«Les mouvements terroristes internationaux, comme ceux qui sévissent en Syrie et ailleurs dans le Moyen-Orient ou le monde musulman, sont des héritiers d'Al Qaîda. Les Etats-Unis n'ont pas de raison de ne pas s'en servir, tout en sachant que ce n'est pas leur modèle social.» Michel RAIMBAUD Avec ce qui se passe, présentement, en Palestine occupée, je ne peux m'empêcher de revenir sur l'entretien que m'a accordé au Sila 2015, l'ancien ambassadeur français en Mauritanie, au Soudan et au Zimbabwe, l'écrivain Michel Raimbaud. Ayant déjà consacré une présentation de son livre Tempête sur le Grand Moyen-Orient un ouvrage où j'avais déjà mis l'accent sur le projet élaboré par les néoconservateurs américains qui a non seulement déstabilisé le Monde arabo-musulman, mais aussi affecté certains pays européens parmi lesquels la France. Pour l'ancien ambassadeur français au Soudan, Israël est derrière toutes les crises du Monde arabe, toujours à l'affût. La sécession du Sud-Soudan est un triomphe de la diplomatie américaine et israélienne: «Il fallait transformer le Sud-Soudan en base israélienne, pour le complot contre ce qui reste du Soudan. Ils veulent l'affaiblissement de ce pays non pas parce qu'ils sont islamistes, mais parce qu'ils ont soutenu Saddam. Ils ne veulent pas la peau de Tourabi ou Al-Bechir, ils veulent couper le Soudan en morceaux. Ils ont réussi, et cela continue avec le Darfour.» A la question toute sibylline de savoir quelles sont les motivations qui poussent les Américains et l'Occident à soutenir les organisations terroristes, Michel Raimbaud est des plus catégoriques: «Globalement, les Américains sont ceux qui commandent et ont mis en oeuvre une stratégie du chaos. Ils ont continué à soutenir les gens d'Al-Qaîda, dont ils sont les créateurs avec l'Arabie saoudite et le Pakistan. Puis, quand ils n'en ont plus eu besoin, ils les ont laissé tomber en leur disant 'débrouillez-vous''. Les mouvements terroristes internationaux, comme ceux qui sévissent en Syrie et ailleurs dans le Moyen-Orient ou le monde musulman, sont des héritiers d'Al Qaîda. Les Etats-Unis n'ont pas de raison de ne pas s'en servir, tout en sachant que ce n'est pas leur modèle social.» En d'autres termes, ils les utilisent puis, quand ils ne s'en servent plus, ils les «bombardent», croit savoir la même source. Il aura fallu la nouvelle donne syrienne pour qu'un sérieux frein soit mis à l'arrogance impérial-sioniste dans la région. Grâce à deux pays, la Chine et la Russie qui seront amenées par quatre fois à mettre leur véto contre une résolution sur la Syrie. Du reste, l'ancien ambassadeur français avoue ne pas comprendre que les Occidentaux aient feint d'ignorer les raisons d'une telle position commune aux deux pays qui, floués par l'intervention fomentée et armée par le bloc occidental en Libye, s'étaient jurés de ne plus cautionner des résolutions à la libyenne. L'attitude sino-russe, consacrée par l'intervention de l'armée de Poutine contre le Daesh, n'a pas manqué d'ébranler l'hégémonisme impérialo-sioniste. Le pseudo «Printemps arabe» n'aura pas fait long feu, à plus forte raison lorsque la «ceinture verte ou islamique», ardemment souhaitée par le complexe militaro-industriel américanosioniste, aura été conçue, mise en scène pour neutraliser ces forces contraires que sont la Chine, la Russie et les pays émergents qui rejettent l'hégémonisme occidental. Pour Michel Raimbaud, la naissance de ce concept appelé «Printemps arabe» est le fait d'intellectuels et de journalistes français: «Il se réfère aux printemps démocratiques, celui de 1848 qui a tenté de bousculer les vieilles monarchies européennes vermoulues, le printemps de Prague en 1968, Mai-68 en France... Cette assimilation historique est un peu hâtive. Sans compter qu'en Tunisie, le printemps du jasmin, c'était en hiver!» Aussi paradoxal que cela puisse paraître, le mérite des désillusions impérialistes revient à la combativité du peuple syrien et à la solidarité agissante de la Russie. La même source estime d'ailleurs que c'est la Syrie qui est à l'origine du jaillissement de la nouvelle donne internationale. C'est l'épicentre d'un conflit global: «Si le gouvernement légal de la Syrie était tombé comme les autres auparavant, ou si le régime avait été renversé comme celui de Kadhafi, il y aurait eu d'autres printemps arabes. Mais la Syrie en a été le coup d'arrêt. Les Russes ne voulaient pas tant soutenir la Syrie, mais ils y ont trouvé un partenaire, un point d'ancrage solide. Avant l'Ukraine... Ils ont cultivé l'alliance et rameuté les Bric autour d'eux, à commencer par la Chine.» Quatre vetos sur la Syrie: la Chine garde un profil discret, mais ferme. Impressionnant. Au summum de la crise sur les armes chimiques en Syrie, en 2013, il y avait certes les gesticulations russes et américaines, mais il y avait aussi des navires de guerre chinois au large des côtes syriennes. C'est une première et cela devrait faire réfléchir les Occidentaux, avertit la même source. [email protected]