Mauvais temps. Le soleil et un ciel bleu qui persistent en plein hiver sont en effet un mauvais temps pour nos ressources en eau. Au ministère, chargé de ces ressources, on se veut rassurant. Lors de la réunion, samedi dernier, des cadres de l'Agence nationale des barrages et transferts (Anbt), le DG, Arezki Barraki, a indiqué que le taux de remplissage des barrages est le même que celui de l'année dernière à la même époque. Il a ajouté qu'avec ce taux identique «nous avons passé une année (2014-2015) confortable». Pour ceux qui préfèrent les chiffres, il y a actuellement 72 barrages en exploitation qui contiennent (au 26 décembre 2015) 4,7 milliards de m3 soit un taux de remplissage national de 66,93%. C'est le DG de l'Anbt qui a communiqué ces chiffres. Toujours aussi rassurant, il a précisé «qu'en général, les apports interviennent entre janvier et mars. Ce n'est qu'après cette période, marquant la fin de l'hiver, que nous pourrions évaluer la situation». Donc «il n'y a pas le feu». Il y a tout de même une odeur de roussi. On le sent, lorsque le SG du ministère, El Hadj Belkateb, intervient à son tour pour préciser que les volumes d'eau alloués aux agriculteurs n'ont pas été réduits. Cependant, il enchaîne pour dire que son département «n'est pas responsable du manque d'eau dans les zones qui ne sont pas équipées en conduites ou en systèmes d'irrigation». Dans la lancée il appelle les cadres de l'Anbt à la vigilance. Pourquoi? D'abord à cause du réchauffement climatique à l'échelle planétaire et ensuite pour assurer une maintenance «optimisée» des 72 barrages avec le même budget et même au cas où il serait réduit. Quitte à trouver d'autres financements avec l'écotourisme et les ressources halieutiques. Il fouille encore et trouve que la croissance démographique va faire augmenter la demande en eau. Qu'une «pression supplémentaire et inévitable» est attendue du côté du tourisme et de l'habitat. Il conclut ainsi: «L'Anbt est plus que jamais en première ligne de développement. Ceci vient mettre en lumière aujourd'hui, plus qu'hier, le rôle de l'agence comme levier stratégique de mobilisation de la ressource en eau.» Il ne faut pas être sorcier pour comprendre que si ce n'est pas encore le mauvais temps, nous n'en sommes pas très loin. Nous sommes en présence d'une information donnée en intra-muros alors qu'elle mérite une large diffusion. Pour sensibiliser les consommateurs. Les appeler sinon à économiser cette précieuse denrée, du moins s'interdire de la gaspiller. Dans le calme et la responsabilité. Attendre le mois de mars comme semble se résigner le DG de l'Anbt pour «évaluer la situation» c'est agir une fois que «les carottes sont cuites». Les multiples vertus du principe de précaution semblent totalement ignorées. Comme pour favoriser l'utilisation rationnelle de l'eau. Par des changements de comportement des consommateurs, voire des mentalités. Quand bien même les eaux superficielles de nos barrages ne sont pas notre seule ressource. Qu'il y a l'eau souterraine (nappes phréatiques). Des usines de dessalement d'eau de mer. D'autres qui traitent les eaux usées. Qu'en 2016, cinq nouveaux barrages seront livrés. Trois autres en 2017 et un autre encore en 2018. L'Algérie reste cependant dans «la catégorie des pays pauvres en ressources en eau» (classement établi par le Programme des Nations unies pour le développement (Pnud). Ce même Pnud que nous avons sollicité, il y a peu pour, selon le ministre Abdelouahab Nouri, «nous faire bénéficier de son savoir-faire dans les domaines de la gestion et la sécurité de ces ouvrages». On se rend vite compte que ce n'est pas seulement la pluie qui nous manque. Et ce n'est qu'au mois de mars que les Algériens sauront tout. On dit que c'est le «mois des fous»!