L'explosion de la galaxie Europe Ecologie-Les Verts (EELV) fait les affaires de François Hollande, qui assiste à l'affaiblissement du camp des écologistes favorables à une candidature séparée à l'élection présidentielle de 2017. Le mouvement composite qui avait recueilli 16,28% des voix aux élections européennes de 2009 derrière le charismatique Daniel Cohn-Bendit est en lambeaux après deux départs spectaculaires provoqués par les bisbilles internes sur la participation des Verts au gouvernement, après leur sortie en mars 2014. Le co-président du groupe EELV à l'Assemblée, François de Rugy, a annoncé jeudi sa décision, imité vendredi par le président du groupe écologiste au Sénat, Jean-Vincent Placé. "Je pars", a dit le sénateur de l'Essonne sur Europe 1. "Ce n'est pas de gaieté de coeur" mais EELV "est un astre mort, une structure morte qui donne aujourd'hui une vision caricaturale et politicienne de l'écologie", a-t-il ajouté. "Je souhaite fédérer autour de moi avec François de Rugy et différents amis écologistes notamment de Génération Ecologie et du Front Démocrate (...) un grand mouvement de l'écologie réformatrice et non pas une écologie refermée, sectaire, identitaire et tournée vers l'extrême gauche comme on le voit aujourd'hui", a-t-il dit. La décision de François de Rugy et de Jean-Vincent Placé, qui pourraient être suivis par d'autres élus EELV, intervient quelques jours avant un remaniement gouvernemental pour remplacer François Rebsamen au ministère du Travail. "On ne réagit pas aux rumeurs", a-t-on déclaré dans l'entourage du président sur l'idée d'une entrée de François de Ruygy et de Jean-Vincent Placé au gouvernement ou d'un remaniement plus large que le seul ministre du Travail.
Quelle dynamique écologiste ? L'université d'été d'EELV, la semaine dernière, n'a servi qu'à mesurer le fossé entre les partisans d'un rapprochement avec le gouvernement, ceux qui proclament leur indépendance et ceux qui, comme l'ex-ministre du Logement Cécile Duflot, lorgnent vers l'extrême gauche et se préparent pour 2017. "Aujourd'hui, on n'arrive plus à avoir les débats, ni de fond ni stratégiques, au sein d'un parti qui s'enfonce dans une dérive gauchiste", a expliqué François de Rugy au Monde, qui évoque la désaffection des militants. Lors des européennes de 2014, les écologistes ont divisé leur score par deux (8,95%). Aux départementales du printemps dernier, leur choix de présenter des candidats maison au premier tour a contribué à faire perdre à la gauche la moitié des départements. Leurs querelles mises à part, les écologistes ont été inaudibles ces derniers mois sur les questions de fond. Pendant ce temps, les socialistes au pouvoir ont fait voter la loi sur la transition énergétique tout en préparant la conférence mondiale sur le climat de décembre à Paris, où ils espèrent un accord historique. Jean-Daniel Lévy, de l'institut Harris Interactive, évoque l'absence totale de dynamique chez les écologistes. "Depuis un bon moment, les Verts n'arrivent pas à être au centre du jeu politique, ils n'ont imposé aucun débat de société ni aucun projet qui conduise à se dire 'Tiens, il faut réfléchir à ce que propose EELV'", a-t-il dit à Reuters. La sortie du gouvernement de Cécile Duflot et Pascal Canfin, au printemps 2014 pour cause d'incompatibilité avec le Premier ministre Manuel Valls, ne leur a pas été bénéfique.
Pas de "candidature-croupion" Les intentions de vote pour les régionales de décembre sont inférieures à celles de 2010, où le parti avait rassemblé 12,2 % des suffrages exprimés au premier tour. Pour la fin de l'année, EELV a constitué des listes autonomes sauf dans cinq régions où le mouvement pourrait s'allier au Front de gauche. Depuis le retrait de la vie politique de Daniel Cohn-Bendit et le repli volontaire Cécile Duflot, aujourd'hui tentée par une alliance avec le Front de gauche de Jean-Luc Mélenchon, aucune figure emblématique n'a émergé du mouvement. En 2012, la candidature EELV Eva Joly avait obtenu 2,31 % des voix au premier tour de l'élection présidentielle. Même avec un score modeste, une candidature écologiste en 2017 risque toutefois d'empêcher François Hollande d'être présent au second tour et Jean-Vincent Placé insiste sur la possibilité que le candidat socialiste soit alors éliminé par Marine Le Pen, qui serait confrontée au candidat de la droite. Mais les deux "partants" divergent sur la stratégie. Pour Jean-Vincent Placé, il faut un ralliement derrière François Hollande, candidat naturel de la gauche. "Les idées écologistes sont évidemment essentielles, seulement voilà, elles ne peuvent pas être portées dans une candidature croupion qui ferait 1%, 2%", a-t-il déclaré. "Il faut évidemment s'appuyer sur le bilan du président de la République François Hollande." François de Rugy, lui, juge une primaire "incontournable" au sein de la majorité, alors que les partisans de François Hollande disent que la candidature du président va de soi, et dit se préparer à se présenter à cette élection interne.