontières terrestres et aériennes du Burkina Faso ont été rouvertes hier à 12h00 (locales et GMT). M.T.