Pour le Conseil des relations islamo-américaines (Cair), il y a vraiment à se faire du souci : un sondage réalisé par un groupe de chercheurs de l'université Cornell montre que 44 % des personnes interrogées estiment que le gouvernement fédéral «doit d'une certaine manière imposer des restrictions des droits civils aux musulmans américains». Pour les responsables du Cair, organisation musulmane très présente aux Etats-Unis et au Canada avec près de 30 antennes, «les élus, les responsables gouvernementaux et les autres leaders d'opinion doivent reconnaître la poussée de l'islamophobie au sein de la société américaine, phénomène qui doit être abordé avec urgence». L'enquête relève aussi que 27 % pensent que tous les musulmans américains «devraient être soumis à la condition de déclarer leur lieu de résidence au gouvernement fédéral» et 26 % estiment que «les mosquées devraient être étroitement surveillées et contrôlées par la police». Depuis les événements du 11 septembre 2001, les Américains sont totalement sous le choc d'une nouvelle attaque. Cela explique «la guerre comme nouvelle diplomatie et politique étrangère», comme cela explique la réélection du GWB pour un second mandat. La riposte américaine, démesurée et sans aucune mesure depuis la fin de l'année 2001, s'explique par l'énorme sentiment de panique, de crainte et d'humiliation né au lendemain des attentats de NY et Washington. Le discours politique et religieux des chefs d'Al-Qaîda ont aussi aidé à se fortifier l'idée sournoise que les musulmans seuls sont capables encore d'attenter à la vie des Américains, en lançant un djihad forcené qui ne reconnaît pas le droit à la vie, ni le droit à la propre vie des djihadistes. Les musulmans du monde, dont le nombre dépasse les 1,2 milliard se sont tout à coup réveillés le 12 septembre 2001, avec le sentiment qu'ils sont la seule force qui a pu humilier les Américains sur leur propre sol. Inutile de décrire ici le rire sous cape, et le sourire entendu qu'ils se faisaient, ni l'admiration quasi hystérique pour Oussama Ben Laden, même si le discours officiel disait le contraire. La guerre en Irak et en Afghanistan, les menaces qui pèsent sur la Syrie et l'Iran et les mots quasi religieux, utilisés par GWB ont été autant de motifs qui ont renforcé les Américains dans leur sentiment de peur panique face à l'islam, mais qui ont renforcé aussi des milliers de jeunes musulmans dans leur sentiment que Washington leur veut tout le mal du monde. Une insidieuse impasse en somme.