Bakhti Belaïb - Abderrahmane Benkhalfa M.Benkhalfa anticipe sur le Parlement en annonçant l'augmentation des prix du gaz et des carburants avant de se raviser et M.Belaïb affirme que le montant de l'évasion fiscale est de 20 milliards de dollars avant de se rétracter Il y a des membres du gouvernement qui n'ont rien à dire mais qui le disent très bien. Le ministre du Commerce, Bakhti Belaïb et celui des Finances, Abderrahmane Benkhalfa ne font pas partie de ceux-là. Ils ont beaucoup de choses à dire mais le disent très mal. A tout seigneur tout honneur. Commençons par le grand argentier du pays, Abderrahmane Benkhalfa. Invité, en septembre dernier, à la Radio nationale Chaîne 3, à s'exprimer sur la bancarisation de l'argent de l'informel, il annonce un chiffre qui remet en cause celui avancé, quelques semaines auparavant par son Premier ministre, Abdelmalek Sellal. Après avoir entamé l'opération en août dernier, le Premier ministre a avancé le chiffre de 3700 milliards de dinars, soit l'équivalent de 40 milliards de dollars, comme étant la masse financière détenue par les magnats de l'informel et qui est donc censée être totalement bancarisée au terme de cette opération. Non, rectifie le ministre des Finances estimant que «les 3700 milliards de dinars sont un chiffre agrandi». C'est le premier couac, et ce ne sera pas le dernier, car quand on déjuge publiquement le Premier ministre, cela signifie que le gouvernement n'accorde pas bien ses violons. La deuxième sortie du ministre des Finances, est intervenue le 2 novembre dernier quand il a annoncé que les tarifs de l'électricité et les prix des carburants seront revus à la hausse dès 2016, comme le stipule la loi de finances. Rien que ça, alors que le projet de loi de finances 2016 n'a pas encore été adopté par les députés et les sénateurs. Une fort belle manière d'anticiper sur un vote positif des deux chambres du Parlement. La déclaration faite encore une fois sur la Radio nationale Chaîne 1, a soulevé un tollé chez certains députés. Les représentants du peuple crient au scandale dénonçant «le non-respect de la séparation des pouvoirs». M.Benkhalfa qui, pourtant maîtrisait parfaitement son sujet, a raté sa sortie dans la forme avant de capituler en public sur le fond. Ayant eu vent de la contestation des députés, il se rend au Parlement pour «faire amende honorable». M.Benkhalfa a rassuré «que les députés, selon les prérogatives que leur confère la loi, sont libres d'apporter des amendements. En ma qualité de représentant du gouvernement, je suis tenu de défendre la copie de l'Exécutif» a-t-il expliqué aux députés. Mais en termes de buzz médiatique, le ministre des Finances a un sérieux concurrent, son collègue du commerce, Bakhti Belaïb. Longtemps resté aphone, le ministre du Commerce fait sa propre rentrée médiatique en trombe. En octobre dernier, il annonce que les conditions d'un endettement extérieur sont «désormais réunies pour l'Algérie» et qu'il n'y a pas de raison de diaboliser «ce genre de crédit». Mieux encore, «beaucoup de nations sont endettées dans le monde, et très souvent, il s'agit de pays des plus riches. Et leur richesse a pour origine leur bon endettement». Il rebondit par une autre déclaration tout aussi tonitruante. M.Belaïb a jeté un pavé dans la mare en affirmant que le montant de l'évasion fiscale a été évalué à quelque 20 milliards de dollars. Face au tollé médiatique soulevé par ces déclarations, encore une fois sur les ondes d'une radio publique, M.Belaïb s'est défendu en affirmant qu'il y avait confusion dans l'interprétation de ses propos. «Dans mon esprit, le taux de 30% devrait être rapporté au montant global de la déclaration de la valeur (montant figurant sur la facture) faite par l'importateur incriminé et non au coût annuel global des importations.» Que ses propos soient mal transcrits, mal rapportés, mal interprétés ou à la limite «sortis de leur contexte», comme se justifient souvent les politiques, est concevable dans le monde médiatique, mais quand le ministre nous invite à lire dans son esprit est un exercice périlleux. Encore que cela n'exonère par le ministre du Commerce puisque les vraies questions restent sans réponses. Qui sont ces pays corrupteurs et qui sont ces fraudeurs? Pourquoi ne pas les identifier? Et surtout pourquoi le ministre du Commerce n'a-t-il pas saisi immédiatement la justice? Entre le ministre du Commerce, Bakhti Belaïb et celui des Finances, Abderrahmane Benkhalfa, il y a un dénominateur commun: ce sont les deux bavards du gouvernement.