Moscou et Téhéran ne veulent pas lâcher Bachar al Assad L'Algérie et la Russie partagent le souci d'une solution politique «urgente» à la crise en Syrie «dont les conséquences humanitaires et sur la sécurité de la région sont énormes». L'Algérie et la Russie ont insisté sur la nécessité de trouver une solution politique «urgente» à la crise en Syrie «dont les conséquences humanitaires et sur la sécurité de la région sont énormes», selon un communiqué du ministère des Affaires étrangères. C'est dire combien la question syrienne est devenue un enjeu primordial pour le président Poutine annoncé demain à Paris, pour «relancer les accords de paix en Ukraine, qui peinent à se concrétiser» avec ses homologues français et ukrainien ainsi que la chancelière allemande Angela Merkel. Entre-temps, le président russe a obtenu du Sénat l'aval pour un engagement militaire contre Daesh en Syrie, ce qui donne le signal de grandes manoeuvres au Moyen-Orient. Ce sommet à Paris va couronner une intense semaine diplomatique sur le dossier syrien, marquée par le retour spectaculaire du président russe Vladimir Poutine sur le devant de la scène internationale. La Russie était quelque peu isolée depuis les affrontements entre pro-Russes et pro-Occidentaux en Ukraine, mais elle entend désormais profiter de son statut d'arbitre dans le conflit syrien, manifeste à la tribune de l'ONU, pour tenter d'atténuer les pressions économiques exercées à son encontre. L'intransigeance affichée par Vladimir Poutine sur le sort de Bachar al Assad et sa poignée de main glaciale avec le président américain Barack Obama ont ébranlé les certitudes européennes et on a vu, du coup, le président français François Hollande multiplier les arguments en faveur de la mise hors jeu du chef de l'Etat syrien, alors que le chef de la diplomatie Laurent Fabius ironisait sur la propension de la Russie à discourir au lieu de frapper Daesh. Mais, par sa démarche, Poutine a mis à nu la nature et les objectifs inavoués de la coalition internationale et de l'intervention française en Syrie, indiquant que la Russie «n'interviendra pas sans un mandat de l'ONU» et que tous les bombardements ne serviront à rien, sans la prise en compte effective de l'armée syrienne, c'est-à-dire du régime de Bachar al Assad. C'est d'ailleurs à la demande express de ce dernier que Moscou a commencé hier ses bombardements de certaines positions terroristes. Moscou a sensiblement renforcé sa présence militaire en Syrie, fournissant les équipements de guerre et aménageant la zone de Lattaquié, en plus de la base de Tartous, une façon comme une autre d'adresser un message sur ses intentions dans un pays éminemment stratégique par rapport à ses intérêts dans la région. Reste la vision politique, diamétralement opposée, et le tête-à-tête Poutine-Obama n'a pas permis de rapprocher les points de vue sur la transition en Syrie. Pour Obama, Assad est un «tyran» qui massacre des enfants innocents. Pour son homologue russe, il représente un gouvernement légitime avec lequel refuser de coopérer serait une «énorme erreur». Poutine a appelé, à la tribune des Nations unies, à une «large coalition antiterroriste», semblable à «celle contre Hitler» au cours de la Seconde Guerre mondiale. «Nous devons reconnaître que personne d'autre que les forces armées du président (syrien) combattent réellement l'Etat islamique», a lancé le chef du Kremlin. Obama avait pourtant laissé entendre la possibilité de travailler avec la Russie et l'Iran, en vue de combattre l'EI en Syrie et en Irak. L'échec de la coalition qui regroupe une soixantaine de pays européens et arabes est patent et les frappes n'ont pas freiné la progression de l'EI. Daesh continue de consolider ses positions, et multiplie aussi son pouvoir d'attraction, au point de recruter 30 000 «djihadistes» étrangers depuis 2011, selon les chiffres du renseignement américain Par ailleurs, le soutien du régime de Téhéran au président Bachar al Assad, s'il conforte la démarche de Poutine, n'est pas sans irriter les Européens, et surtout la France, qui craint que cette carte ne soit exploitée afin de desserrer l'étau des sanctions de l'UE contre la Russie, également intransigeante sur le dossier ukrainien. Pour le président Hassan Rohani, «si on retire le gouvernement syrien de l'équation, les terroristes entreront dans Damas». Et du fait d'un renforcement considérable des liens entre Moscou et Téhéran, notamment à la faveur des négociations sur le nucléaire iranien durant lesquelles la Russie a secondé puissamment son partenaire, il apparaît que la démarche de Vladimir Poutine va vite devenir incontournable. La preuve, tandis qu'en France on organise des procès pour crimes contre l'humanité ciblant le régime syrien, les forces russes stationnées en Syrie ont procédé, dès hier, à leur premier bombardement aérien près de la ville de Homs, en partie tenue par des milices et par Daesh. «Il faut prendre les terroristes de vitesse avant qu'ils n'arrivent chez nous», explique Poutine.