Quatorze corps de jeunes ont été découverts hier à Mossoul au moment où un attentat suicide visait la «zone verte», le lieu le mieux protégé de Bagdad. Les jours passent et se ressemblent en Irak où la situation sécuritaire demeure sérieuse malgré l'optimisme de commande qu'affichent les autorité intérimaires irakiennes et le commandement central américain. Les attaques de la guérilla se poursuivent dans plusieurs provinces du nord de l'Irak alors qu'un attentat kamikaze visait hier la «zone verte» le lieu le mieux protégé de la capitale irakienne où est concentré le pouvoir intérimaire irakien sous bonne garde des Marines et des GI's américains. De fait, hier deux Marines américains ont été tués dans la province de Bagdad et font suite à la mort de huit Marines dans la province d'Al-Anbar, fief de la résistance irakienne, lors du dernier week-end. L'attentat d'hier à Bagdad a occasionné la mort de sept personnes alors que 19 autres ont subi des blessures diverses, selon un bilan des autorités sanitaires. Dans ces conditions incertaines, a été découvert hier dans le cimetière de Mossoul, au nord de Bagdad, les corps de quatorze jeunes personnes, exécutées d'une balle dans la tête, comme a pu le constater le médecin légiste qui s'est transporté sur les lieux. Ce dernier a déclaré aux agences de presse: «Nous avons reçu les corps de huit jeunes hommes exécutés d'une balle dans la tête. Leur mort remonte à environ quinze heures (au moment de la découverte macabre)» Six autres corps de jeunes gens ont été découverts plus tard dans la journée d'hier. Cela constitue une véritable hécatombe du fait que plus de 70 corps de jeunes ont été découverts à Mossoul depuis le début du mois courant. Les autorités locales estiment qu'il s'agirait de policiers exécutés, par les rebelles. Ces découvertes récurrentes de corps de jeunes gens exécutés témoignent de l'installation durable de l'insécurité en Irak. Sur un autre plan, l'opération à grand spectacle de l'armée d'occupation américaine à Falloujah - qui devait éradiquer la rébellion et pacifier le bastion de l'opposition islamique - si elle a permis la reprise de la ville, n'a pas pour autant atteint l'objectif assigné à cette entreprise, la réduction, voire l'annihilation des attaques contre les forces armées américaines et contre les policiers et les gardes nationaux irakiens. De fait, les «rebelles» de Falloujah ont montré leur détermination à résister en poursuivant des actions ponctuelles contre les forces d'occupation. Ainsi, le chef d'état-major interarmées américain, le général Richard Myers, qui est arrivé hier en Irak, venant du Koweït, a admis l'existence «de poches de résistance». Un euphémisme en fait, face à la réalité qui est celle prévalant sur le terrain. D'ailleurs, c'est dans la province d'Al-Anbar, où se trouve la ville de Falloujah, que dix Marines américains ont été tués au cours des trois derniers jours. C'est dire que les pertes en vies humaines américaines s'accumulent sans que les autorités militaires américaines aient pu trouver une solution ou une parade à une résistance qui chaque jour frappe durement les forces d'occupation. Le général Myers, dans sa déclaration a évoqué, comme raison de la recrudescence de la violence, l'approche des élections du 30 janvier prochain, indiquant: «Nous avons toujours dit que la violence allait augmenter au fur et à mesure que l'on approche des élections (...) Ils (les rebelles) continueront à essayer d'empêcher l'Irak de devenir un pays libre». le premier responsable militaire américain a confirmé que d'ici aux élections, le corps expéditionnaire américain atteindrait 150.000 hommes, comme l'avait déjà évoqué au début de ce mois, le secrétaire américain à la Défense, Donald Rumsfeld. En réalité, la situation d'ensemble pose un dilemme pour l'état-major américain et les stratèges de la Maison-Blanche et du Pentagone. En effet, les Etats-Unis semblent avoir mal engagé leur coup, car estiment des analystes politiques, leurs actions, dans un sens ou dans l'autre, risquent de ne donner aucun résultat sur le terrain, comme le souligne un expert du Centre de stratégie et d'études internationales (Csis), Anthony Cordesman, selon lequel «comme au Vietnam, si le gouvernement irakien ne parvient pas à gagner la bataille politique, les succès militaires américains ne serviront à rien» soulignant: «Un maintien des troupes américaines ne fera que provoquer davantage de résistance, mais un retrait trop rapide pourrait déclencher une guerre civile». Autrement dit, les Etats-Unis ont dégoupillé une bombe dont ils ne savent pas comment la désamorcer. En l'état actuel de la situation, quoi que fasse Washington, le risque d'implosion est toujours grand. Le seul espoir en fin de compte est que les élections projetées se tiennent à la date fixée et qu'elles aient lieu dans un climat acceptable ce qui, selon les stratèges américains, favoriserait un relatif apaisement. Il leur faut bien s'accrocher à quelque chose alors que politiques et militaires américains estimaient récemment, que l'armée américaine restera pour au moins encore dix ans en Irak comme quoi, l'Oncle Sam est loin d'être sorti de l'auberge.