Daesh voulait prendre le contrôle de la région de Ben Guerdane Les autorités ont annoncé la saisie d' «importantes quantités» d'armes de guerre et de munitions, alors que le nombre total de djihadistes impliqués n'est pas encore établi, ainsi que leur véritable identité. Lors d'une conférence de presse tenue hier matin, à Dar Edhiafa à Carthage, par le chef du gouvernement Habib Essid, le bilan «définitif» des attaques terroristes de Ben Guerdane s'élève à 36 terroristes abattus, sept autres arrêtés tandis que 12 membres des forces de sécurité sont tombés en martyrs (un de l'armée, un de la douane, trois de la police et sept de la garde nationale, dont un assassiné chez lui). Sept civils figurent également au nombre des victimes. Quant aux blessés, on en compte sept parmi la sécurité nationale, sept pour l'armée, et trois citoyens. Habib Essid a affirmé que, depuis février 2016, 49 éléments terroristes ont été tués et 31 autres ont été arrêtés. Tous ces chiffres contribuent à situer avec une certaine clarté la menace terroriste en Tunisie, sachant que la première attaque de Ben Guerdane a été lancée depuis une mosquée voisine de la caserne militaire. En même temps, les terroristes ont ciblé les districts de la police et de la Garde nationale avec pour objectif, c'est le Premier ministre tunisien qui l'a déclaré, «d'instaurer un émirat du groupe Etat islamique à Ben Guerdane.» Hier, toute la journée a été marquée par la poursuite de l'opération militaire et policière caractérisée par un vaste ratissage de la ville et de la région. Les autorités ont annoncé la saisie d'«importantes quantités» d'armes de guerre et de munitions, alors que le nombre total de djihadistes impliqués n'est pas encore établi, ainsi que leur identité d'ailleurs, mais les autorités détiennent sept d'entre eux dont l'interrogatoire se poursuit. Une première estimation les chiffre à une cinquantaine au total. Les premières réactions ont eu lieu lundi matin, comme celle de la coordination des partis au pouvoir qui a appelé à une marche nationale contre le terrorisme, tout en saluant la mobilisation des habitants de Ben Guerdane aux côtés des forces de sécurité. Plusieurs personnalités ont appelé, le même jour, à la fermeture du bureau de la chaîne d'Al Jazeera en Tunisie, lui reprochant d'avoir «travaillé à Ben Guerdane pour les groupes terroristes et leurs cellules dormantes». L'Algérie a aussitôt réagi en condamnant fermement ces attaques et en réitérant son soutien au peuple frère tunisien. De même, le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, a condamné hier les attaques terroristes qui ont ciblé la police et l'armée, et réaffirmé «l'engagement de l'organisation à se tenir aux côtés du peuple tunisien dans sa lutte contre le fléau du terrorisme». La Tunisie vit depuis lors avec la fermeture des postes-frontières pour une durée indéterminée, et la route reliant Ben Guerdane à Zarzis, plus au nord, reste bouclée, tout comme les accès à l'île de Djerba dont le gouvernement redoute qu'elle ne soit une cible programmée. Les premiers enseignements de cette nouvelle attaque terroriste en Tunisie confirment les analyses précédentes quant à l'afflux grandissant des combattants tunisiens dans les rangs de Daesh en Irak et en Syrie. Si certains d'entre eux sont cantonnés en Libye, non loin de la frontière tunisienne, beaucoup semblent s'être insérés dans le tissu urbain tout en conservant des liens avec les éléments réfugiés dans les maquis avoisinants qui bénéficient, par-là même, d'une logistique efficace. Parmi les multiples questions posées au lendemain de ces attaques terroristes de grande ampleur et parfaitement coordonnées, il y a la facilité avec laquelle ces 50 terroristes ont occupé la scène à Ben Guerdane. Habib Essid a annoncé à cet égard une «évaluation approfondie» car «il y a beaucoup d'enseignements que nous allons tirer. Il se peut qu'il y ait (eu) une défaillance à un certain niveau, au niveau des renseignements, au niveau d'autres éléments», a-t-il dit. Le fait que les 50 assaillants de Ben Guerdane soient également tous Tunisiens étaye cet argumentaire et induit des perspectives inquiétantes pour la suite des évènements. La pression de l'EI risque de s'accroître de plus en plus, ses coups de boutoir sur la frontière l'indiquent clairement. L'objectif de Daesh est de planter ses crocs dans les pays voisins de la Libye et, de ce fait, la Tunisie mais aussi l'Algérie ont un sacré défi à relever tant que la situation dans une Libye divisée et fortement instable n'est pas encore maîtrisée. L'extrémisme n'a pas l'air d'inquiéter le moins du monde les factions qui se disputent le pouvoir, à Tripoli comme à Tobrouk. Et pourtant, l'urgence est une fois de plus démontrée.