L'opposition syrienne a finalement accepté les discussions indirectes avec les représentants de Damas L'opposition syrienne poussait ses pions hier à Genève pour tenter d'obtenir des gages en faveur des civils, avant d'entrer dans une négociation indirecte avec Damas dans l'espoir de trouver une issue à cinq ans d'une guerre meurtrière. Si ces tractations s'engagent, elles ne devront en aucun cas permettre d'amnistier les auteurs de crimes de guerre ou de crimes contre l'humanité, a tenu à souligner hier le haut-commissaire de l'ONU pour les droits de l'homme. «Nous espérons qu'au cours des négociations, les médiateurs insisteront bien évidemment sur ce point auprès des parties au conflit», a déclaré Zeid Ra'ad Al Hussein. Ces violations sont commises au quotidien en Syrie, où les bombardements tuent indistinctement civils et combattants, où une quinzaine de localités sont actuellement assiégées et où des dizaines de milliers de civils sont détenus arbitrairement, selon l'ONU. Avant d'entrer dans toute forme de dialogue avec Damas, les opposants réclament donc des améliorations humanitaires: fin des bombardements, levée des sièges et libération de détenus. Après avoir longtemps hésité à rallier le processus engagé par l'ONU, le Haut comité des négociations (HCN), une coalition d'opposants politiques et de représentants de groupe armés, a finalement accepté d'être reçu hier après-midi au Palais des Nations. «Nous avons reçu des assurances de nos amis dans la communauté internationale et nous avons eu une réponse positive de l'émissaire spécial de l'ONU», a expliqué un de ses porte-parole, Salem al-Meslet. «Nous intensifions nos efforts pour mettre un terme aux souffrances en Syrie». La délégation du HCN a rencontré dimanche les principaux diplomates occidentaux impliqués dans le processus et a reçu dans son hôtel l'émissaire des Nations unies Staffan de Mistura. Ce dernier «leur a fait une proposition», a rapporté une source diplomatique sans préciser son objet. Selon cette source, le HCN est très méfiant vis-à-vis du régime mais aussi de l'ONU, et veut «des choses tangibles et visibles tout de suite (...) Le plus facile serait des libérations de civils», notamment sur la liste de 3000 femmes et enfants prisonniers dressée par l'opposition. Ces discussions officieuses retardent l'ouverture des pourparlers officiels. L'ONU, qui avait rencontré vendredi la délégation de Damas, a repoussé une nouvelle rencontre initialement prévue hier matin. Ce report vise, selon une porte-parole de l'ONU, «à permettre à M.de Mistura de rencontrer d'abord le HCN». La réunion ONU-Damas a été reprogrammée aujourd'hui à 10h00 GMT, selon une source dans le gouvernement syrien. Staffan de Mistura veut mettre en place un dialogue indirect entre les deux camps, avec des émissaires chargés de faire la navette. Ce processus pourrait s'étendre sur six mois, délai fixé par l'ONU pour aboutir à une autorité de transition qui organiserait des élections à la mi-2017. Pour l'aider à avancer, un grand nombre de diplomates étaient présents à Genève, pour des entretiens parallèles. La secrétaire d'Etat adjointe américaine pour le Moyen-Orient, Anne Patterson et l'émissaire des Etats-Unis pour la Syrie, Michael Ratney, devaient ainsi rencontrer hier le vice-ministre des Affaires étrangères russe Guennadi Gatilov. La communauté internationale cherche une issue négociée à la guerre en Syrie qui, depuis mars 2011, a fait plus de 260.000 morts et poussé des millions de personnes à quitter leur foyer. Le chaos syrien a également permis l'essor du groupe Etat islamique qui a conquis de larges pans du territoire. Dimanche, un attentat anti-chiite revendiqué par l'EI a encore tué au moins 70 personnes, près de Damas. Malgré l'urgence humanitaire, la partie est loin d'être gagnée, tant la méfiance est grande entre les deux camps, qui ont multiplié dimanche les actes de défiance.