Tout en verrouillant l'accès à l'esplanade des Mosquées, le Premier ministre israélien s'indigne d'une idée française de présence internationale et accuse Paris de «récompenser le terrorisme» palestinien. Des juifs ultra-orthodoxes ont échappé hier à un lynchage en se rendant sans autorisation sur un site religieux en plein territoire palestinien, dans une illustration supplémentaire de tensions qui suscitent un sérieux différend entre Israël et la France. Ces étudiants d'une Yeshiva (école talmudique) de Jérusalem ont été soustraits par les policiers palestiniens à une foule en colère au tombeau de Joseph, site révéré par les juifs à Naplouse (nord de la Cisjordanie occupée) et lieu de tensions permanentes avec les Palestiniens qui vivent alentour. Malgré l'escalade qui a réveillé le spectre d'une nouvelle intifada, les étudiants avaient décidé de se rendre, sans coordination ni escorte israéliennes, sur ce site pour le restaurer. Le tombeau, qui abrite pour les juifs la dépouille de Joseph, l'un des douze fils de Jacob, avait été incendié vendredi matin par des dizaines de Palestiniens armés de cocktails Molotov. La Cisjordanie et El Qods-Est, terres palestiniennes occupées par Israël, sont en proie depuis deux semaines à des affrontements quotidiens entre lanceurs de pierres palestiniens et soldats israéliens, aux agressions mutuelles entre Palestiniens et colons, et à une vague d'attaques à l'arme blanche contre les forces de sécurité israéliennes et des colons. La bande de Ghaza a été aspirée dans cette spirale le 9 octobre. Depuis le début des attaques le 1er octobre, 41 Palestiniens ont été tués, dont plusieurs auteurs d'attaques, et des centaines d'autres blessés. Sept Israéliens sont morts et des dizaines ont été blessés. Quatre Palestiniens ont encore été tués samedi après avoir tenté de poignarder des Israéliens. Vu le contexte, la venue d'une trentaine d'étudiants israéliens au tombeau de Joseph était ́ ́totalement irresponsable ́ ́. La tombe présumée du Joseph de l'Ancien testament se trouve au coeur du camp de réfugiés palestiniens de Balata. Elle est située dans le périmètre sous le contrôle sécuritaire exclusif des forces palestiniennes et non pas des forces israéliennes. Les Israéliens ne peuvent s'y rendre sans autorisation ni coordination préalables. Les étudiants ont défié l'interdit et pénétré dans le caveau hier avant l'aube pour le repeindre, a rapporté la police. Selon l'armée israélienne, une ́ ́foule en colère ́ ́ de Palestiniens est arrivée et a commencé à les frapper. La plupart des étudiants ont réussi à s'enfuir, mais cinq d'entre ont été arrêtés par les policiers palestiniens qui les ont remis aux soldats israéliens. Le site est aussi vénéré par les musulmans, pour lesquels il abrite la tombe d'une figure religieuse locale, et par les samaritains, une secte séparée du judaïsme. Le risque que la confrontation ne prenne davantage une dimension religieuse alarme la communauté internationale. L'un des cris de ralliement pour les Palestiniens est la défense de l'esplanade des Mosquées à El Qods-Est. La question du contrôle de l'esplanade, troisième lieu saint de l'islam, est l'un des facteurs des tensions du fait des agressions permanentes de l'armée sioniste et des colons israéliens. Les Palestiniens accusent Israël de vouloir modifier les règles qui régissent l'esplanade et qui autorisent les juifs à s'y rendre à certaines heures, mais leur interdisent d'y prier. Les musulmans peuvent y prier à toute heure, mais sont régulièrement soumis aux restrictions de la part des Israéliens qui contrôlent l'accès à l'esplanade. Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu s'est toujours défendu contre ces accusations, assurant même qu'Israël «était le meilleur garant du statu quo». Mais il s'est indigné hier d'une idée française de présence internationale sur l'esplanade, allant jusqu'à accuser Paris de ́ ́récompenser le terrorisme ́ ́ palestinien, le but étant de poursuivre les provocations et les exactions dans un huis-clos renforcé. L'Etat hébreu continuait d'ailleurs à prendre des dispositions pour enrayer l'escalade des attaques, dont un renfort de 300 soldats attendus hier à El Qods. Parmi les autres mesures, le gouvernement sioniste a disposé des barrages filtrants aux accès d' El Qods-Est. Par ailleurs, le secrétaire d'Etat John Kerry a indiqué hier, dans un discours à l'Unesco, qu'il rencontrera dans les prochains jours l'israélien Netanyahu puis se rendra au Proche Orient pour discuter avec le président Mahmoud Abbas et le roi de Jordanie.