Le Premier ministre islamo-conservateur turc Ahmet Davutoglu lancera cette semaine un dialogue au Parlement pour discuter de ses projets de réforme constitutionnelle sans toutefois les Kurdes qui ont appelé à l'autonomie dans le Sud-est où une opération militaire majeure est en cours. «Il n'est plus correct de les accepter comme des interlocuteurs après leurs récentes déclarations qui frôlent l'insolence», a déclaré M. Davutoglu hier devant la presse à Istanbul. Il s'adressait au Parti démocratique des peuples (HDP, pro-kurde), quatrième force politique de Turquie. Le Congrès pour une société démocratique (DTK), organisation qui chapeaute les mouvements kurdes turcs, dont en premier lieu le HDP, a lancé dimanche un appel à l'autonomie, en pleine offensive de l'armée dans la région qui a jusqu'à présent fait, selon l'armée, plus de 200 morts dans les rangs du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), mouvement kurde armé actif depuis 1984. M.Davutoglu a annulé samedi une rencontre prévue demain avec Selahattin Demirtas, le chef de file du HDP, en accusant sa formation de «profiter» de la violence actuelle. Hier il a accusé le HDP, largement considéré comme la vitrine politique du PKK, de n'être «pas claire dans ses intentions politiques» et d'être un «pion» des rebelles kurdes. «Cela n'a plus de sens de s'asseoir à la même table qu'eux (...) Je suis prêt à discuter de la Constitution avec tous mais l'intégrité de la Turquie n'est absolument pas un sujet de débat», a-t-il ajouté. L'armée a lancé il y a deux semaines une opération massive contre des localités du sud-est à dominante kurde pour en déloger les rebelles. Le conflit séparatiste kurde en Turquie a fait plus de 40.000 morts en trente ans. M.Davutoglu doit rencontrer mercredi dernier les chefs des deux autres formations d'opposition au Parlement, Kemal Kiliçdaroglu du parti républicain du peuple (CHP, social-démocrate) et Devlet Bahçeli du Parti de l'Action nationaliste (MHP, droite). Le projet d'un passage à un système présidentiel défendu par le chef de l'Etat Recep Tayyip Erdogan, l'homme fort de Turquie, est revenu au premier plan après la nette victoire (49,5% des voix) de son parti de la justice et du développement (AKP) aux élections du 1er novembre dernier. Mais l'AKP n'a pas obtenu la majorité qualifiée (367 députés) pour pouvoir modifier la Constitution seul et doit rechercher le soutien de l'opposition, opposée en bloc à une présidentialisation du régime.