Des forces spéciales américaines en Syrie Les attaques contre la Maison-Blanche, accusée de naviguer à vue sur la Syrie, ne datent pas d'hier et sont nourries depuis au moins 2013 par les propres aveux d'impuissance de M. Obama à mettre fin au conflit. La décision inédite de Barack Obama de déployer des forces spéciales en Syrie est jugée insuffisante et trop tardive par des critiques du président américain qui déplorent son absence de stratégie à l'égard de ce pays ravagé par la guerre. Après quatre ans et demi de violences qui ont fait 250.000 morts et des millions de déplacés, Washington va envoyer au sol «moins de 50» membres des commandos d'élite qui ne combattront pas mais conseilleront les rebelles syriens en lutte contre l'armée arabe syrienne. Dans son effort de guerre contre le groupe jihadiste Etat islamique (EI), M.Obama, un grand sceptique de l'interventionnisme militaire, s'était jusqu'ici refusé officiellement à dépêcher des soldats sur le terrain, préférant des bombardements aériens dans le cadre d'une coalition internationale mise sur pied à l'été 2014. Stricto sensu, ce ne sera pas la première fois que des soldats en uniforme américain foulent le territoire syrien: des commandos ont mené des opérations secrètes pour tenter de sauver des otages et des agents de la CIA ont apporté des armes à la rébellion. La décision de déployer officiellement des soldats, un revirement pour le président Obama, n'a toutefois pas satisfait son opposition républicaine qui a hurlé que c'était «trop peu et trop tard». «Je crois que nous avons un président qui ne sait tout simplement pas ce qu'il fait», a taclé samedi sur CNN Donald Trump, en tête des sondages dans le camp républicain pour la présidentielle 2016. Un autre opposant acerbe à M.Obama, le sénateur John McCain, candidat à la présidentielle en 2008, a dénoncé une décision «malheureusement limitée (...) et insuffisante» prise par un «président (qui) n'a toujours pas de stratégie réaliste» et «cohérente» pour la Syrie. M.McCain, qui milite pour que son pays intervienne militairement à l'étranger, a accusé le locataire de la Maison Blanche de contribuer à «accélérer l'érosion de la crédibilité de l'Amérique». D'ailleurs, pour le sénateur républicain Lindsey Graham, ce ne sont pas 50 hommes des forces spéciales qui vont «intimider l'EI, qui y verra même un nouveau signe de faiblesse du président Obama». L'ancien «Monsieur Syrie» au département d'Etat, le diplomate Frederic Hof, pense aussi que «déployer une poignée de forces d'opérations spéciales en Syrie ne changera pas la situation de manière significative». «C'est un sparadrap, en quelque sorte, même s'il peut être utile», juge cet expert du centre Atlantic Council, exhortant son ex-administration à revoir sa stratégie en Syrie. Mais notre stratégie en Syrie n'a pas changé», se sont défendus vendredi la Maison Blanche et le département d'Etat, refusant d'admettre que le président Obama s'était clairement démarqué de ses déclarations depuis 2013. Il y a deux semaines, dans l'émission «60 minutes» de CBS, Barack Obama avait encore affirmé qu'«il n'y avait pas de solution miracle dans une situation aussi volatile et avec autant d'acteurs qu'en Syrie». «Ce que nous ne ferons pas, c'est d'essayer de nous réinsérer dans une campagne militaire en Syrie», avait martelé le lauréat 2009 du prix Nobel de la paix, qui refuse de réengager l'Amérique en première ligne dans un conflit au Moyen-Orient, après le retrait d'Irak et la réduction d'effectifs en Afghanistan. En août 2014, lors d'une conférence de presse restée dans les annales, M. Obama avait admis qu'il n'avait «as de stratégie» pour la Syrie. Il répétait alors inlassablement qu'il n'enverrait pas de «troupes américaines au sol» dans ce pays. En septembre 2013, il avait déjà consterné ses alliés - la France et les monarchies du Golfe notamment - en renonçant au dernier moment à frapper le régime syrien qui, selon les Occidentaux, aurait pourtant franchi une «ligne rouge» en utilisant l'arme chimique. Aujourd'hui, alors que l'EI contrôle une partie de la Syrie, résiste depuis un an aux frappes de la coalition dirigée par Washington et subit depuis un mois celles de l'aviation russe, le secrétaire d'Etat John Kerry a assuré samedi que son pays n'avait «pas décidé d'entrer dans la guerre civile syrienne».