Il repose désormais en paix, dans un bout de terre ombragé d'oliviers au cimetière de son village natal, Aït Eurbah. Le dramaturge kabyle, Mohya, a été inhumé, hier, en présence d'une foule impressionnante. Ils sont venus de différents horizons pour rendre un ultime hommage au défunt. D'ailleurs, à 10h déjà, le centre du village d'Ath Eurbah était noir de monde ; il s'est avéré trop exigu pour contenir une masse humaine qui affluait sans discontinuité. Il a fallu que les jeunes, jouant le rôle d'organisateurs, fassent beaucoup d'efforts pour contenir cette marée humaine qui a, sous un soleil de plomb, déferlé dans les ruelles étroites d'Iboudraren. A 13 h, le cercueil paré de l'emblème national est sorti du domicile mortuaire. Puis, le cortège funèbre avance lentement dans un silence religieux, brisé par les La Illah illa Allah pour se diriger vers le cimetière, la route était submergée de monde. On relève dans la foule, la présence de nombreuses personnalités artistiques et politiques de la région. On citera, entre autres, Lounis Aït Menguellet, Ali Ideflawen, Saïd Sadi, président du RCD, Arezki About de l'UDR et quelques cadres de la fédération du FFS, ainsi qu'Ahmed Aït Bachir du MAK. Aussi, il est à noter que dès la matinée, les jeunes d'Aït Eurbah diffusaient à l'aide d'une puissante sono la poésie du défunt. Pour saluer comme un seul homme la mémoire de l'artiste, une procession bien compacte a rallié le cimetière du village. Ainsi, après la mise en terre et la prière des morts, Slimane Chabi, un chanteur kabyle qui a côtoyé Mohya, prend la parole avec beaucoup d'émotion, il prononce quelques mots: «Mohya est l'un des monuments de la culture algérienne. C'était un militant infatigable de la revendication amazighe surtout par son activisme au sein de l'académie berbère aux côtés de Bessaoud Mouhand Arav». En retenant difficilement ses larmes, Slimane Chabi ajoutera: «Mohya a pu sensibiliser, à travers ses oeuvres, beaucoup de gens autour de la revendication identitaire. Aujourd'hui, malgré qu'il soit décédé, il restera éternellement dans les mémoires de tous ceux qui connaissent la valeur de l'homme.» Rappelons enfin que Mohand Ou Yahia de son vrai nom, Mohya Abdellah, est né en 1949 dans la région d'Ath Yenni à Tizi Ouzou. Il est issu d'une famille modeste et son enfance n'a guère été différente de celle des enfants des villages kabyles. Il a décroché son doctorat en mathématiques durant les années 70 en France. En janvier 2004, tout en laissant une oeuvre inachevée, il sera hospitalisé et depuis, le cancer l'a cloué au lit jusqu'à sa mort, mardi dernier, dans une clinique parisienne.